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Les généralistes confrontés au Covid long

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Publié le 25/03/2022
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La deuxième journée du Congrès de la médecine générale (CMGF) s'est ouverte sur une session plénière destinée à la prise en charge des symptômes prolongés du Covid-19. L'occasion de revenir sur les difficultés posées par ces troubles souvent aspécifiques.

Crédit photo : GARO/PHANIE

« Il y a une légende urbaine selon laquelle les généralistes ne verraient pas de patients atteints de Covid long », affirme le généraliste Eric Drahi, qui a notamment contribué à la mise en place d'une cellule de coordination sur le Covid long dans le Loiret. Une idée reçue démentie dès les premières minutes de la session plénière du CMGF consacrée à la prise en charge des symptômes persistants de l’infection à SARS-CoV-2. À la question « qui a déjà accompagné au cabinet des patients concernés ? », la majorité des généralistes présents dans la salle – comble – ont lever la main.

Des troubles fréquents et invalidants

Et pour cause : même si leur prévalence apparaît difficile à estimer, les formes prolongées semblent relativement fréquentes. Ainsi, en France, 700 000 patients auraient déjà reçu un diagnostic de Covid-19 long, rapporte Yoann Gaboreau, généraliste et maître de conférences à l'Université de Grenoble. Et selon les premières enquêtes sur la qualité de vie des patients touchés, cette forme longue de la maladie impacterait fortement les malades au quotidien, certains n’ayant toujours pas repris d'activité professionnelle plusieurs semaines, mois, voire années après l'infection initiale.

Des symptômes peu spécifiques

D'où un besoin de prise en charge certain, mais pas toujours simple comme l’ont souligné plusieurs intervenants. Ne serait-ce que parce que la définition de la maladie reste en construction, et de ce fait mouvante. Si début 2021, la Haute Autorité de santé (HAS) retenait trois critères diagnostiques (épisode initial symptomatique, symptômes au-delà de 4 semaines après la phase aiguë, pas d’autre étiologie possible que le Covid long), 8 mois plus tard, l’OMS évoquait par exemple plutôt des symptômes durant plus de 3 mois survenus dans les 3 mois après l’épisode initial. Des discordances qui compliquent le diagnostic même des formes prolongées de l'infection à SARS-CoV-2.

Par ailleurs, comme dans d’autres syndromes post-infectieux (Lyme chronique, Ebola, syndrome de fatigue chronique, etc.), ces symptômes persistants apparaissent très divers et, hormis des anosmies persistantes caractéristiques, peu spécifiques. Épuisement, troubles neurocognitifs, une gêne respiratoire, troubles digestifs, etc., bien des organes peuvent être atteints. Et si, comme l’affirme l’infectiologue Dominique Salmon (Paris), des hypothèses physiopathologiques sont avancées – à l’instar d’une persistance indétectable de fragments virus ou d’une neuroinflammation prolongée – ces pistes n’ont pour le moment pas donné d’applications thérapeutiques.

Ne pas banaliser

D’où un potentiel sentiment d’impuissance devant ces symptômes « somatoformes », qu'il serait alors tentant de déconsidérer. C'est d'ailleurs ce que rapporteraient des associations de patients, comme le déplore le généraliste Claudre Bronner (Strasbourg).

Cependant, des traitements symptomatiques sont disponibles. Et selon le professeur de médecine générale et sociologue Philippe Cornet (Paris), les patients se trouveraient moins dans une impasse thérapeutique que dans un basculement identitaire lié à la maladie chronique. Ainsi l'écoute peut aussi beaucoup.

De plus, comme face à toutes les autres maladies chroniques, le médecin traitant n’est pas seul et peut, sans toutefois multiplier les bilans et interventions lourdes, s’entourer de cardiologues, de pneumologues, d'ORL en cas d'anosmie, de kinés notamment respiratoires, de psychologues, et autres spécialistes. Et comme le rappelle le Dr Bronner, des cellules d’appui et de coordination adaptées aux patients les plus lourdement touchés se mettent en place dans toutes les régions.


Source : lequotidiendumedecin.fr