La Haute autorité de santé (HAS) a annoncé jeudi qu’elle rendrait son avis définitif « sur l'intérêt de maintenir le remboursement des médicaments homéopathiques » le 28 juin, après avoir auditionné les laboratoires Boiron, Lehning et Weleda le 12 juin. Au même moment, le collectif « Monhoméomonchoix » organisait un petit-déjeuner de presse, aux airs de baroud d’honneur.
Pendant plus d’une heure et demie, trois médecins et un représentant d’une association de patients ont expliqué pourquoi un avis défavorable, qui ouvrirait la porte au déremboursement de l’homéopathie, serait une mauvaise décision.
Les patients pas suffisamment écoutés ?
Née d’une tribune retentissante réclamant le déremboursement de l’homéopathie par l’Assurance maladie, la polémique dure depuis près d’un an et demi. 18 mois au cours desquels la « parole des patients a été insuffisamment entendue », selon le président de l’Association Homéo Patients France (AHP France), Joël Siccardi. Et ce malgré les plus de 800 000 signatures recueillies par une pétition publiée sur le site monhomeomonchoix.fr. « Quelque part, notre témoignage n’est pas respecté », estime-t-il, avant de rappeler que l’une des ambitions de « Ma Santé 2022 » est de mettre le patient au centre du système de santé.
Le collectif estime que les médecins hostiles à l'homéopathie sont finalement peu nombreux et que la communauté médicale dans sa globalité est « plutôt soit neutre, soit favorable » à cette thérapeutique. « La soixantaine de signataires que nous avons identifiés sont quasiment tous des jeunes médecins frais émoulus de la faculté, avec des certitudes absolues sur ce qu’ils ont appris », observe le Dr Charles Bentz, président du SNMHF (Syndicat national des médecins homéopathes français).
« Pour deux des familles dont je suis le médecin traitant, j’en suis à la cinquième génération. Ils ne viennent pas me voir seulement pour de la "bobologie", mais pour tous leurs problèmes. Pensez-vous que pendant tout ce temps j’ai soigné ces familles avec un placebo ? », interroge Charles Bentz. « C’est impensable ! ».
« Nous soignons tous avec les médicaments conventionnels »
Pour le Dr Hélène Renoux, présidente la Société savante d’homéopathie (SSH), le déremboursement des médicaments homéopathiques forcerait certains patients, notamment parmi les « classes très populaires », à y renoncer, et donc à perdre « leur liberté de choix ». Surtout, le collectif « Monhoméomonchoix », redoute qu'à terme l'homéopathie tombe entre les mains de non-médecins.
Il réfute également l’argument selon lequel les patients adeptes de l’homéopathie ne recourent plus à l'allopathie. « Il ne faut pas délirer ! », s’étrangle le Dr Antoine Demonceaux, président de Safe Med et généraliste homéopathe à Reims. « Nous sommes des généralistes, nous soignons tous avec les médicaments conventionnels ».
« Les dés sont pipés »
Mi-mai, la teneur du projet d’avis de la commission de transparence de la HAS avait fuité. Celui-ci penchait vers un déremboursement, comme plusieurs sociétés savantes (CNGE, Académies de médecine et de pharmacie) l'ont réclamé.
Pour le Dr Antoine Demonceaux, ces prises de position s'expliquent par l'existence d'un « biais scientifique intellectuel ». Dans l’esprit de ces sociétés, « un médicament ne peut fonctionner sans molécule », regrette-t-il. « Et si ça ne peut pas marcher, c’est inefficace », poursuit le Dr Demonceaux. De fait, les « recherches physiques, biophysiques sur les hautes dilutions » sont occultées selon le président de Safe Med.
De plus, le Dr Antoine Demonceaux affirme que la place croissante de l’homéopathie dans le champ thérapeutique en France et en Europe peut « déranger Big Pharma » en privant les labos de certains revenus à une époque où « les laboratoires ont des difficultés à survivre dans le monde de la médecine ». « On peut penser que les dés sont pipés », lance-t-il. « Des études publiées aux États-Unis montrent que les prospectives de croissance du marché de l’homéopathie sont exponentielles », assure le Dr Hélène Renoux.
Le maintien du remboursement sinon rien ?
Évoquée par Bruno Le Maire, ministre de l'économie, l'éventualité d'un passage du taux de remboursement des médicaments homéopathiques de 30 à 15 %, ne satisferait pas le collectif, même s'il ne la rejette pas totalement.
« Nous avons des arguments à faire valoir pour une thérapeutique efficace et donc pour l'instant, il n'y a aucune raison que nous acceptions une baisse de remboursement. Nous demandons son maintien », dit le Dr Bentz.
Enfin, la diminution du taux de remboursement à 15 % « permettrait ensuite de dérembourser l'homéopathie sans évaluation », indique le Dr Demonceaux.
Cancer colorectal chez les plus de 70 ans : quels bénéfices à une prise en charge gériatrique en périopératoire ?
Un traitement court de 6 ou 9 mois efficace contre la tuberculose multirésistante
Regret post-vasectomie : la vasovasostomie, une alternative à l’AMP
Vers un plan Maladies rénales ? Le think tank UC2m met en avant le dépistage précoce