Entre les femmes qui sont trop dépistées, celles qui devraient l’être de manière rapprochées et qui ne le sont, entre les idées reçues et des facteurs de risque de cancer du sein mal évalués, la HAS vient de prononcer l’alpha et l’oméga du dépistage en fonction des facteurs de risque. Parmi les 69 facteurs recensés dans la littérature comme potentiellement associés au cancer du sein, les experts ont fait un tri radical.
La mutation des gènes BRCA1 et BRCA2 joue hors catégorie. Elle classe depuis longtemps à très haut risque les femmes qui en sont porteuses, et l’Inca réactualise ses recommandations de 2008. En dehors de ces anomalies génétiques, la HAS, sollicitée par l’INCa dans le cadre du Plan Cancer, a retenu 7 situations pour lesquelles un dépistage spécifique est recommandé, indépendamment de toute notion d’âge.
De manière prévisible, un antécédent personnel de cancer du sein ou de carcinome canalaire in situ, doit faire l’objet d’un suivi spécifique pendant un certain temps au delà duquel la femme réintégre ou pas le programme national de dépistage organisé. De même, un antécédent d’hyperplasie canalaire ou lobulaire atypique ou de carcinome lobulaire in situ.
L’irradiation thoracique, risque majeur
L’antécédent d’irradiation thoracique à haute dose, pour maladie de Hodgkin en particulier, entre dans le cadre des 7 situations classées à haut risque. Selon le Pr Jean-Luc Harousseau, président de la HAS, « ces patientes sont en général sorties depuis longtemps des services d’oncologie et elles ne bénéficient donc plus d’un suivi spécifique. Or l’irradiation thoracique est un facteur de risque majeur de cancer du sein ». Il importe donc de les repérer pour leur proposer un examen clinique et une IRM tous les ans à partir de 8 ans après la fin de l’irradiation. Arrive ensuite la cohorte des patientes avec antécédents familiaux de cancer du sein auxquelles il va falloir attribuer un niveau de risque qui détermine ensuite les modalités de suivi.
La nébuleuse des « antécédents familiaux »
Tout antécédent familial ne classe pas automatiquement les femmes dans un score de haut risque. Et « une femme de 35 ans qui a une mammo annuelle parce que sa grand-mère a eu un cancer du sein à 55 ans ne justifie pas une telle surveillance », explique le Dr Catherine Colin, radiologue à Lyon. Or c’est justement dans cette nébuleuse « antécédents familiaux » que le plus grand nombre d’erreurs est commis. La
HAS recommande donc de s’appuyer sur le score d’Eisinger et d’orienter vers une consultation génétique dès qu’il est supérieur ou égal à 3. Et ce, bien entendu en l’absence de mutation BRCA1/BRCA2 connue. « C’est à l’onco-généticien d’évaluer le niveau de risque personnel de cancer, au vu de son arbre généalogique et de son âge », explique le Dr Olivier Scemama, expert à la HAS.
Sur la soixantaine d’autres facteurs de risque de cancer du sein présumés ou identifiés, leur analyse a permis de les classer dans la case du programme national de dépistage organisé. « Autrement dit, les femmes concernées par un de ces facteurs de risque n’ont pas besoin d’un dépistage autre que celui proposé à toutes les femmes âgées de 50 à 74 ans et qui consiste en une mammographie tous les 2 ans », précise la HAS. Leur association à la survenue de cancer ayant été jugée nulle, insuffisamment robuste ou modeste. Si la consommation de thé, café, tomates ou pamplemousse a été rangée sans surprise dans la première catégorie, il est plus surprenant d’y voir le tabagisme ou les prothèses en silicone dont la présence auraient un impact nul.
Une densité mammaire élevée après la ménopause ne constitue pas non plus un risque significatif, car le radiologue peut s’appuyer sur l’échographie en cas de difficulté d’interprétation. Si d’autres facteurs de risque, comme le traitement hormonal substitutif, les grossesses tardives, l’alcool ou l’obésité, ont été reconnus comme associés à une augmentation du risque de cancer, elle est jugée modeste. Et donc susceptibles de générer des surdiagnostics.
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