Pr Jacques Blacher, président sortant de la SFHTA : « Informer le patient et lui laisser le choix »

Publié le 16/11/2018
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Quelle est la place actuelle de l’HCTZ dans l’HTA ?

Pr Jacques Blacher L’ HCTZ fête cette année ses soixante ans ! Il a été le premier vrai anti-hypertenseur, le premier à faire l’objet d’un essai randomisé dans l’HTA et à montrer un bénéfice, non seulement sur la PA mais aussi en termes de réduction des complications cardiovasculaires. Plusieurs décennies après, il reste encore en bonne place parmi les molécules préconisées dans l’HTA. D’autres thiazidiques ont été développés, comme la chlortalidone puis l’indapamide. Mais en France, la chlortalidone n’est disponible qu’en association avec l’aténolol. L’indapamide ne peut être prescrit qu’en monothérapie ou en association avec le perindopril. Et les autres associations développées avec un thiazidiques ont privilégié l’HCTZ. Je pense qu’aujourd’hui en France, l’HCTZ doit représenter environ 90 % des prescriptions de thiazidiques, l’indapamide 9 % et la chlortalidone 1 %.
Quant aux autres diurétiques (diurétiques de l’anse et épargneurs de potassium), ils relèvent d’indications très réduites dans l’HTA.

Faut-il lever le pied sur les prescriptions ?

Pr J. B.  J’ai quasiment arrêté de prescrire de l’HCTZ depuis 2011. Non pas pour des questions de sécurité mais plus d’efficacité !

Des comparaisons indirectes entre thiazidiques, issues d’essais américains, suggèrent en effet qu’un traitement à base de chlortalidone est à peu près aussi bien toléré mais plus efficace pour réduire les complications cardiovasculaire. En fait, sur le plan pharamacocinétique, la chlortalidone est très supérieure car elle agit 24 heures alors que l’HCTZ a une demi-vie assez courte et n’est finalement pas un très bon médicament en monoprise.

En 2011, le Nice a donc préconisé de privilégier la chlortalidone et l’indapamide par rapport à l’HCTZ et je trouve ces recommandations tout à fait légitimes.

L’alerte de l’ANSM change-t-elle la donne ?

Pr J. B. Ce n’est jamais satisfaisant de faire prendre un risque de cancer pour un traitement de prévention. Aujourd’hui, si on initie un thiazidique, tout plaide plutôt dans le sens de l’indapamide. Par contre, chez un patient déjà sous HCTZ, et chez qui le traitement est bien supporté et efficace, il faut avoir de sérieux arguments pour tout changer. Une option est d’informer le patient du risque et de lui laisser le choix, tout en lui expliquant que ce risque est faible et que pour le moment les autorités n’ont pas préconisé de switcher les prescriptions.  

Le Pr Blacher déclare avoir des liens d’intérêts avec l'ensemble des laboratoires qui commercialisent des anti-hypertenseurs, notamment ceux qui commercialisent l’hydrochlorothiazide et l’indapamide.


Source : lequotidiendumedecin.fr