Une supplémentation de longue durée en vitamine D et en acides gras Oméga 3 d’origine marine pourrait bel et bien s’avérer protectrice contre les maladies auto-immunes. C’est ce que suggère un essai clinique américain – randomisé, en double aveugle, contre placebo – publié dans le British Medical Journal (BMJ).
Des régulateurs potentiels de l'inflammation
La vitamine D et les acides gras Oméga 3 sont considérés depuis plusieurs années comme des traitements potentiels des maladies auto-immunes. Car ces deux nutriments participent théoriquement à la régulation de l’inflammation. Cependant, les études conduites in vivo pour estimer leur intérêt thérapeutique contre les maladies auto-immunes ont donné des résultats contradictoires, en particulier pour la vitamine D. De plus, l’efficacité préventive contre les maladies dysimmunitaires d’une supplémentation en vitamine D ou en acides gras Oméga 3 n’a pour le moment pas été évaluée, du moins par des essais cliniques.
Les auteurs l'étude du BMJ a donc cherché à déterminer l’intérêt de la vitamine D et des Oméga 3 pour la prévention des maladies auto-immunes. Les chercheurs se sont penchés sur une cohorte de près de 26 000 hommes de plus de 50 ans et de femmes de plus de 55 ans ne présentant a priori pas d’hypovitaminose particulière, initialement recrutés pour tester l’efficacité de la vitamine D et des Oméga 3 en prévention du cancer. Ces participants ont reçu quotidiennement soit de la vitamine D (2 000 UI/jour), soit des acides gras Oméga 3 d’origine marine (1 000 mg/jour sous forme d'une gélule d’huile de poisson contenant 460 mg d’acide eicosapentaénoïque et 380 mg d’acide docosahexaénoïque), soit les deux, soit un placebo. Ils ont été suivis pendant 5 ans environ.
Un effet plus marqué en cas d'IMC faible
Résultat : la vitamine D, seule ou en association aux Oméga 3, semble bel et bien efficace en prévention des maladies auto-immunes. En effet, une supplémentation en vitamine D seule, prise pendant 5 ans, a été associée à une réduction de 22 % de l’incidence des maladies auto-immunes par rapport au placebo. Lorsque la vitamine D a été associée aux Oméga 3, ce chiffre a atteint 30 % environ, indiquent les auteurs de l’étude.
Cette supplémentation en vitamine D bénéficierait en particulier aux personnes présentant un faible IMC. Pour la supplémentation en vitamine D vs placebo, le hazard ratio était de 0,47 pour les personnes présentant un IMC égal à 18 contre 0,69 pour ceux ayant un IMC de 25, voire de 0,90 pour ceux ayant un IMC de 30. Un phénomène que Karen H Costenbader (Boston) qui a participé à l’étude, explique, dans un commentaire paru le 28 janvier, « potentiellement [par] une absorption dans le tissu adipeux entraînant une biodisponibilité plus faible » chez les personnes présentant un IMC plus élevé.
Cette efficacité semble par ailleurs plus marquée vis-à-vis de la polyarthrite rhumatoïde. En effet, « l’incidence de la polyarthrite rhumatoïde était approximativement 40 % plus basse dans les groupes ayant reçu une supplémentation que dans ceux ayant reçu un placebo », rapportent les auteurs. Un constat à interpréter avec prudence toutefois face à la faible incidence de la pathologie parmi les participants (moins de 40 volontaires ont développé la maladie). D’ailleurs, c’est pour la même raison que les chercheurs peinent à conclure pour le psoriasis ou les maladies auto-immunes thyroïdiennes, expliquent Karen Costenbader.
Une efficacité moins nette avec les Oméga 3
L’efficacité préventive des Oméga 3 semble en revanche incertaine. « La supplémentation en acides gras Oméga 3, avec ou sans vitamine D, a n’a réduit l’incidence des maladies auto-immune que de 15 % », un chiffre en deçà du seuil de significativité calculé par les chercheurs. « Cependant en incluant les participants atteints d'une maladie auto-immune probable [et pas seulement ceux dont le diagnostic a été confirmé N.D.L.R.], la supplémentation en acides gras oméga 3 a plutôt réduit le taux d’incidence de 18 % vs placebo, et une interaction significative a été trouvée avec le temps, indiquant un effet accru après une plus longue durée de supplémentation ».
Des bénéfices qui augmentent avec le temps
Cet accroissement de l’efficacité préventive de la supplémentation a d’ailleurs également été trouvé avec la vitamine D. « Quand seules les trois dernières années de l’étude ont été prises en compte, le groupe vitamine D comportait 39 % de participants avec un diagnostic confirmé de maladie auto-immune de moins que le groupe placebo », rapportent les chercheurs.
Si des inconnues demeurent, pour le Dr Karen Costenbader, les conclusions de cette étude peuvent déjà être utilisées en pratique courante. « Docteur, quels suppléments ou vitamines me recommandez-vous ? […] Désormais, lorsque mes patients, confrères ou amis m’interrogent, je peux indiquer les résultats de nos recherches », se réjouit-elle.
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