Fin décembre, en plein débat sur la loi immigration, ils étaient déjà 23 associations, sociétés savantes et 7 500 soignants à signer une pétition contre la réforme de l’aide médicale d’État (AME), que le gouvernement a finalement sorti du texte de loi. Quatre mois plus tard, alors que les concertations ont repris et que Gabriel Attal attend un texte réglementaire « d’ici cet été », le mouvement de contestation a pris de l’ampleur. Dans une tribune publiée ce lundi 15 avril dans les colonnes du Monde, une cinquantaine d’organisations de soignants (Lutte contre le Sida, SAMU-Urgences de France, conférence des présidents de CME de centres hospitaliers, Fédération nationale des centres de santé, collège national des généralistes enseignants, etc..) haussent le ton.
« Nous, professionnels de santé, appelons à nouveau à la défense de l'AME contre toute réduction risquant de dégrader son contenu, et par extension le système de soin » écrivent-ils.
Textes réglementaires avant l’été
Après l'abandon d'une proposition sénatoriale qui visait à remplacer l'AME par une « aide d'urgence » restreinte, Matignon a dit travailler sur la base du récent rapport de l'ex-ministre Claude Evin (PS) et de Patrick Stefanini (LR). Ce rapport jugeait l'AME « utile » et « globalement maîtrisée » mais exposée à « l’augmentation récente du nombre de ses bénéficiaires, en conséquence du nombre de personnes en situation irrégulière présentes sur le territoire, et qui mérite d’être adapté. »
Pour les auteurs de la tribune, « les propositions de réduction du champ vont à l'encontre des principes d'universalité du soin, d'humanité et d'indépendance du secteur de la santé », jugent les signataires, « défavorables à toute complexification des démarches administratives » qui aggraverait le « renoncement aux soins ».
« Quand les pathologies chroniques se décompensent, cela se termine aux urgences. Cette réforme va dégrader tout ce qui a été mis en place pour améliorer le système de soin. Quand on parle de flux migratoire, je pense que les personnes étrangères ne viennent pas en France pour l’AME mais pour la qualité des soins. Donc la réforme telle qu’envisagée n’aura pas d’impact par rapport à l’objectif initial de la loi », met en garde la Dr Agnès Ricard-Hibon, porte-parole de SAMU-Urgence de France contactée par le Quotidien.
Pas un facteur d’attractivité
D’après le rapport Evin-Stefanini, les données disponibles nuancent l’idée que l’AME est un facteur d’attractivité pour les candidats à l’immigration, ou un facteur de maintien dans la clandestinité en France. Le dispositif n’est pas le plus généreux d’Europe : plusieurs pays voisins offrent un panier de soins plus large, ou avec moins de restrictions d’accès notamment relatives au plafond de ressources.
En 2019, une enquête menée par l’institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes) alertait sur la détérioration de l’accès à l’AME liée à un cumul d’obstacles administratifs : 64 % des personnes interrogées avaient rencontré des difficultés pour se soigner faute de couverture maladie, et, parmi elles, 7 personnes sur 10 avaient renoncé aux soins.
Pour SAMU-Urgence de France comme pour la Fédération nationale des centres de santé, il n’y a pas de points positifs à cette réduction du périmètre de l’AME.
L’AME permet aux personnes en situation irrégulière et en position de précarité d’accéder aux soins. Depuis sa création en 1999, ce dispositif a fait l’objet de plusieurs réformes, réduisant son accès et sa portée. Le dispositif représente « 0,5 % du budget de l'Assurance-maladie ».
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