Fongicides SDHI : une expertise contestée de l’Anses conclut à l’absence de « préoccupation sanitaire » pour les consommateurs

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Publié le 06/12/2023

Crédit photo : VOISIN/PHANIE

L’exposition des consommateurs à des résidus de fongicides à base de SDHI (inhibiteurs de la succinate déshydrogénase) ne soulève pas de « préoccupation sanitaire », conclut une expertise de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses). Dans deux avis publiés le 5 décembre sur le sujet, les experts de l’Agence indiquent qu’ils vont poursuivre leurs investigations et invitent à ajuster certaines valeurs toxicologiques de référence.

Les SDHI sont utilisés contre les moisissures ou champignons qui se développent sur les céréales ou les fruits, mais aussi pour l’entretien des pelouses. Actuellement, 11 de ces substances SDHI sont approuvées en Europe pour des usages phytopharmaceutiques. En 2018, une tribune de scientifiques (avant une seconde en 2020) s’inquiétait des risques potentiels de ces produits pour la santé humaine, alors que les consommateurs y sont exposés via les aliments. L’année suivante, l’Anses n’avait pas identifié « d'éléments en faveur d'une alerte sanitaire » mais indiquait poursuivre les investigations.

Pas de « risque inacceptable »

Pour cette nouvelle analyse, les experts se sont appuyés sur deux méthodes distinctes d’évaluation, « l’une déterministe, l’autre probabiliste », est-il précisé. Ils en ont conclu « qu’il n’est pas attendu de risque inacceptable pour les consommateurs français ». Les auteurs relèvent qu’il n’y a pas de données épidémiologiques supplémentaires depuis l’expertise collective de l’Inserm « Pesticides et santé » de 2021.

Pour les sous-populations à risque, l’Anses a lancé une étude complémentaire sur l’impact des expositions environnementales sur le risque tumoral chez les sujets à risque de paragangliome héréditaire SDH-déterminé (étude PGL Expo) à l’aide de données épidémiologiques.

Côté méthodologie, le groupe de travail recommande en revanche d’ajuster 11 des 39 valeurs toxicologiques de référence (VTR), « en diminuant modérément leur valeur actuelle d’un facteur de réduction allant de 1,5 à 3,3 ». Ces évolutions sont justifiées par la requalification de niveaux de doses entraînant des effets indésirables, la sélection d’études « jugées plus pertinentes » ou « l’ajout d’un facteur d’incertitude supplémentaire ». Ces recommandations seront portées au niveau européen en vue d’une prise en compte dans les futures évaluations. Les experts encouragent également la recherche sur les modes d’action des SDHI et leurs conséquences sanitaires.

Position divergente de deux experts

L’avis comporte en annexe la position divergente de deux membres du groupe de travail. Leurs critiques portent sur la manière dont l’expertise a été menée. Ils déplorent notamment que les résultats d’une analyse transversale des effets toxiques des SDHI aient été minorés. « Cette analyse, innovante par rapport à l’évaluation réglementaire substance par substance, visait à expliciter les toxicités d’organes communes ou différentes pour tous les SDHI expertisés », expliquent-ils.

L'analyse a révélé « des atteintes nombreuses et partagées entre les SDHI pour le rein, la perturbation endocrinienne, la neurotoxicité, les maladies oculaires, les atteintes des surrénales, cardiaques, du foie, de la thyroïde ». Selon eux, la minimisation de ces résultats « a pour conséquence de réduire le champ de l’expertise collective et de centrer les résultats sur la question purement réglementaire de l’analyse des VTR », alors que l’ambition devrait être « d’avoir une vision élargie de la problématique des SDHI ».

E.B. avec AFP

Source : lequotidiendumedecin.fr