La consommation et les prescriptions d’antibiotiques en médecine de ville (comptant pour 92,8 % de la consommation totale en France en 2022) se sont stabilisées en 2023 (- 0,2 % par rapport à 2022) après deux années d’augmentation consécutives. C’est ce que dévoile le rapport annuel de Santé publique France (SPF), qui surveille depuis 2018 l’évolution de la consommation d’antibiotiques en ville. Pour cela, l’agence se base sur deux indicateurs : le nombre de prescriptions pour 1 000 habitants par an (presc/1 000 hab/an) et la dose définie journalière pour 1 000 habitants et par jour (DDJ/1 000 hab/j).
En 2023, 26,8 millions de patients ont eu au moins une prescription d'antibiotiques au cours de l'année, soit 39,4 % de la population totale. Comparée à celle de 2022, la consommation d’antibiotiques en 2023 est établie à 20,9 DDJ/1 000 hab/j soit une baisse de 3,3 %. Si l’on analyse les prescriptions, à raison de 820,6 presc/1 000 hab/an en 2023, on observe plutôt une tendance à la stabilisation ( -0,2 % par rapport à 2022).
Pour SPF, la diminution de la DDJ malgré la stabilisation des prescriptions pourrait s’expliquer par des durées de prescription plus courtes, une diminution des posologies et/ou l’accroissement des prescriptions destinées aux enfants âgés de 5 à 14 ans.
Variations par classe d’âge et sexe
L’évolution du nombre de prescriptions varie selon les différentes classes d’âge et le sexe : stable chez les 15-64 ans, il augmente chez les 65 ans et plus ainsi que les 5-14 ans, mais baisse chez les petits enfants de 0 à 4 ans. Le nombre de prescriptions et la consommation en DDJ en 2023 sont nettement plus élevés chez les femmes que chez les hommes dans la classe d'âge 15-64 ans (24,2 DDJ/1000hab/j versus 17,7). À l’inverse, pour les 65 ans et plus, la DDJ est plus élevée chez les hommes. Entre 2013 et 2023, la baisse de la consommation en DDJ a été la plus forte chez les enfants de 5 à 14 ans, malgré la très forte reprise en 2022 (+41,8 % par rapport à 2021).
Dans les Ehpad sans pharmacie à usage intérieur, la tendance s’aligne sur celle de la médecine de ville de 2015 à 2020. Toutefois, en 2021, contrairement au secteur ville, la consommation continue de baisser, pour finalement remonter en 2022 et 2023. Cette hausse est caractérisée par une baisse de la consommation en DDJ alors que le nombre de prescriptions progresse modérément. Plus précisément, en 2023, la consommation s'est établie à 39,3 DDJ/1 000 journées d’hébergement (Jheb) en 2023 (-2,9 % par rapport à 2022) et les prescriptions d'antibiotiques ont progressé de +2,0 % soit 4,1 prescriptions/1 000 Jheb.
Les généralistes moteurs de la baisse de prescriptions
Alors que les prescriptions d’antibiotiques des généralistes (74,6 % du total des prescriptions) ont diminué de 1,3 % en 2023 par rapport à 2022, celles des médecins spécialistes (12,6 % du total) et des chirurgiens-dentistes (12,5 %) ont augmenté respectivement de 4,6 % et 1,4 %. Au total, sur l'ensemble de la période 2013-2023, les prescriptions des généralistes ont diminué de 2,6 % par an en moyenne, alors que celles de l'ensemble des prescripteurs n'ont baissé que de 2,0 %.
SPF alerte sur le type d’antibiotiques consommé : les trois substances actives les plus utilisées (amoxicilline, amoxicilline + acide clavulanique et macrolides) représentaient en 2023 plus des deux tiers de la consommation totale (68 %) et les dix premières substances actives 87,5 %. « Ceci doit susciter une attention particulière car ces familles d’antibiotiques sont fortement génératrices de résistances et leur prescription est à restreindre », lit-on dans le rapport. On observe par ailleurs encore une surprescription en période hivernale chez les enfants, alors que les infections sont le plus souvent le fait de virus et ne nécessitent pas d’antibiotiques.
Un niveau similaire à 2019
L’année 2023 a été marquée par la levée des dernières mesures de protection contre le Covid-19. Cette année le nombre de prescriptions est similaire à celui de 2019 (légèrement en deçà). Malgré les variations de la pandémie, la baisse des prescriptions est modérée et constante : -1,4 % entre 2013 et 2019 et -1,5 % entre 2013 et 2023.
L’agence de santé en tire les conclusions suivantes : le Covid-19 n'a pas exercé d'impact durable sur les consommations ; les fluctuations de 2020 à 2022 sont majoritairement liées aux mesures d’endiguement de la pandémie ; le seul résultat de 2023 ne permet pas de préjuger de l’évolution. Il est donc important de maintenir les efforts de réduction de consommation : l’objectif de moins de 650 presc/1 000 hab/an d’ici à 2025, tel que défini par la stratégie nationale de prévention des infections et de l’antibiorésistance, est encore loin d’être atteint. Cela nécessiterait une baisse de 25 % entre 2019 et 2025, soit 21 points de pourcentage de plus qu’aujourd’hui.
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