Prévention de la mort subite du nourrisson : l'Inserm épingle les paquets de couches

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Publié le 23/10/2023

Crédit photo : BURGER / PHANIE

Alors que les images véhiculant des messages de santé implicites ou explicites modifient les pratiques en santé, les paquets de couches en Europe sont loin de porter des visuels conformes aux recommandations de couchage en prévention de la mort subite du nourrisson. Telle est la conclusion sans appel d'une étude Inserm menée dans 11 pays européens.

Un taux très élevé de visuels était non approprié « avec de très nombreuses images représentant des bébés endormis couchés sur le ventre ou le côté, sur une literie molle ou entourés d’accessoires pouvant les étouffer ou encore partageant la surface de couchage avec une autre personne », lit-on dans le communiqué de l'InsermLes résultats de l'étude sont publiés dans The Journal of pediatrics. Ce travail a été mené par les chercheurs de l'Inserm, d'Université Paris Cité et de HEC Paris, en collaboration avec l’AP-HP, le CHU de Nantes et d’autres structures de recherche européennes.

Dans plusieurs pays européens où les taux d’incidence de la mort subite du nourrisson sont élevés, il est noté aussi une fréquence élevée de pratiques parentales de couchage « à risque ». La position de couchage sur le ventre a été identifiée comme le facteur de risque majeur au début des années 1990. Mais d'autres sont en jeu : des surfaces de couchage ou environnantes molles (oreiller, jouet ressemblant à un oreiller, peluche, couette, édredon, peau de mouton, couverture, drap de matelas non ajusté, ou tour de lit) et le partage de la surface de couchage avec une autre personne (parent, frère, sœur…).

Nourrissons de moins de 5 kg

L’implémentation de recommandations, à partir des années 1990, a permis de diminuer de 80 % l’incidence de la mort subite en France, qui se situe aujourd’hui entre 250 et 350 décès par an. Cependant, dans plusieurs pays européens dont la France, les taux d’incidence ne baissent plus ou très faiblement.

Pour ce travail, les scientifiques ont recherché de manière systématique sur internet les emballages de couches pour bébés vendus dans 11 pays européens pour les nourrissons de moins de 5 kg, car ce sont eux les plus à risque de mort subite.

Pour chaque emballage identifié, ils ont extrait les données suivantes : y avait-il une image représentant un bébé, le bébé dormait-il et, le cas échéant, le bébé dormait-il en conformité avec trois des sept recommandations de prévention de mort subite du nourrisson pouvant être facilement évaluées sur des images ?

L’équipe de recherche a ainsi identifié 631 emballages de couches pour bébés de moins de 5 kg. Sur 49 % d’entre eux, une image représentait un bébé endormi. Les analyses indiquent que 79 % des paquets représentant un bébé endormi (soit 39 % de l’ensemble des paquets) étaient non conformes avec au moins une recommandation de prévention de la mort subite.

Un appel adressé aux fabricants

Ainsi, on pouvait observer un bébé endormi en position ventrale ou latérale sur 45 % de ces paquets, avec une literie ou un objet mous (oreiller, jouet ressemblant à un oreiller, peluche, couette, édredon, peau de mouton, couverture, drap de matelas non ajusté, ou tour de lit) sur 51 % d’entre eux, ou partageant la surface de couchage avec une autre personne sur 10 % d’entre eux.

Les chercheurs ont conduit aussi une recherche, cette fois non systématique, sur les sites internet d’agences sanitaires ou de sociétés savantes et ont, là encore, trouvé des images non conformes.

Pour le Pr Martin Chalumeau, dernier auteur de l’étude, épidémiologiste à l’Inserm, professeur à Université Paris Cité et pédiatre à l’AP-HP : « Nos résultats soulignent qu’il y a un décalage entre les messages qui sont véhiculés sur ces produits du quotidien ou des sites institutionnels, auxquels de nombreux parents sont fortement exposés, et les recommandations pour la prévention de la mort subite. Ces résultats suggèrent la nécessité d’actions de la part des fabricants et des législateurs pour empêcher cette exposition à des images commerciales ou officielles non conformes aux recommandations de prévention de la mort subite du nourrisson afin de prévenir des pratiques de couchage dangereuses ».

Les sept recommandations de l’American Academy of Pediatrics
(1) coucher bébé sur le dos, (2) sur une surface ferme dans (3) un lit sécurisé (lit à barreaux, berceau, lit parapluie, parc), (4) dans la chambre des parents, (5) sans objets ou accessoires de literie mous sur, sous, à côté de bébé (oreiller, jouet ressemblant à un oreiller, peluche, couette, édredon, peau de mouton, couverture, drap de matelas non ajusté, ou tour de lit), (6) sans partager la surface de couchage avec une autre personne, et (7) en utilisant une tétine.

Dr I.D.

Source : lequotidiendumedecin.fr