Alors que la HAS s’est récemment prononcée en faveur du remboursement du baclofène dans la prise en charge de l’alcoolo-dépendance, le conseil scientifique du Collège National des Généraliste Enseignants (CNGE) vient d’émettre un avis soulignant le manque de preuves solides supportant cette utilisation.
Des données d‘efficacité peu probantes
Le CNGE a estimé qu'en termes d’efficacité, la méta-analyse Cochrane, publiée en 2018, (et intégrant notamment l’étude Alpadir) « ne permettait pas d’établir les preuves de l’efficacité du baclofène pour maintenir l’abstinence et/ou réduire la consommation d’alcool ».
Très attendue, la publication récente de l’étude Bacloville n’a pas été jugée plus concluante. Pour le Collège, les résultats sont « difficilement interprétables en raison du grand nombre de données manquantes sur le critère de jugement principal et d’une possible surestimation de la différence entre les groupes liée à une probable levée de l’insu (possibilité pour les patients de recevoir du baclofène en ouvert en cours d’essai) ». Au total, ce médicament « n’a donc pas prouvé son efficacité de façon convaincante ».
La tolérance en question
Côté sécurité d’emploi, l’analyse des données issues de la RTU a montré qu’au-delà de 180 mg par jour, la fréquence relative des hospitalisations était augmentée de 46 % et le risque de décès était multiplié par 2,3. Or dans l’étude Bacloville la posologie médiane après titration était justement de 180 mg par jour.
Ce profil de tolérance « obère la balance bénéfice/risque du baclofène », estime le CNGE qui appelle « les généralistes qui prescriraient du baclofène » à la prudence.
Ainsi, « les effets indésirables psychiatriques doivent être particulièrement recherchés » ; « la titration progressive du baclofène doit correspondre à la tolérance individuelle » et « le suivi médical doit être régulier ». Enfin, en l’absence d’efficacité à 3 mois « un sevrage progressif doit être planifié et d’autres stratégies thérapeutiques envisagées ».
Une AMM très discutée
Les doutes pesant sur le baclofène ne sont pas nouveaux. Le manque de données convaincantes avait déjà été pointé du doigt lorsque l’ANSM avait accordé son AMM au Baclocur, au terme d'une procédure longue, atypique, et parfois controversée. À l’époque ce sont surtout les avis de médecins prescrivant du baclofène et d'associations de patients qui avaient pesé dans la balance. Selon cette AMM, le baclofène est indiqué pour la réduction de la consommation d’alcool, après échec des autres traitements médicamenteux disponibles, chez l’adulte ayant un trouble de l’usage de l’alcool et une consommation à risque élevé (> 6 verres par jour chez les hommes et 4 chez les femmes). La dose journalière maximale est de 80 mg par jour.
La position de la commission de transparence de la HAS reflète la même incertitude. Tout en se prononçant en faveur du remboursement du Baclocur, l’institution a en effet considéré que le service médical rendu du Baclocur était faible et conclu à l’absence d’amélioration du service médical rendu.
Cancer colorectal chez les plus de 70 ans : quels bénéfices à une prise en charge gériatrique en périopératoire ?
Un traitement court de 6 ou 9 mois efficace contre la tuberculose multirésistante
Regret post-vasectomie : la vasovasostomie, une alternative à l’AMP
Vers un plan Maladies rénales ? Le think tank UC2m met en avant le dépistage précoce