Violences obstétricales : « Les propos de Marlène Schiappa ont été inacceptables ! », selon le Pr Bernard Hédon

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Publié le 18/12/2017
Hédon

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Crédit photo : DR

Cet été, les gynécologues ont été particulièrement « attaqués » par des paroles agressives, jusqu’à qualifier certaines de leurs pratiques de « violences obstétricales ». Au congrès du Collège national des gynécologues obstétriciens français (CNGOF/5-8 décembre), le sujet est revenu sur la table à l’occasion de deux sessions : l’une sur la relation médecin-patient, une autre sur « La bientraitance dans les maternités : comment nous améliorer ? ».

Le Pr Bernard Hédon past président du CNGOF est revenu sur ces attaques exprimées sur les réseaux sociaux et médias. Elles ont été perçues par les gynécos de manière différente, et jugées intolérables quand elles s’appuient sur des chiffres erronés, et qu’elles proviennent d’un membre du gouvernement.

Comment le Collège national des gynécologues obstétriciens a-t-il vécu ces attaques répétées ?

Pr Bernard Hédon : Elles furent d’origines différentes. Nous avons surtout été particulièrement choqués par les propos de Marlène Schiappa, secrétaire d’État chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes qui le 20 juillet déclarait avoir demandé un rapport au Conseil à l’égalité sur les violences obstétricales, s’appuyant sur un taux de 75 % d’épisiotomies au niveau national. Marlène Schiappa parlait de « pratiques obstétricales non consenties, particulièrement sur des femmes étrangères, très jeunes ou handicapées ». C’est une attaque inique, injustifiée, et traumatisante pour nous gynécologues. Avec en plus une information chiffrée totalement fausse concernant les épisiotomies. La secrétaire d’État ne s’est pas excusée, n’a pas répondu à nos courriers. Cette parole provenant d’un membre du gouvernement est inacceptable !

À côté de cette déclaration, des femmes ont émis des propos parfois violents à l’encontre de certaines pratiques…

Pr B. H. : Via les réseaux sociaux, des femmes se sont exprimées. Il est important d’entendre les paroles de ces femmes et de les analyser. On sait que cela regroupe une minorité de patientes et que cela n’est pas le reflet de l’exercice quotidien. Cependant il peut s’agir de témoignages de femmes correspondant à d’éventuelles pratiques qui ne peuvent être tolérées. Il existe sur notre territoire près de 8 000 gynécologues obstétriciens, environ 20 000 sages-femmes. Et il est difficile de connaître de façon concrète l’exercice de chaque soignant. À cela nous répondons de manière professionnelle, en rappelant les bonnes pratiques. Nous menons aussi une réflexion sur notre exercice médical pour tâcher de corriger ce qui doit l’être. Ainsi, l’information donnée aux femmes mérite sans doute d’être plus élaborée. Notre collège prend des initiatives pour mieux informer les femmes et leur santé, et pour mieux interagir avec celles-ci. Par exemple : nous publions un livre sur la grossesse destiné au grand public remis à jour chaque année, nous allons mettre en place un label CNGOF pour les maternités, validant certains critères de qualité dans la pratique obstétricale, avec aussi une application pour smartphone destinée aux femmes et qui sera interactive… Nous avons la volonté de faire évoluer nos pratiques, comme nous l’avons d’ailleurs toujours fait. Mais nous sommes persuadés que si l’on effectuait un sondage dans la vie réelle, plus des 90 % des patientes auraient des avis favorables de leur médecin gynécologue… un taux d’opinion positif que les politiques sont loin d’atteindre !

Vous refusez le terme de violence obstétricale parfois formulé contre les soignants…

Pr B. H. : On refuse en effet ce terme. Il faut replacer notre pratique médicale dans la réalité, et ne pas tout confondre ! Ce sont certains aléas liés à une grossesse ou à un accouchement compliqué qui peuvent être violents et traumatisants pour une femme. Sauver un enfant ou une mère peut nécessiter des démarches ou des gestes pris en urgence, comme pratiquer une césarienne. Notre profession a pour objectif de proposer des solutions à ces éventuels problèmes qui eux peuvent être particulièrement dangereux et violents ! 


Source : lequotidiendumedecin.fr