Les députés espagnols votent une loi légalisant l'euthanasie et le suicide médicalement assisté

Par
Publié le 18/12/2020

Crédit photo : AFP

L'Espagne pourrait être très prochainement le sixième pays au monde à légaliser l'euthanasie, après les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg, le Canada et la Nouvelle-Zélande.

Ce 17 décembre, les députés ont approuvé à une majorité confortable (198 pour, 138 contre) la proposition de loi de régulation de l'euthanasie, présentée en février dernier par le gouvernement socialiste. Après son passage au Sénat au janvier, où elle ne devrait subir aucune modification, la loi, qui consacre « la reconnaissance d'un droit à mourir », devra être validée une nouvelle fois au Congrès des députés, pour entrer en vigueur dès le premier semestre de 2021.

Le Chef du gouvernement Pedro Sanchez, qui a réussi à rallier les partis de gauche, le parti libéral Ciudadanos et les partis indépendantistes catalan et basque, a salué « une conquête sociale », tandis que les opposants à la loi - le Parti populaire de droite et le parti d’extrême droite Vox - ont dénoncé une loi injuste, voire « eugéniste », selon le second. La conférence épiscopale espagnole et le Comité espagnol de bioéthique s'y sont aussi opposés, pour ce dernier au nom de la protection de la vie.

Un droit à l'objection de conscience pour les médecins

La loi est « extrêmement protectrice », défend le parti socialiste. Seules y auront accès les personnes majeures, victimes d’une « souffrance grave, chronique et invalidante ou d’une maladie grave et incurable » certifiée par un médecin. Elles devront en faire la demande alors qu’elles disposent de toutes leurs facultés pour décider en « conscience » et attester de leur connaissance des alternatives existantes pour apaiser leur douleur. Cette demande doit être validée par deux médecins différents, dont un spécialiste.

Les requérants devront réaffirmer leur décision à quatre reprises durant le processus qui devrait prendre au moins un mois. La procédure prévoit en effet un temps de réflexion de dix jours et l’avis d’une commission d’évaluation indépendante (une par région autonome), formée de médecins et de juristes.

En cas d’incapacité physique à formuler le désir d’abréger sa vie, un « représentant légal » pourra en faire la demande à la place du malade, si celui-ci a rédigé en amont un testament vital prévoyant cette hypothèse.

La loi prévoit deux modalités, l'euthanasie et le suicide médicalement assisté : dans le premier cas, le médecin administre les médicaments qui provoquent le décès, dans le second, le corps médical délivre le produit, mais le patient l'ingère seul. L'acte peut être réalisé dans un hôpital public, privé ou à domicile.

Des professionnels divisés

Les médecins pourront faire objection de conscience. Le corps soignant semble divisé sur cette loi : si le Conseil général des collèges officiels de médecins s’est prononcé contre, plusieurs enquêtes d’opinion témoignent du soutien des professionnels de santé à cette loi.

En France, l'Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD) a salué le vote espagnol. « Je suis très triste de constater que, sur ce sujet encore, la France, pays laïque, est sous le joug du pouvoir spirituel des Églises, et sous le joug du pouvoir temporel de certains médecins qui refusent d’abdiquer leur omnipotence et de reconnaître la démocratie sanitaire », a commenté le président de l’ADMD, Jean-Luc Romero-Michel.


Source : lequotidiendumedecin.fr