Les crises financières peuvent parfois offrir des opportunités de rachat par la baisse de la valorisation boursière de l’entreprise visée qu’elles induisent. C’est ainsi que le numéro un mondial de la pharmacie, l’américain Pfizer, vient de s’offrir son compatriote Wyeth (numéro 10 mondial du secteur) pour la somme de 68 milliards de dollars (52,3 milliards d’euros). Un rachat amical qui a cependant contraint le géant américain à emprunter auprès d’un consortium bancaire la somme de 22,6 milliards de dollars (17,4 milliards d’euros).
L’objectif de Pfizer est simple : le numéro un mondial de la pharmacie est confronté à la prochaine tombée dans le domaine public de son médicament vedette, le Tahor (vendu aux USA sous le nom de Lipitor). Cet anticholestérol, numéro un des ventes, génère en effet à lui tout seul 12 milliards de dollars de chiffre d’affaire (9,2 milliards d’euros), soit un quart de ses ventes. Or, le Tahor sera généricable dès 2011 et Pfizer peine à lui trouver un successeur aussi rémunérateur. Le rachat de Wyeth (18 milliards d’euros de CA) permettra à Pfizer de ramener la baisse de son chiffre d’affaire induite par la perte du Tahor à 10 % de son CA global. Car Wyeth dispose dans son portefeuille de médicaments du vaccin le plus vendu au monde, le Prevenar (contre le pneumocoque) qui représente un chiffre d’affaire annuel de 1,9 milliard d’euros, et de produits issus de la biotechnologie comme l’Enbrel (contre la polyarthrite rhumatoïde) qui génère pour sa part un chiffre d’affaire annuel de 2,3 milliards d’euros. De quoi relativiser quelque peu les effets de la perte du brevet du Tahor. La nouvelle entité issue de ce rachat devrait représenter un chiffre d’affaire annuel combiné d’environ 55 milliards d’euros. Pour Jeff Kindler PDG de Pfizer, ce rachat va permettre la création « d’une des entreprises les plus diversifiées de l’industrie de la santé ».
Selon bon nombre d’analystes, Pfizer n’avait pas beaucoup d’autre choix que de procéder à cette « méga fusion ». Le numéro un mondial a en effet abandonné en novembre dernier le développement d’un traitement de l’obésité qui était parvenu en phase finale d’expérimentation, et vient de publier des chiffres peu encourageants pour le quatrième trimestre 2008 : résultat net en chute libre de 90 %, chiffre d’affaire en baisse de 4 % (sous le coup de la perte de plusieurs brevets dont l’antiallergique Zyrtec), les perspectives n’étaient guère fameuses pour le géant américain qui a jugé qu’une greffe constituait encore la meilleure thérapie.
Cette fusion aura néanmoins quelques effets indésirables : la direction monde de Pfizer a en effet annoncé qu’elle s’accompagnerait d’un plan d’économies qui comprendra la suppression de 19 000 postes au niveau mondial et la fermeture de 5 sites de production, le tout devant permettre de réaliser 2 milliards d’euros d’économies annuelles.
Opportunités de rachat
Plus généralement, la crise financière pourrait avoir pour conséquence de relancer la tendance aux fusions acquisitions observée dans le monde de la pharmacie ces dernières années (voir tableau ci-contre). L’économiste de la Santé Claude Le Pen (qui juge par ailleurs que Pfizer et Wyeth ont une certaine complémentarité, l’un dans le médicament chimique, l’autre dans les biotechnologies) n’est pas loin de partager ce point de vue. Pour lui, « la crise financière peut offrir des opportunités de rachat aux laboratoires pharmaceutiques ». Ceux-ci disposent en effet de beaucoup de cash pour financer ces opérations, ce qui les dispense de s’endetter outre mesure pour y procéder. A titre d’exemple, Pfizer a été en mesure de mettre sur la table plus de 17 milliards d’euros en cash pour procéder au rachat de Wyeth, le reste devant être payé pour moitié en actions et pour moitié grâce au prêt du consortium bancaire. De plus, la valorisation boursière des candidats au rachat ayant considérablement diminué, certaines opérations qui auraient semblé impossibles à réaliser voici quelques mois sont aujourd’hui à portée de main. Pour Claude Le Pen, « le triple effet de cette baisse boursière, de la capacité des big pharmas à disposer de cash, et de la nécessité qui est la leur de procéder à des alliances défensives, peut ouvrir des fenêtres à de nouvelles fusions ». Selon lui d’ailleurs, les big pharmas n’ont pas trop le choix : « les grands marchés de médicaments généralistes dévissent et les règles
d’enregistrement des nouvelles molécules se durcissent. Le business-model qui prévalait jusqu’à présent n’est plus reproductible et les grands labos sont obligés d’avancer à coup
d’acquisitions ».
Dans les milieux financiers, on murmure d’ailleurs que plusieurs laboratoires, et non des moindres, pourraient annoncer dans les prochains mois de semblables opérations.
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