Mélanomes métastatiques

Favoriser un accès plus équitable aux traitements

Publié le 10/12/2015
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L’impossibilité d’utiliser les anti-PD1 en première ligne chez les patients BRAF mutés crée une...

L’impossibilité d’utiliser les anti-PD1 en première ligne chez les patients BRAF mutés crée une...
Crédit photo : PHANIE

L’évolution métastatique du mélanome, considérée avant 2011 comme très grave et sans prise thérapeutique, trouve de nouveaux espoirs grâce aux thérapies ciblées et à l’immunologie. Le mode d’action des thérapies ciblées se caractérise par le blocage d’une voie métabolique (les MAP kinases) sur une molécule (appelée BRAF) mutée dans près de 50 % des mélanomes. Un patient sur deux est, ainsi, porteur de la mutation de BRAF (appelée V600E) dans sa tumeur et peut donc faire l’objet d’une thérapie ciblée anti-BRAF. « Les thérapies ciblées sont très souvent et très rapidement efficaces chez les patients porteurs de la mutation V600E, mais, dans la grande majorité des cas, ils ne sont pas efficaces sur la durée », souligne Luc Thomas, dermato-oncolologue, chef de service (service de dermatologie du centre hospitalier Lyon-Sud).

Concernant l’immunothérapie, les progrès thérapeutiques se sont opérés en deux étapes. La première étant celle de l’arrivée des inhibiteurs du CTLA-4 (un récepteur freinant la défense immunitaire). « Ce traitement était efficace pour un patient sur 6 seulement (16,6 %). Néanmoins, quand il était efficace, il donnait des résultats très intéressants sur la durée (contrairement aux thérapies ciblées dont la durée d’efficacité est plus courte) », explique le Pr Luc Thomas.

Rétablir l’injustice pour les patients BRAF mutés

Deuxième étape pour l’immunothérapie : les inhibiteurs des PD1 qui remplacent, désormais, les inhibiteurs du CTLA-4. « Le taux de réponse des inhibiteurs des PD1 est bien plus élevé : 60 % des patients répondent au traitement (contre 16,6 % pour les inhibiteurs du CTLA-4). Ces résultats étant également très intéressants sur la durée. Ainsi, aujourd’hui, pour un patient lentement évolutif, la thérapie la plus favorable est l’immunothérapie (anti-PD1) car même si son délai d’action est un peu plus important, elle est efficace plus longtemps que les thérapies ciblées, chez patients répondeurs. À l’inverse, pour un patient porteur de la mutation V600E de BRAF présentant un mélanome d’évolution rapide, les thérapies ciblées sont bien indiquées et plus favorables », précise le Pr Thomas.

Après la fin des essais cliniques, les anti-PD1 utilisés alors dans le cadre d’ATU pouvaient être administrés chez les patients quel que soit leur statut BRAF. Ce traitement était donc utilisé en fonction du mode évolutif (lent ou rapide) du mélanome et non, en fonction du génotype. « Désormais, depuis la mise sur le marché des anti-PD1, on ne peut plus proposer ces traitements en première ligne aux patients qui ont une mutation V600E de BRAF, même si leur mélanome est d’évolution lente. Or du point de vue de la communauté scientifique, ce choix des autorités sanitaires est mauvais. En effet, les patients évoluant lentement qui ont la mutation V600E vont devoir recevoir un anti-BRAF en première ligne alors que nous aurions préféré utiliser d’abord l’immunothérapie et garder les anti-BRAF éventuellement, pour plus tard, dans le cas où l’évolution de la maladie devient plus rapide et plus agressive. Aujourd’hui, cette impossibilité d’utiliser les anti-PD1 en première ligne chez les patients BRAF mutés crée une véritable injustice », conclut le Pr Thomas.

Hélia Hakimi-Prévot

Source : Le Quotidien du Médecin: 9457