« Je me fais matraquer par la caisse » : dans le Cantal, un pharmacien en grève de la faim pour dénoncer les ravages du désert médical

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Publié le 31/01/2022
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Crédit photo : S.Toubon

Fabrice Mathieu, pharmacien titulaire depuis 23 ans à Neuvéglise-sur-Truyère, dans le Cantal, est en grève de la faim depuis mardi 25 janvier. Il proteste contre les pratiques « lamentables » de sa caisse primaire l'assurance-maladie (Cpam) en matière de contrôle des ordonnances sur ce territoire où le manque de médecins est criant.

Patients en détresse respiratoire

Dans un département où il faut attendre « quatre à six mois » pour avoir un rendez-vous avec un pneumologue ou « plus d'un an » pour voir un cardiologue, le pharmacien se retrouve contraint de délivrer des produits de santé sans nouvelle ordonnance, ce qui n'est normalement pas autorisé.

Il cite le cas de patients âgés « sous oxygène de façon chronique ou qui font de l'apnée du sommeil »« Ils ont leur ordonnance de mise en place du traitement, mais souvent, les délais de rendez-vous sont tellement longs qu'ils n'ont pas leur renouvellement à temps, explique Fabrice Mathieu. Dans ce cas, deux possibilités, soit je demande au médecin traitant un renouvellement, mais je le mets en porte-à-faux, soit je prends la responsabilité de ne pas désappareiller le patient, et je reprends l'ancienne ordonnance. »

« Ubuesque »

En faisant cela, le pharmacien n'est pas « dans les clous administrativement ». « Je ne me vois pas refuser aux patients leur oxygène ou leur matelas anti-escarres, pointe l'officinal. Mais je constate que l'administratif prend le pas sur la santé, puisqu'à chaque fois je me fais matraquer par la caisse qui me demande de rembourser le matériel délivré. » La Cpam et la Mutualité sociale agricole (MSA) lui réclameraient ainsi plusieurs dizaines de milliers d'euros.

Une situation « ubuesque » pour Fabrice Mathieu. « D'un côté, on fait évoluer le métier de pharmacien de façon fulgurante, avec la vaccination antigrippe, contre le Covid, les tests rapides d'orientation diagnostique (Trod) angine et de l'autre, on se fait assommer par la caisse pour une simple ordonnance. J'ai l'impression de lever le doigt pour avoir la permission de sauter une ligne », se désole le pharmacien.

Il se dit prêt à cesser son action si la caisse primaire lui propose une rencontre pour lui permettre de s'expliquer.


Source : lequotidiendumedecin.fr