Un coût maximal remboursé de 10 000 euros par patient et par an ?

Le gouvernement veut plafonner le prix des médicaments sous ATU

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Publié le 28/11/2016
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Crédit photo : PHANIE

Il s'agit d'une nouvelle offensive pour réguler le prix des médicaments innovants.

Le gouvernement a déposé un amendement au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2017, qui prévoit de fixer un coût maximal de 10 000 euros par patient et par an pour les traitements qui bénéficient d'une ou plusieurs autorisations temporaires d'utilisation (ATU), et dont le chiffre d'affaires annuel est supérieur à 30 millions d'euros pour les produits concernés.  

Lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale, en première lecture, la ministre de la Santé a rappelé l'attachement du gouvernement aux ATU mises en place en 1994. « La France dispose avec ce mécanisme d’un système unique en Europe qui permet l’accès très précoce des patients à des médicaments qui ne bénéficient pas encore d’une autorisation de mise sur le marché », a-t-elle rappelé. Pour autant, devant le « grand succès » des ATU – et plus particulièrement des ATU de cohorte (22 en 2015 ayant bénéficié à plus de 10 000 patients, en complément des 25 000 ATU nominatives) – Marisol Touraine a insisté sur la nécessité de limiter leur impact financier (plusieurs centaines de millions en 2014). 

10 % des produits concernés

Le plafonnement envisagé ne s’appliquerait donc que pour les produits dont le chiffre d’affaires est supérieur à 30 millions d’euros afin de ne pas pénaliser les laboratoires qui commercialisent des traitements contre les maladies rares ou orphelines. Selon le gouvernement, moins de 10 % des produits sous ATU en 2015 auraient été concernés par ce plafonnement. 

« À l’issue de la négociation tarifaire conventionnelle entre le Comité économique des produits de santé (CEPS) et le laboratoire, les prix nets s’appliqueront rétroactivement, a précisé la ministre de la Santé. Concrètement, si à l’arrivée le prix est supérieur à 10 000 euros par patient, le différentiel sera évidemment reversé au laboratoire. » « Ce dispositif est totalement neutre pour le patient, qui n’aura aucun reste à charge, quel que soit le coût de son traitement », a plaidé Marisol Touraine devant les députés.

Accord raisonnable

Les industriels restent circonspects sur l'incidence de cette mesure sur leur activité. « L'impact est très difficile à mesurer, nous jugerons ce dispositif à l'épreuve des faits mais attention à ce que le remède ne soit pas pire que le mal », prévient-on au LEEM, syndicat patronal de l'industrie pharmaceutique. Même s'il est en apparence dissuasif, ce mécanisme ne devrait pas empêcher les laboratoires d'aller sur le marché en ATU, ajoute-t-on. Adoptée en première lecture à l'Assemblée, cette réforme a été supprimée lors de l'examen du PLFSS au Sénat, mais sera réintroduite cette semaine par les députés… 

Les patients, de leur côté, applaudissent cette régulation. « Il est important que pendant la période de l'ATU,les laboratoires ne puissent pas imposer des prix très élevés, ce qui ne les incitent pas à la conclusion rapide d'un accord raisonnable sur le prix final », affirme le Collectif interassociatif sur la santé (CISS, usagers).

Ce plafonnement des coûts pourrait surtout inciter les industriels et le CEPS à une conclusion plus rapide de la fixation du prix définitif. « La tare du système français est son incapacité à fixer des prix dans les délais de 180 jours prévus par les directives européennes, relève un expert du dossier. La France excède les 400 jours. »

Christophe Gattuso

Source : Le Quotidien du médecin: 9538