Pluie d'hommages après le décès du Pr Bernard Debré, qui n'hésitait pas à bousculer sa profession

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Publié le 14/09/2020

Crédit photo : S.Toubon

Il aimait bousculer les codes, en politique comme en médecine : l'ancien ministre et ex-député de droite Bernard Debré est décédé à l'âge de 75 ans, des suites d'un cancer. 

Urologue réputé, Bernard Debré appartenait à l'une des illustres familles du gaullisme et de la Ve République. Il est le fils de Michel – rédacteur de la Constitution de 1958 puis premier Premier ministre du général de Gaulle – et le frère jumeau de Jean-Louis, également ancien ministre et ex-président UMP (devenu LR) de l'Assemblée nationale et du Conseil constitutionnel. 

Sa mort a suscité immédiatement une avalanche d'hommages, émanant notamment de médecins qui l'avaient fréquenté et appréciaient sa liberté de ton et d'esprit.

Pour Macron, un homme d'action, pour Castex, un humaniste   

Le président Emmanuel Macron a salué un héritier du gaullisme, qui « n'hésitait jamais à sortir des cadres et à dire le vrai dès qu'il s'agissait de l'intérêt du pays »: « de l'hôpital à la politique, Bernard Debré fut toute sa vie un homme d'action ».

« Professeur et élu de la Nation, c'est avec la même énergie que Bernard Debré soignait les maux de ses patients et ceux de ses concitoyens. Cet humanisme qu'il puisait dans ses racines gaullistes ne le quittera jamais », a souligné le Premier ministre Jean Castex (ex-LR).

De nombreux dirigeants à droite ont souligné son franc-parler. « C'était un homme droit qui n'avait pas la langue dans sa poche, un grand médecin, un gaulliste », a twitté le député du Vaucluse Julien Aubert (LR), le député LR Eric Ciotti saluant un « homme politique passionné et entier, un grand médecin reconnu de tous à travers le monde. »

Bernard Debré fut à partir de 1986 député d'Indre-et-Loire, département dont il a été conseiller général (RPR, devenu UMP puis LR) de 1992 à 1994. Il a été également ministre de la Coopération dans le gouvernement d'Édouard Balladur (1994/1995) et maire d'Amboise de 1992 à 2001 et député de Paris.

Chirurgien, auteur et franc-tireur

Mais Bernard Debré était aussi un grand nom de la médecine : professeur d'université, il fut chef du service d'urologie de l'hôpital Cochin, à Paris, où fut notamment soigné le président François Mitterrand.

Ce chirurgien reconnu était l'auteur de nombreux ouvrages, notamment de réflexion sur l'éthique médicale : « La France malade de sa santé » (1983) ; « Le Voleur de la vie, la bataille du Sida »(1989); « Avertissement aux malades, aux médecins et aux élus » (2002) ; « Nous t'avons tant aimé. L'Euthanasie, l'impossible loi » (2004).

Dans ses textes ou prises de position, il n'hésitait pas à bousculer sa profession. En 2015, il avait reçu avec son coauteur Philippe Even un blâme de l'Ordre des médecins après la sortie de leur très controversé « Guide des 4 000 médicaments utiles, inutiles ou dangereux ».

Les deux hommes s'étaient ensuite attiré les foudres des psychiatres en 2018 pour un livre très critique sur les antidépresseurs, présentés comme le « marché du siècle » (« Dépressions, antidépresseurs, psychotropes et drogues »), et affirmant contre l'avis de nombreux spécialistes que 80 % des dépressions sont « élevées de façon délibérée au rang de maladies ».

Haro sur les 35 heures

Le Pr Bernard Debré s’était déclaré favorable en 2015 à une réforme drastique du temps de travail à l’hôpital. « Bien entendu, il faut supprimer les 35 heures, confiait-il sur Sud Radio. L’hôpital est en train de mourir ». Il proposait d’aller loin dans la réorganisation de la carte hospitalière, estimant qu’il faudrait réduire « entre 10 et 15 % » des établissements. 

Sur la scène politique, il goûtait aussi aux prises de position tranchées, y compris lors des guerres internes au sein de la droite. Ce soutien de François Fillon avait plaidé pour que Nicolas Sarkozy ne soit pas candidat à la présidentielle de 2017.

Chevalier de la Légion d'honneur, il était marié et père de quatre enfants.

C.D. (avec AFP)

Source : lequotidiendumedecin.fr