HTA résistante

Intérêt du blocage du récepteur minéralocorticoïde

Publié le 14/04/2016
p10

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Crédit photo : PHANIE

Alors que sa prévalence est de 5 % de la population générale, l’Hypertension artérielle résistante (HTAR), définie par une pression artérielle (PA) ≥ 140 et/ou 90 mmHg malgré une trithérapie dont un diurétique n’a pas de solutions thérapeutiques satisfaisantes. Les patients ayant une HTAR sont en situation d’échec thérapeutique et à haut risque cardiorénal et cérébrovasculaire, complications à l’origine de coûts majeurs (1).

La trithérapie de base comporte un bloqueur du système rénine angiotensine (inhibiteur de l’enzyme de conversion ou des récepteurs de l’angiotensine), un inhibiteur calcique et un diurétique thiazidique administrés à dose optimale ou maximale tolérée. Les recommandations européennes préconisent la prise en charge par un centre spécialisé, un renforcement de l’intensité des traitements (notamment diurétiques mais sans que ses modalités aient jamais été standardisées, avec en premier lieu l’ajout d’un antagoniste des récepteurs minéralocorticoïdes tels que la spironolactone, voire de béta-bloquants, d’alpha-bloquants, d’antihypertenseurs centraux…), l’utilisation des combinaisons d’antihypertenseurs en un seul comprimé et un suivi renforcé en particulier par l’automesure tensionnelle (2). En pratique, le choix de l’antihypertenseur de 4e ligne (spironolactone selon les recommandations françaises [3]) reposait jusqu’à récemment sur un faible niveau de preuve.

Dans ce contexte, les résultats de l’essai randomisé en double–aveugle contrôlé avec placebo, Pathway 2 confortent l’utilisation de la spironolactone comme traitement antihypertenseur de choix en 4e ligne, en l’absence de contre-indication et sous stricte surveillance biologique (4). Pathway 2 a inclus 335 patients ayant une HTAR essentielle, sous triple thérapeutique antihypertensive (un inhibiteur de l’enzyme de conversion, un inhibiteur calcique, et un diurétique), un débit de filtration glomérulaire estimé de plus de 45 ml/min, et une concentration plasmatique de potassium dans les limites de la normale. Williams et al. ont montré que 12 semaines de traitement  en add-on avec spironolactone 25–50 mg/j était la thérapeutique de 4e ligne la plus efficace, par comparaison à un placebo, au bisoprolol (5–10 mg/j) et la doxazosine (4–8 mg/j) [essai en cross-over]. Plus précisément, la réduction moyenne des pressions artérielles systoliques en automesures était supérieure sous spironolactone vs. placebo était de (–8,70 mm Hg [IC 95 % (–9,72;–7,69); p<0·0001), supérieure à celle obtenue versus doxazosine (–4,03 [–5,04 to –3,02]; p<0·0001) et versus bisoprolol (–4,48 [–5,50 to –3,46]; p<0,0001).

 

Filtration glomérulaire > 45 ml/mn

 

Ces résultats probants démontrent que désormais la spironolactone doit être l’antihypertenseur de choix en 4e ligne en l’absence de contre-indication, et sous surveillance étroite de la fonction rénale et de la kaliémie, chez des patients de profil comparable à ceux inclus dans Pathway 2. En effet ces résultats ne s’appliquent en particulier qu’à des patients avec un débit de filtration glomérulaire > 45 ml/min (de fait le débit de filtration glomérulaire estimé des patients inclus était de 91,1 (+/- 26,8 ml/min et kaliémie normale (kaliémie moyenne à l’inclusion 4,1 mmol/l). Par ailleurs, force est de constater que si 58 % des patients ont atteint la cible tensionnelle (moins de 135 mm Hg de pression artérielle systolique en automesures tensionnelles) sous spironolactone, ce qui représente une avancée majeure, 42 % demeurent résistants à la quadrithérapie.

Dans ce contexte, l’essai multicentrique contrôlé randomisé français ESTIM-rHTN financé par le Programme de recherche médico-économique du ministère de la Santé,  et promu par le CHRU de Nancy,   vise actuellement à réaliser une analyse coût-efficacité de la barostimulation carotidienne avec le dispositif Neo TM  chez 128 patients avec hypertension résistante à une quadrithérapie dont la spironolactone (ou une trithérapie en cas d’intolérance à la spironolactone) et un débit de filtration glomérulaire supérieur ou égal à 30/ml/min/1,73m2 (NCT02364310).

Inserm, Centre d’investigations cliniques- plurithématique 14-33, Inserm U1116, CHRU  Nancy,  université de Lorraine Nancy, Association lorraine de traitement de l’insuffisance rénale (ALTIR), F-CRIN INI-CRCT (Cardiovascular and Renal Clinical Trialists), Nancy

(1)Rossignol P et al. Lancet 2015;386(10003):1588-98

(2)Mancia G et al. J Hypertens 2013;31(7):1281-357

(3)Denolle T et al. J Hum Hypertens 2016 Jan 28. doi: 10.1038/jhh.2015.122

(4)Williams B et al. Lancet 2015;386(10008):2059-68

Pr Patrick Rossignol

Source : Bilan Spécialiste