Trois scientifiques – deux Américains et un Britannique – ont reçu ce 7 octobre le prix Nobel de physiologie ou médecine « pour leurs découvertes sur la façon dont les cellules détectent et s'adaptent à la disponibilité en oxygène ». La manière dont les cellules répondent à une diminution en oxygène (hypoxie) est un processus essentiel à la survie des hommes et de la plupart des animaux, resté longtemps méconnu.
« Ce prix Nobel est la reconnaissance méritée d'un travail essentiel qui a mis le doigt sur un phénomène majeur en biologie », en atteste Carole Peyssonnaux, directrice de recherche INSERM à l'Institut Cochin (CNRS/INSERM/Université Paris Descartes), interrogée par « le Quotidien ».
Rôle des protéines HIF et VHL
De par leurs travaux respectifs commencés dans les années 1990, William Kaelin Jr (Dana-Farber Cancer Institute, Boston), Gregg Semenza (Johns Hopkins University, Baltimore) et Peter Ratcliffe (Oxford University, Francis Crick Institute, Londres) ont percé le mystère de l'adaptation aux variations en oxygène de l'organisme en identifiant les mécanismes moléculaires sous-jacents.
Alors qu'ils étudiaient la régulation du gène de l'érythropoïétine (EPO), ils ont mis en évidence le rôle des facteurs HIF (facteurs induits par l'hypoxie). « En altitude par exemple, l'organisme s'adapte au manque d'oxygène en augmentant son taux d’EPO pour produire des nouveaux globules rouges et transporter l’oxygène. Ce sont ces facteurs HIF qui permettent d'augmenter l’expression de l’EPO », explique la chercheuse. Le rôle de VHL a également été mis en évidence : cette protéine se lie aux facteurs HIF pour les dégrader.
En situation de normoxie, les enzymes prolyl hydroxylases ajoutent de l’oxygène sur les facteurs HIF, qui vont ainsi être reconnus par VHL pour être dégradés. En cas d'hypoxie, les facteurs HIF échapperont à la dégradation et pourront augmenter l'expression d'EPO.
Des essais cliniques en cours
De nombreuses applications thérapeutiques pourraient découler de la connaissance de cette cascade de signalisation. Plusieurs essais sont déjà en phase clinique. « On peut cibler les protéines HIF en augmentant leur activité pour traiter l’anémie, ou bien au contraire en inhibant leur activité pour traiter des tumeurs solides par exemple, souligne Carole Peyssonnaux. Ces découvertes amènent néanmoins à la prudence : il faut être très précautionneux, car le fait de cibler ces protéines peut potentiellement entraîner beaucoup d’effets secondaires. »
Les trois scientifiques avaient déjà reçu le Grand Prix scientifique Lefoulon-Delalande en 2012 et le prix Lasker de recherche médicale fondamentale en 2016 pour leurs découvertes.
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