Plus de 400 facteurs prédisposants

Une stratégie multifactorielle pour réduire le risque de chute

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Publié le 14/10/2019
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Pour mieux prévenir les chutes, il ne faut pas banaliser le premier épisode mais en comprendre les causes pour proposer une correction multifactorielle. Il est utile d'adresser le patient à une structure gériatrique pour réaliser l'évaluation multidisciplinaire.

Prendre en compte les facteurs précipitants environnementaux

Prendre en compte les facteurs précipitants environnementaux
Crédit photo : Phanie

Fréquentes et aux conséquences potentiellement graves, les chutes représentent un véritable problème de santé publique. Les sujets âgés sont particulièrement concernés, avec au moins une chute annuelle rapportée chez un sujet de plus de 65 ans sur trois et chez un sur deux après 80 ans. Outre les 5 % de décès immédiats qui leur sont imputables, les chutes ont des conséquences importantes : hématomes, fractures, hospitalisations, impossibilité de se relever avec ses propres conséquences, perte d'autonomie, entrée en institution, peur de rechuter qui constitue un facteur de risque de chute… Les seuls coûts directs sont estimés en France à 1,2 milliard d'euros chaque année.

Terrain à risque et facteurs précipitants

Toute la problématique est de comprendre pourquoi la personne a fait une chute, définie par le fait de se retrouver involontairement au sol ou à un niveau inférieur à la position de départ. « Les personnes évoquent souvent la maladresse, un accident, mais le fait de chuter témoigne de l'absence de mécanismes de restabilisation », indique le Pr Cédric Annweiler (gériatre, CHU Angers), avant de rappeler que la chute résulte de l'association d'un terrain à risque et de facteurs précipitants. On dénombre quelque 400 facteurs prédisposants, qui peuvent se cumuler, tels que troubles du rythme, hypotension artérielle, dénutrition, faiblesse musculaire, troubles de la marche… Les facteurs précipitants environnementaux sont aux aussi nombreux : mauvais éclairage, tapis, encombrement au sol…, auxquels il faut rajouter les facteurs de risque comportementaux, comme le fait de se lever ou se retourner trop rapidement. Dans ses recommandations de 2009, la Haute Autorité de santé avait dressé la liste des principaux facteurs en cause.

Un risque multiplié par 17

« Un antécédent de chute multiplie par 17 le risque de nouvelle chute et il faut impérativement agir dès la première chute, en mettant en place une recherche pluridisciplinaire des facteurs prédisposants et précipitants et proposer une correction multifactorielle, souligne le Pr Annweiler. Il n'est bien sûr pas possible d'éviter toutes les chutes, mais on peut en réduire l'incidence : une revue Cochrane de 2012 avait montré qu'une stratégie multifactorielle permettait de réduire de 25 % le taux de chute en ville et de 30 % à l'hôpital. Il est souvent utile d'adresser le patient à une structure gériatrique, où le bilan et les mesures de correction peuvent être réalisés en ambulatoire, comme cela se fait au CHU d'Angers. »

Parmi les moyens les plus efficaces pour réduire les chutes : l'activité physique (marcher au moins 30 minutes par jour) et les exercices d'équilibre (Tai chi par exemple, qui allie équilibre et concentration).« En pratique, on se heurte souvent à des problèmes d'observance, et la notion de plaisir et de groupe est essentielle, indique le Pr Annweiler. Des travaux ont montré que les exercices réalisés en groupe ont une efficacité comparable à celles supervisées par un coach personnel. »

L'activité physique doit idéalement être faite en plein air, ce qui favorise la synthèse de vitamine D, en association à une supplémentation.

Parmi les autres mesures classiquement proposées : l'aménagement personnalisé, plutôt que générique, de l'environnement de la personne âgée, l'éducation thérapeutique, qui doit elle aussi être personnalisée, et bien sûr le « toilettage d'ordonnance ». « La polymédication, en raison des interactions médicamenteuses, est un facteur d'hypotension artérielle et de troubles de la coordination et il faut toujours se poser la question de la nécessité de poursuivre tel ou tel traitement », rappelle le Pr Annweiler.

Dr Isabelle Hoppenot

Source : Le Quotidien du médecin