Pour la protection de l’enfance

Attaquer les violences sexuelles comme une épidémie

Publié le 01/07/2013
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UN HOMME SUR SIX et une femme sur quatre sont victimes de violences sexuelles au cours leur vie, des dizaines de milliers d’enfants tous les jours. L’association « Stop aux violences sexuelles » (SVS), qui réunit médecins et paramédicaux, politiques, magistrats, témoins et intervenants dans le monde scolaire et sportif, se propose de s’attaquer à ce problème dans sa dimension de santé publique.

« Tout se passe comme si les violences sexuelles étaient une épidémie virale, explique le Dr Violaine Guérin, endocrinologue et gynécologue médicale, présidente de SVS. Elles se transmettent - les agresseurs ont été victimes dans la plupart des cas -, elles rendent la victime malade : c’est un polytraumatisme qui a des répercussions variées, de la violence envers autrui à la somatisation en passant par les difficultés d’insertion socio-professionnelles. » D’où l’idée de mettre sur pied une campagne d’éradication des violences sexuelles, comme s’il s’agissait d’un virus.

Mise en place d’une ALD.

Ainsi, le programme SVS, qui sera entériné lors d’assises nationales, en janvier 2014, s’attaque à tous les aspects de l’épidémie. La prévention : information, éducation sexuelle, formation des encadrants (notamment dans le sport ou les internats), rappel des limites (respect de l’intimité des enfants) ; la « Vaccination » : faire voter l’imprescriptibilité et la tolérance zéro pour tout type d’agression sexuelle ; lutte contre la contagion : prise en charge des agresseurs, enfants ou adultes, dans des réseaux de soin qu’il convient de développer et de structurer ; soin des sujets malades : mise en place d’une ALD 30 pour les victimes de violence sexuelle, avec un remboursement à 100 % des traitements. « Le soin fait appel à de multiples thérapeutes et reste inaccessible pour la plupart des victimes. Nous travaillons avec des médecins, psychiatres, kinésithérapeutes, ostéopathes mais aussi la thérapie corporelle (nous avons par exemple mis en place un programme avec la fédération française d’escrime), ou les coaches en réinsertion professionnelle », précise le Dr Guérin. Pour ce qui est du volet dépistage, il consiste à faire en sorte que la question « avez-vous subi des violences sexuelles ? » soit incluse dans l’interrogatoire de base lors de la consultation médicale. Cette question est pour l’instant évacuée des grandes études de cohortes, malgré la prévalence de ces violences.

Protocoles de soins.

L’association va mettre à disposition des médecins, sur son site internet www.stopauxviolencessexuelles.com, des protocoles de soins validés. « Après le diagnostic de ce qui s’est passé, il faut faire l’état des lieux des dégâts, puis mettre en place un protocole de réparation », résume le Dr Violaine Guérin, qui précise aussi que des recommandations seront édictées pour aider les ex-victimes demandeuses de conseils pour leurs propres enfants.

Si ces objectifs peuvent paraître ambitieux, Muguette Dini, sénatrice du Rhône et membre du groupe UDI-UC, se montre optimiste : « En 1972, il y avait 18 000 morts et 386 000 blessés sur les routes… cela a pris 40 ans, mais les choses ont évolué : il y a désormais quatre fois moins de morts et de blessés. » La sénatrice est l’auteure d’une proposition de loi portant de 3 à 10 ans le délai de prescription de l’action publique des agressions sexuelles autres que le viol. Ce texte a été rejeté ; malgré ces freins, « l’imprescriptibilité a été votée dans plusieurs pays déjà, il suffit de le décider et je suis persuadée que cela viendra », déclare-t-elle. Quant à l’idée d’une ALD, « on ne se donne jamais assez les moyens d’évaluer ce qu’on gagnerait à prévenir », ce que la société gagnerait à se débarrasser des violences sexuelles. Ainsi, SVS a décidé de mettre en place des études épidémiologiques pour documenter l’impact des violences sexuelles en France. L’association SVS repose actuellement sur une initiative citoyenne et des dons.

www.stopauxviolencessexuelles.com

 Dr CHARLOTTE POMMIER

Source : Le Quotidien du Médecin: 9255