Comment François Fillon a allumé la mèche

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Publié le 05/12/2016
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« Vous avez une conception du débat en termes de spectacle et vous n'abordez pas le fond. Les Français veulent savoir ce que le futur président de la République va faire en matière de santé… »

Par ces quelques mots lancés à la fin du troisième débat télévisé de la primaire de la droite, le 17 novembre, François Fillon est le premier candidat à l'Élysée à avoir placé sous le feu des projecteurs la thématique de la santé et de l'assurance-maladie. Il a été servi. Depuis quinze jours, son programme santé est analysé, disséqué, décortiqué. La ministre de la Santé, soucieuse de marquer une ligne de fracture avec le député de Paris, a multiplié les offensives sur le thème de la santé « livrée » aux assurances privées, suivie par de nombreux responsables politiques. 

Le malaise créé autour de la Sécu est tel que la porte-parole santé de François Fillon, le Pr Dominique Stoppa-Lyonnet, a rapidement précisé aux Échos que « tous les éléments du programme santé » de son champion seraient remis sur le métier. Sur France 2, le candidat LR lui-même a semblé relativiser la portée des transferts aux complémentaires. « Ce que je veux, c'est sauver la Sécurité sociale, a-t-il assuré. Je veux que les personnes aux revenus modestes et les personnes âgées soient mieux remboursées qu'aujourd'hui par l'assurance-maladie et les mutuelles » ?  

Payer de sa poche pour une angine ?

Il n'empêche que l'ordonnance du Dr Fillon pour soigner l'assurance-maladie a semblé radicale, nombre d'experts y voyant la main d'Henri de Castries, ex-PDG d'Axa. Application de la règle d'or budgétaire, redistribution des rôles entre l'assurance-maladie obligatoire, finançant le gros risque, et les complémentaires santé en charge des soins courants, introduction d'une « franchise médicale universelle »… Il n'en fallait pas plus à Marisol Touraine pour brandir le spectre d'un « surcoût massif pour les familles, notamment pour les personnes âgées et les familles avec des enfants », qui devraient « payer de leur poche » pour la moindre angine.

Sur le papier, l'ancien Premier ministre ne ménage pas non plus l'hôpital. François Fillon prévoit, s'il est élu, de recomposer la carte hospitalière selon des critères de qualité et de volume, et de fermer les petites structures (notamment les urgences) dont le seuil d'activité est insuffisant. Son objectif de supprimer 500 000 fonctionnaires au cours du quinquennat reste un épouvantail, le candidat n'ayant pas précisé quel serait l'impact sur les établissements de santé. Quant au retour aux 39 heures, il ne s'accompagnerait pas d'une rémunération équivalente… Alain Juppé l'avait d'ailleurs reproché à son vis-à-vis : « On ne fera pas une réforme dans la fonction publique permettant aux salariés de travailler 39 heures payées 37 », avait asséné le maire de Bordeaux.

Christophe Gattuso

Source : Le Quotidien du médecin: 9540