Comment une chercheuse émérite, disciple d’Axel Kahn, a-t-elle basculé dans le camp des covido-sceptiques et des antivax, s’aliénant une partie de la communauté scientifique ? Dans un article publié cette semaine, « le Monde » revient sur le parcours surprenant d’Alexandra Henrion-Caude, directrice de recherche à l’INSERM jusqu’en 2018, et qui s’affiche désormais aux côtés du chanteur Francis Lalanne et de l’humoriste Jean-Marie Bigard. Elle est devenue la « caution scientifique des covido-sceptiques » titre le journal.
« C’est l‘histoire d’une folie douce, elle est rentrée dans un truc dont elle ne peut plus sortir », résume pour « Le Monde » le Dr Jérôme Marty, président de l’UFMLS. Depuis le mois de juillet 2020, Alexandra Henrion-Caude a alimenté de nombreuses théories reprises par les opposants à la politique sanitaire contre le Covid et mettant en doute à peu près tout sur les masques, le confinement, les tests de dépistage, les vaccins, le passe sanitaire, … C’est l’une des intervenantes du documentaire très décrié, Hold-up, diffusé en fin d’année dernière.
La généticienne réfute le qualificatif de complotisme, laissant entendre qu’elle ne fait qu'exercer son esprit critique de scientifique. Au risque parfois de se mettre à dos ses pairs. Comme sur le cas des vaccins à ARN, qu’elle estime dangereux : une « folie » de les « administrer à des individus sains », a-t-elle déclaré sur le plateau de TV libertés, la WebTV étiquetée extrême droite.
Reniée par l'INSERM
« Cette injection, non reconnue comme étrangère va rentrer son code génétique chez vous, donc va vous modifier génétiquement », avait-elle encore expliqué dans une interview filmée, faisant référence à la « transcriptase inverse », une enzyme utilisée par certains virus pour rétrotranscrire l'ARN en ADN. Impossible dans le cas du coronavirus, insiste cependant Frédéric Rieux-Laucat, directeur du laboratoire d'immunogénétique des maladies auto-immunes pédiatriques de l’INSERM, qui a répondu sur le sujet à France Info.
L’institut a d’ailleurs pris ses distances avec son ancienne directrice de recherche, qualifiant certains de ses propos « de prises de paroles inexactes, de désinformation ou de rumeurs ». Quand il ne s'agit pas de dérapage incontrôlé comme lorsqu'elle compare l'obligation vaccinale au STO (service de travail obligatoire) imposé par les Allemands pendant l'occupation en France.
Alexandra Henrion-Caude avait également remporté un vif succès sur les réseaux sociaux avec sa thèse sur les écouvillons (utilisés lors des tests RT-PCR de dépistage du Covid) étonnamment longs, selon elle, laissant entendre que cela permettait d’atteindre la « plaque cribriforme pour permettre de passer des nanoparticules, des nouveaux modes de thérapie directement au niveau du cerveau ». Une information démentie par les scientifiques interrogés par l'AFP.
La chercheuse a depuis plusieurs mois joint l’action à la parole. On la voit sur les estrades haranguer les militants anti-masques, les opposants au passe sanitaire, comme le 22 mai dernier au Trocadéro, à Paris, aux côtés d’un Jean-Marie Bigard exultant et insultant l’ex-ministre de la Santé, Agnès Buzyn.
Engagement sectaire ?
Ses dérives ont fini par lasser Axel Kahn. « C’est un de mes enfants qui est tombé », a confié au « Parisien » le généticien qui la qualifie pourtant de « très remarquable jeune femme, très intelligente. Une scientifique de très bon niveau ». En octobre 2020, il remettait pourtant en cause les qualités scientifiques de son ancienne doctorante sur le site de LCI. Son engagement lui paraissait alors « à la limite d'un engagement religieux et sectaire ». Pour ces propos, Alexandra Henrion-Caude attaquera Axel Kahn pour diffamation, avant de faire marche arrière (via son avocat), après que le chercheur eut révélé son cancer.
Apprenant sa mise en cause, le généticien avait préféré répondre sur le ton de l’humour noir. « Chouette, une ultime bonne action avant de mourir. Gratuite, en plus », avait-il twitté.
À ce propos, j’ai reçu ma mise en examen pour diffamation d’Alexandra Henrion-Caude pour avoir tenté d’expliquer l’incroyable dérive d’une chercheuse jadis de qualité par une logique intégriste puis sectaire. Chouette, une ultime bonne action avant de mourir. Gratuite, en plus.
— Axel Kahn (@axelkahn) May 25, 2021
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