Dépakine : encore trop de femmes enceintes exposées, constate l'ANSM

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Publié le 05/02/2020

Crédit photo : PHANIE

Alors que le laboratoire Sanofi vient d'annoncer sa mise en examen pour tromperie aggravée et blessures involontaires, l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) alerte sur la persistance (bien que moindre) de l'exposition des femmes enceintes aux médicaments contenant du valproate de sodium, pourtant connus pour leurs effets tératogènes et fœtotoxiques et contre-indiqués pendant la grossesse.

On estime qu'environ un nouveau-né sur 10 exposés à la Dépakine (ou ses dérivés) présente une malformation congénitale, et 3 à 4 enfants sur 10 seraient atteints de troubles du développement.

Diminution de 80 % de l'exposition des femmes enceintes

Entre 2013 et 2019, le nombre de grossesses exposées au valproate a diminué de près de 80 % : 224 en 2018 contre 1 044 en 2013, observe l'ANSM, à la lumière de l'analyse des données du système national des données de santé (SNDS), par le Groupement d'intérêt scientifique EPI-PHARE (ANSM-CNAM).

Pour les femmes traitées pour l'épilepsie, cette diminution est de 76 % (avec 138 grossesses encore exposées en 2018) ; la baisse est de 82 % pour les troubles bipolaires (et 86 grossesses à la fin de la période).

Quarante-deux pour cent de ces grossesses ont été interrompues (IMG ou IVG), une part en augmentation depuis 2013 (où 31 % des grossesses exposées seulement étaient arrêtées).

Des analyses sont en cours pour savoir si les prescriptions faites à ces femmes étaient justifiées.

124 enfants nés de mères exposées en 2018

L'ANSM recense 124 naissances d'enfants exposés in utero au valproate en 2018 : 92 sont nés de mères épileptiques, et 32 de femmes atteintes de troubles bipolaires. Ils étaient 692 en 2013. « Continuer à avoir des femmes enceintes bipolaires exposées, c'est une situation qu'il faut réduire quasiment à zéro, puisque c'est contre-indiqué et qu'il y a des alternatives », a commenté le Dr Philippe Vella, directeur des médicaments en neurologie, à l'ANSM.

Pour les femmes en âge d'avoir des enfants, l'exposition au valproate a diminué de 55 % (-49 % dans l'épilepsie, -60 % dans les troubles bipolaires) et concerne en 2019 près de 33 000 femmes (pour moitié épileptique), versus 73 000 en 2013. Ce décrochage a débuté en mai 2015, date de la mise en œuvre des premières mesures visant à limiter cette exposition.

Un traitement à base de valproate a été initié chez 2 519 femmes en âge de procréer en 2019 (dont 1 537 personnes souffrant de troubles bipolaires). Parmi elles, 1 236 (soit 49 %) avaient plus de 40 ans.

Renforcement des mesures de réduction de l'exposition

L'ANSM renforcera prochainement les mesures de réduction de l'exposition au valproate. Cela devrait se traduire notamment par l'intégration de la carte patiente à l'intérieur ou sur l'extérieur de la boîte du médicament, et par l'apposition d'un QR code sur ces boîtes et sur les notices, renvoyant vers une page d'information dédiée sur le site Internet de l'ANSM.

Ces médicaments ne doivent être prescrits chez une patiente en âge d'avoir des enfants que si aucun autre traitement n'est possible et que l'ensemble des conditions du programme de prévention des grossesses est rempli (notamment le recours à un contraceptif). La prescription initiale doit être faite par un neurologue, psychiatre ou pédiatre.

Ces médicaments ne doivent pas être prescrits lors de la grossesse chez des femmes atteintes de troubles bipolaires. Chez les femmes épileptiques, ils ne doivent être prescrits que s'il n'existe pas d'alternative thérapeutique appropriée, rappelle l'ANSM.


Source : lequotidiendumedecin.fr