Nouvelles recommandations sur l’autisme

La HAS donne un nouveau cap

Publié le 12/03/2012
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FRUIT DE DEUX ANNÉES de travail, ayant mobilisé 145 experts et plus de 180 organisations, les nouvelles recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS) et de l’ANESM sur l’autisme étaient attendues. Surtout après la polémique politico-médiatique autour de pressions qu’aurait subie la Haute Autorité à propos des pratiques psychanalytiques*. Dans ce contexte, le Pr Jean-Luc Harousseau, président du collège de la HAS a souhaité faire une « mise au point ». « Sur ce sujet, comme sur tous les autres, nous agissons en tant qu’institution médico-scientifique. Et nos deux modes d’action sont la rigueur scientifique et l’indépendance intellectuelle. Nous n’avons pas été influencés. Nous avons continué dans la droite ligne que nous nous étions fixée. Nous avons suivi les recommandations des experts et le collège de la HAS a validé à l’unanimité ce rapport », déclare-t-il. Détaillées dans un document de 57 pages, ces recommandations ont pour objectif d’ « offrir aux professionnels des repères susceptibles d’améliorer et d’harmoniser leurs pratiques et de favoriser l’épanouissement personnel, la participation à la vie sociale et l’autonomie de l’enfant et de l’adolescent », soulignent la HAS et l’ANESM. Les recommandations s’articulent autour de six messages clés : associer l’enfant / l’adolescent et ses parents à la prise en charge ; évaluer régulièrement le développement de l’enfant/adolescent et son état de santé (au minimum une fois par an en explorant tous les domaines de vie) ; proposer un projet personnalisé d’interventions précoces, globales et coordonnées ; encadrer les prescriptions médicamenteuses ; coordonner et former les différents acteurs ; développer les travaux de recherche clinique. S’agissant du projet personnalisé, « les interventions seront fondées sur une approche éducative, comportementale et développementale qu’il y ait ou non retard mental ». En outre, « les familles et les enfants pourront, par exemple, adopter avec l’ensemble des professionnels concernés des interventions fondées sur l’analyse appliquée du comportement dites ABA, des interventions développementales telles que mises en œuvre dans les programmes TEACCH ou des prises en charge intégratives, type thérapie d’échange et de développement », indique le rapport. De sérieuses distances sont par ailleurs prises vis-à-vis des pratiques psychanalytiques dans l’autisme, rangées au rang des « interventions globales non consensuelles ». Pour la HAS et l’ANESM, « l’absence de données sur leur efficacité et la divergence des avis exprimés ne permettent pas de conclure à la pertinence des interventions fondées sur les approches psychanalytiques et la psychothérapie institutionnelle ». Ceci devant « inciter les équipes (…) à développer la recherche clinique ». La position est la même pour le packing dont la pertinence d’éventuelles indications « même restreintes à un recours ultime et exceptionnel » n’est pas démontrée. « En dehors de protocoles de recherche autorisés respectant la totalité des conditions définies par le Haut Conseil de la santé publique (HCSP), la HAS et l’ANESM sont formellement opposées à l’utilisation de cette pratique ». Le message est clair. « Les psychiatres doivent maintenant se remettre en cause. Ils doivent évaluer les résultats de leurs approches, à l’aide de critères permettant de juger l’intégration de l’enfant dans la société, définis par eux et acceptés par les parents », considère le Pr Harousseau.

Des moyens nécessaires.

D’autres interventions globales ne sont pas recommandées à l’instar du programme Son Rise, la méthode des 3i ou la méthode Padovan. La Haute Autorité et l’ANESM recommandent par ailleurs aux parents d’être « particulièrement prudents vis-à-vis d’interventions présentées comme permettant de supprimer complètement les manifestations des TED voire de guérir totalement leur enfant ». Réagissant à ces recommandations, « Vaincre l’autisme » les juge « réellement adaptées à la prise en charge » de ce trouble. « Ce rapport doit désormais être diffusé à large échelle pour ne pas rester lettre morte », ajoute l’association. Le député Daniel Fasquelle, président du groupe d’études parlementaire sur l’autisme salue les positions de ce rapport vis-à-vis des approches psychanalytiques et des stratégies éducatives/comportementales. Le Pr Philippe Evrard, neuropsychiatre et président du groupe de pilotage à la HAS, souligne l’importance de mettre le système sanitaire et médico-social français enfin au niveau dans l’autisme pour que ces recommandations puissent donner leur pleine mesure. « Un tiers seulement des personnes autistes et de leur famille reçoit à temps et à un niveau suffisant l’aide spécialisée qui leur est nécessaire », rappelle-t-il.

* Voir le « Quotidien » du 27 février 2012

 DAVID BILHAUT

Source : Le Quotidien du Médecin: 9096