LA GRÈCE EST EN PLEINE tourmente. Certes, la mort d’un jeune adolescent de 15 ans tué par un policier au cours d’une patrouille, a été le détonateur des émeutes qui secouent le pays depuis plusieurs jours. Mais de toute façon, commente un observateur, « cela devait arriver, tant la tension dans le pays était forte depuis des semaines ». Chômage en hausse, précarité galopante, hausse importante du coût de la vie : la crise économique qui touche le monde entier est particulièrement cruelle pour la Grèce. D’autant que le pays doit faire face à une corruption qui touche presque tous les secteurs. Même la santé ne serait pas épargnée par des pratiques douteuses du fait notamment de certains intermédiaires qui interviennent pour la fourniture de médicament ou de matériels aux hôpitaux.
Pourtant, le système de santé grec n’est à l’évidence pas le plus médiocre. Une étude de l’OCDE le classait ainsi au 14e rang parmi 191 pays. Pas de quoi réellement rougir. La situation aurait-elle changé. « La crise économique, commente Constantin Zirinis qui vit à Athènes, a été très pénalisante pour le système de santé et s’il est vrai que l’on peut toujours bien se faire soigner, les conditions ne sont plus les mêmes qu’il y a quelques années ». Et ce ressortissant grec de répercuter certaines pratiques qui n’avaient pas cours, il y a encore quelques années. Corruption ? Notre interlocuteur ne le confirme pas, mais de citer quand même des files d’attentes dans les hôpitaux pour certaines interventions et des dessous-de-table qui sont donnés à des médecins, en particulier dans les établissements hospitaliers.
Impayés
Mais il y a plus grave peut-être : aujourd’hui, des hôpitaux, qui ont du mal à payer leurs fournisseurs, seraient contraints de reporter des interventions, par manque de moyens ou de matériels performants. Faute de crédits que l’État est dans l’incapacité aujourd’hui de leur verser, des établissements ne peuvent plus fonctionner.
Le système de santé étant public, des médecins qui ont reçu en consultation des patients ne sont pas payés par les caisses, et notamment par la plus importante d’entre elles IKA qui couvre plus de 5 millions d’assurés sociaux. Ce phénomène d’impayés est encore plus important pour les pharmaciens qui ont décidé devant cette incurie des caisses et de l’État de ne plus pratiquer le tiers payant et donc de demander aux patients de régler directement leurs médicaments. D’où des situations très difficiles, avec des malades qui ne peuvent acheter leurs médicaments ou qui au mieux ne peuvent plus se faire rembourser, lorsqu’ils arrivent à consulter un médecin.
Des informations plus alarmistes, rapportées notamment par la correspondante du Figaro en Grèce, mettent en cause directement l’État grec accusé de « piocher dans les recettes de l’assurance-maladie pour combler son déficit ». Du côté de l’ambassade de Grèce en France, si l’on confirme certaines difficultés de remboursement pour des patients et de paiement pour les médecins ou les pharmaciens, on réfute avec force ces accusations de corruption ou de détournements de fonds par l’État. « Il est vrai, reconnait-on à l’ambassade, que la crise économique mondiale a été un rude coup pour notre pays et a touché le secteur de santé et les finances des caisses, mais le gouvernement met tout en uvre pour résoudre cette situation. Toute idée de malversation est à écarter ».
Reste que les professionnels de santé après la grève générale qui a eu lieu hier, envisagent à leur tour de manifester leur mécontentement. À moins que les événements actuels ne les poussent à surseoir à ces mouvements. Ou que le gouvernement actuel tombe. Ce qui est loin d’être utopique.
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