« Les médecins voient, ou vont voir, arriver en consultation des patients à la suite d'un courrier de l'Établissement français du sang (EFS), explique la Dr Pascale Richard, directrice médicale de l'EFS. Cette démarche s'inscrit dans le cadre du projet Upradon lancé il y a quelques mois, qui vise à améliorer la prévention de l’anémie des donneurs de sang en agissant sur la carence en fer. »
Les donneurs souffrant d’anémie (< 12 g/dl chez la femme et < 13 g/dl chez l'homme) sont ajournés au don durant une période de six mois minimum, ce qui est problématique dans un contexte de pénuries récurrentes de sang. L'un des volets d'Upradon consiste à envoyer un courrier spécifique aux donneurs souffrant d’anémie et/ou de carence en fer, leur expliquant la raison de leur ajournement et les invitant à contacter leur médecin généraliste pour résoudre ce problème de santé.
Préserver les réserves en fer et la capacité à donner
« L'idée est que les médecins expliquent aux donneurs que le don de sang total puise dans les réserves en fer, explique la médecin biologiste de formation. Un don de sang total consomme 200 à 300 mg de fer, ce qui est beaucoup, surtout pour les femmes en âge de procréer plus souvent carencées. En cas de carence, il est alors nécessaire d'espacer les dons et de renforcer l'alimentation en fer, voire de prendre une supplémentation. Une fois la carence corrigée, il est de nouveau possible de donner son sang. »
Des mesures pour limiter le risque d'anémie chez les donneurs sont déployées depuis longtemps, à savoir l'espacement de huit semaines entre chaque don ou encore la limitation des dons de sang total par an (quatre par an pour les femmes et six par an pour les hommes). Outre la recherche de signes cliniques, « la recherche d'une anémie à l'aide de l'hémoglobine capillaire est systématique avant le don pour certaines populations, rappelle la Dr Richard. Il s'agit des nouveaux donneurs, de ceux qui n'ont pas donné depuis plus de deux ans et des personnes dont le taux d'hémoglobine était limite lors d'un don précédent, soit < 12,5 g/dl pour la femme et < 13,5 g/dl pour l'homme. »
Ferritinémie dans les groupes à risque
Avec Upradon, l'EFS veut aller plus loin dans la prévention. La carence en fer est fréquente chez les femmes en âge de procréer, comme l'a montré l'étude Esteban. « Entre 3 et 4 % des femmes en âge de procréer sont carencées et près d'un quart des femmes âgées de 18 à 39 ans ont des réserves de ferritine très basses < 15 ng/ml », détaille-t-elle. Un constat partagé par une étude de l'EFS de 2020 dont les chiffres sont du même ordre de grandeur.
Upradon, lancé en mars 2022, vise à réaliser un dosage de la ferritine chez tous les donneurs appartenant à des groupes à risque de carence (selon les critères de Ferridon de 2019) et à mettre en place différentes mesures de prévention. « Les situations à risque identifiées par l'étude Ferridon sont en particulier les jeunes femmes de moins de 31 ans, les dons rapprochés (< 4,5 mois pour les femmes et < 3,5 mois pour les hommes) avec une TCMH (teneur corpusculaire moyenne en hémoglobine) basse », signale la directrice médicale de l'EFS.
Une sensibilisation multicanal
Un taux de ferritine < 15 ng/ml est une contre-indication temporaire au don pendant six mois. « Un courrier est envoyé à la personne lui demandant d'aller consulter son médecin traitant. Des explorations complémentaires peuvent être nécessaires pour rechercher un processus pathologique », explique la Dr Richard. Pour une ferritinémie entre 15 et 25 ng/ml, le don est espacé de quatre mois pour les femmes et de trois mois pour les hommes.
L'implication du médecin traitant est une mesure appréciée par les donneurs. C'est ce que révèle une enquête de l'EFS réalisée à trois mois de la mise en place d'Upradon. « Les donneurs qui reçoivent le courrier sont 8 sur 10 à dire avoir l'intention d'aller voir leur médecin, rapporte la Pr Richard. Deux tiers disent même le faire spécifiquement pour ce motif. Le niveau de connaissances est un levier important pour la prévention. Sans information, seuls 8 % des donneurs essaient d'enrichir leur alimentation en fer, un taux qui monte à 59 % avec l'entretien pré-don et la remise sur les lieux de collecte d'un flyer avec des conseils de consommation d’aliments riches en fer. »
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