Afin de prévenir les risques sanitaires liés à la surexposition à l'arsenic inorganique dans les zones polluées, de mieux identifier les populations à risque et d'améliorer la prise en charge des personnes contaminées, la Haute Autorité de santé (HAS) et la Société de toxicologie clinique (STC) ont élaboré des recommandations conjointes à destination des professionnels de santé et des pouvoirs publics. Celles-ci portent sur dépistage, la prise en charge et le suivi des personnes possiblement surexposées à l’arsenic car résidant dans des zones polluées.
« Les niveaux d'exposition à l'arsenic inorganique de la population générale sont déjà notables et ne sont pas anodins sur le plan sanitaire du fait de notre alimentation via les céréales et l'eau notamment, indique au « Quotidien » le Dr Robert Garnier, chef du Centre antipoison de Paris et membre du groupe de travail. Les recommandations visent donc à ne pas aller au-delà de ces niveaux. Les mesures telles que faire le ménage avec un linge humide et laver fréquemment le visage et les mains des enfants fonctionnent très bien pour cela. »
Un site est pollué au-delà d'un seuil supérieur à 25 mg d'arsenic inorganique bioaccessible par kilogramme de terre. En France, plus de 7 000 sites sont potentiellement pollués en raison d'anciennes activités industrielles. C'est le cas de la vallée de l'Orbiel notamment où se trouvent d'anciens sites miniers.
Dans ces zones, une surveillance des personnes à risque de se contaminer doit être mise en place. « Le dépistage concerne toutes personnes susceptibles d'ingérer de la poussière du sol et de la terre, donc essentiellement les jeunes enfants, mais aussi les personnes ayant un trouble du comportement tel que la géophagie, l'onychophagie et la maladie de pica », souligne le toxicologue. Les consommateurs de légumes produits localement et d'eaux non distribuées par les réseaux sont également à surveiller.
Un dépistage urinaire
Le dépistage repose sur une analyse d'urine. Avec l'appui de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES), les valeurs toxicologiques de référence ont été définies. Une exposition est jugée excessive en cas de taux dépassant 10 µg d’arsenic/g de créatinine chez les adultes. Chez les enfants de moins de 12 ans, un second taux a été fixé à 11 µg d’arsenic/l d’urine.
En cas de dépassement des dosages urinaires, l'objectif est de réduire les risques d'exposition, mais aucun traitement médicamenteux n'est préconisé. « En l’état actuel des connaissances, en dehors des situations d’intoxication aiguë, il n’est pas recommandé d’administrer un traitement chélateur aux personnes dont la somme des concentrations urinaires de l’arsenic inorganique, de l'acide monométhylarsonique et de l'acide monométhylarsonique est augmentée, y compris quand cette élévation est associée à des signes d’arsénicisme chronique », lit-on dans les recommandations.
Effets à court et à long terme
Si l'arsenic est éliminé assez rapidement de l'organisme, les effets sur la santé d'une exposition répétée à l'arsenic, mêmes à faibles doses, sont nombreux. Des effets cutanés non cancéreux, comme les hyperkératoses de la peau et les troubles de la pigmentation de la peau, peuvent survenir à faibles doses et sur une courte durée d'exposition. À plus long terme, l'exposition à l'arsenic augmente le risque de cancers, de diabète, de bronchopneumopathie chronique, de maladies cardio-vasculaires, hépatospléniques, neurologiques ou encore du risque d’avortement et de mort in utero.
« Les professionnels de santé sont amenés à identifier les personnes à risque de développer ces complications. Il s'agit surtout de personnes exposées depuis au moins 5 à 10 ans », résume le toxicologue, précisant qu'il existe des modules de formations destinés aux professionnels de santé pour apprendre à reconnaître les signes d'une intoxication à l'arsenic.
La HAS et la STC recommandent également une meilleure collecte et une meilleure centralisation des données de surveillance afin de mieux cibler les actions de prévention et de vérifier leur efficacité. « Jusque-là, rien de coordonné n'a été mis en place », relève le Dr Garnier. Un document en cours de finalisation sera par ailleurs adressé prochainement aux résidents des zones polluées.
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