Les experts enquêtant sur des liens présumés entre le vaccin Covid d’AstraZeneca et des cas rares de thromboses atypiques − des thromboses veineuses cérébrales (TVC) et des coagulations intravasculaires disséminées (CIVD) − n’ont pas trouvé de facteurs de risque spécifiques, y compris l’âge, a annoncé le 31 mars l’Agence européenne des médicaments (EMA) à la suite d’une réunion de spécialistes le 29 mars.
Le régulateur européen, qui poursuit ses analyses, a précisé que son comité de sécurité devrait publier des « recommandations actualisées » sur le vaccin controversé après sa réunion mensuelle, prévue du 6 au 9 avril la semaine prochaine.
Un avis qui va à contre-courant de la décision récente de plusieurs pays européens de déconseiller le vaccin anglo-suédois aux plus jeunes. Le 30 mars, l’Allemagne l’a réservé aux plus de 60 ans, après le signalement de quelques cas de TVC, la Haute Autorité de santé l’a restreint aux plus de 55 ans une dizaine de jours plus tôt. Et ce malgré les assurances de l’EMA, qui avait jugé mi-mars le vaccin « sûr et efficace », estimant que le nombre global d’événements thromboemboliques (phlébites, embolies pulmonaires, TVC, CIVD) rapporté après la vaccination n’est pas augmenté.
« Pour le moment, les examens n’ont pas identifié de facteurs de risque spécifiques tels que l’âge, le genre ou un passé médical incluant des problèmes de caillots sanguins pour ces très rares cas » chez des personnes vaccinées avec l’AstraZeneca, a indiqué l’EMA dans un communiqué.
Lien causal non prouvé mais « possible »
« Sur la base des connaissances scientifiques actuelles, aucun élément ne soutient la restriction de l’usage du vaccin pour une partie de la population », a assuré la directrice exécutive de l’EMA, Emer Cooke, lors d’une visioconférence. « Aucun lien causal avec le vaccin n’est prouvé. Mais il est possible, et des analyses supplémentaires sont en cours », a-t-elle également déclaré.
Quelques jours plus tôt, le 26 mars, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a, quant à elle, confirmé le lien au vu du « caractère très atypique de ces thromboses, de leurs tableaux cliniques proches et du délai de survenue homogène ». La Norvège a décidé de son côté de prolonger jusqu’au 15 avril la suspension du vaccin d’AstraZeneca, ses autorités sanitaires jugeant nécessaire d’approfondir leur examen et disant « soupçonner » un lien de causalité avec « ces effets secondaires très graves ».
Le gendarme européen du médicament a recensé 62 cas de thromboses veineuses cérébrales dans le monde, dont 44 dans les 30 pays de l’Espace économique européen (Union européenne, Islande, Norvège, Liechtenstein) pour 9,2 millions de doses de vaccin administrées dans cette zone. Quatorze décès ont été enregistrés, sans pouvoir toujours être imputables de façon sûre à la thrombose, a ajouté Mme Cooke.
L’agence a cependant précisé que ces données, parcellaires, n’incluent pas les statistiques du Brésil − grand utilisateur du vaccin d’AstraZeneca derrière le Royaume-Uni et l’Inde − et qu’elles s’arrêtent au 22 mars, sans inclure les cas les plus récents rapportés en Allemagne.
Une balance bénéfice/risque par pays ?
Concernant la restriction décidée par le gouvernement allemand, l’EMA a renvoyé vers les autorités de ce pays, qui « regardent cette question en se basant sur les vaccins qu’ils ont à leur disposition et les risques pour la population allemande. Ce n’est pas en soi une décision de régulateur sur le produit », a dit Emer Cooke.
« Il est très compliqué de prendre des décisions générales sur la balance bénéfice/risque, car cela dépend du taux d’incidence du Covid auquel une population est confrontée, selon que vous soyez un travailleur médical, un enseignant… Différents facteurs jouent », a-t-elle expliqué.
Le régulateur européen a réitéré son avis déjà formulé le 18 mars : « ses bénéfices dans la protection des personnes du Covid-19, avec les risques associés de décès et d’hospitalisation, l’emportent sur les risques possibles ».
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