L’ordre renouvelle un tiers de ses membres

Une élection qui en cache une autre

Publié le 19/05/2009
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Selon une mécanique bien huilée, le Conseil national de l’Ordre des médecins va procéder, le 11 juin prochain, au renouvellement d’un tiers de ses conseillers nationaux. Un scrutin qui a de bonnes chances d’être le dernier sous cette forme, puisque le projet de loi HPST, actuellement en discussion au Sénat, devrait dans sa version définitive modifier en profondeur son mode opératoire, qui devrait passer d’un renouvellement par tiers tous les deux ans à un renouvellement par moitié tous les trois ans.

Les scrutins ordinaux ont ceci d’intéressant qu’ils révèlent à chaque fois les tensions existant au sein d’une institution habituellement peu encline à dévoiler ses différends. A ce titre, il sera intéressant de voir qui, dans les membres sortants, sera ou non réélu, et qui éventuellement les remplacera, ceci pouvant avoir des conséquences importantes sur la deuxième partie du scrutin.

En effet, une dizaine de jours après l’élection, le nouveau conseil national issu de ce scrutin se réunira pour élire le nouveau bureau du CNOM. Si bien que le président Legmann, alors même que son mandat de conseiller ordinal n’est pas arrivé à échéance, se verra dans l’obligation, comme tous ses prédécesseurs, de remettre son mandat de président en jeu à cette occasion. Même si l’autorité et le bilan de l’actuel président ne sont guère remis en cause, la composition du nouveau conseil devra être analysée à la loupe, notamment pour voir si des conseillers nationaux réputés proches de lui, comme Hervé Boissin, Didier Rougemont, Patrick Boué, Xavier Deau ou Walter Vorhauer retrouvent leur siège de conseiller, ceci pouvant affecter le résultat du vote pour l’élection du bureau.

Un bilan positif

Le risque est cependant bien mince pour Michel Legmann d’être empêché de poursuivre son action à la tête de l’institution. Celle-ci sort en effet de plusieurs années de tangage et l’institution nationale, toujours convalescente, n’aurait rien à gagner à de nouveaux soubresauts qui saperaient l’autorité que Michel Legmann tente de lui donner à nouveau. De plus, le bilan de Michel Legmann à la tête de l’institution n’est pas mince. Il est en effet parvenu à faire voter la réforme du mode de scrutin de l’ordre, ainsi qu’un statut de l’élu ordinal qui va encadrer le flou juridique entourant jusqu’à présent les rémunérations de ces élus. Sans oublier le contrôle des comptes des ordres départementaux par l’ordre national, également prévu par la future loi HPST. Le seul tort peut-être de Michel Legmann sera de n’avoir pas pu imposer une meilleure participation de l’ordre des médecins à la gouvernance des futures ARS.

Malgré tout, les succès obtenus par le président actuel ne font pas que des heureux. Ainsi, certains conseillers, départementaux ou nationaux, ne voient pas forcément d’un très bon œil le nouveau mode de scrutin qui va se mettre en place. Si Michel Legmann est convaincu qu’une élection triennale donnera à l’Ordre une stabilité que l’élection biennale n’a pu lui assurer, certains conseillers craignent le « remue-ménage » provoqué par le brusque renouvellement de 50 % des conseillers, dont beaucoup pourraient être novices. « Gérer tout ça, plus les bras cassés de l’ancienne équipe, risque d’être sportif. Et cette irruption pourra en outre provoquer un brutal changement de majorité », commente ainsi un président d’ordre départemental pourtant peu suspect d’opposition à Michel Legmann, et qui le juge « inexpugnable » lors de ce scrutin.

De plus, Michel Legmann et Walter Vorhauer, son secrétaire général, forment à eux deux ce qu’il est convenu d’appeler un ticket à l’américaine. Michel Legmann plus politique, et Walter Vorhauer faisant « tourner la boutique » selon le mot d’un conseiller national. Comme tout ticket, il vaut surtout par l’addition des forces qui le composent et Michel Legmann aura tout intérêt à surveiller de près la réélection de son secrétaire général au poste de conseiller national, d’autant qu’au sein même de ce conseil, certains, et non des moindres, se verraient bien prendre la place du Dr Vorhauer.

Enfin, certains reprochent à voix basse à Michel Legmann une légère tendance à s’attribuer personnellement toutes les actions menées collectivement par l’Ordre : « C’est Monsieur moi je », regrette tel membre du conseil national. Alors que beaucoup jugent que Michel Legmann a très bien mené la barque de l’Ordre, réussissant presque toutes les réformes annoncées, ce même conseiller, décidément bien amical, estime pour sa part que « le mérite en revient essentiellement à l’IGAS, qui a la première réclamé ces réformes ». Ce même conseiller juge néanmoins que le tandem Legmann-Vorhauer ne risque pas grand-chose pour le prochain renouvellement. « Pour les autres membres du bureau, c’est moins sûr », conclut-il, un brin énigmatique.

 HENRI DE SAINT ROMAN

Source : lequotidiendumedecin.fr