Loi bioéthique

Les principes arrêtés pour 7 ans

Publié le 27/06/2011
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Crédit photo : S Toubon

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Crédit photo : S. TOUBON/LE QUOTIDIEN

UNE LOI « équilibrée », selon la secrétaire d’État Nora Berra, mais qui ne comporte que très peu de changements. Après les multiples rapports et la tenue d’états généraux de la bioéthique, de nombreux parlementaires restent malgré tout sur leur faim, à l’image de Muguette Dini, la présidente centriste de la commission des Affaires sociales du Sénat, qui cite Shakespeare avec « Much ado about nothing » (beaucoup de bruit pour rien). La levée de l’anonymat des dons de gamètes, l’ouverture de l’AMP aux femmes homosexuelles, le transfert d’embryon post-mortem, la gestation pour autrui, l’autorisation de la recherche sur l’embryon sont autant de propositions qui ont finalement été abandonnées en cours de discussion.

° Titre I : Examen des caractéristiques génétiques à des fins médicales (art. 2 à 6)

Les dispositions concernent les conditions de la réalisation d’un examen des caractéristiques génétiques d’une personne. Excepté dans le cas où elle veut être tenue dans l’ignorance du diagnostic, la personne est « tenue d’informer les membres de sa famille potentiellement concernés » de l’existence d’une anomalie génétique grave, directement ou de façon anonyme par le biais du médecin. « L’examen des caractéristiques génétiques d’une personne ou son identification par empreintes génétiques à des fins médicales » ne peuvent être pratiqués que dans des laboratoires de biologie médicale autorisés à cet effet.

° Titre II : Organes et cellules (art. 7 à 19)

Le don d’organes entre vifs est élargi à « toute personne pouvant apporter la preuve d’un lien affectif étroit et stable depuis au moins deux ans avec le receveur ». En cas d’incompatibilité entre le donneur et le receveur, ceux-ci peuvent se voir proposer « le recours à un don croisé d’organes ». En cas de mise en œuvre d’un tel don, « les actes de prélèvement et de greffe sont engagés de façon simultanée respectivement sur les deux donneurs et sur les deux receveurs. L’anonymat entre donneur et receveur est respecté ». Avant le 1er octobre, le gouvernement doit remettre au Parlement un rapport relatif à « l’amélioration de l’indemnisation des personnes subissant des dommages en raison d’un don d’organes, de tissus et de cellules du corps humain » et un autre sur « l’amélioration des conditions de remboursement » des frais engagés par les donneurs.

« Le prélèvement de cellules hématopoïétiques du sang de cordon et du sang placentaire ainsi que de cellules du cordon et du placenta ne peut être effectué qu’à des fins scientifiques ou thérapeutiques, en vue d’un don anonyme et gratuit, et à la condition que la femme, durant sa grossesse, ait donné son consentement ». Par dérogation, le don peut être dédié à l’enfant né ou à ses frères et sœurs de cet enfant en cas de « nécessité thérapeutique avérée et dûment justifiée lors du prélèvement ». « Les cellules à fins d’administration autologue ou allogénique ne peuvent être prélevées que dans des établissements de santé autorisés à cet effet par le directeur général de l’agence régionale de santé après avis de l’Agence de la biomédecine ».

°TitreIII : Diagnostic prénatal, diagnostic préimplantatoire et échographie obstétricale et fœtale (art. 20 à 24)

Dans le cadre du diagnostic prénatal, « toute femme enceinte reçoit, lors d’une consultation médicale, une information loyale, claire et adaptée à sa situation sur la possibilité de recourir, à sa demande, à des examens de biologie médicale et d’imagerie permettant d’évaluer le risque que l’embryon ou le fœtus présente une affection susceptible de modifier le déroulement ou le suivi de sa grossesse ». En cas de risque avéré, les membres du couple sont pris en charge par un médecin et, « le cas échéant ou à sa demande, orientés vers un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal ». Une liste d’associations concernées par le handicap diagnostiqué leur est proposée. Les examens destinés à établir un diagnostic prénatal sont pratiqués dans des laboratoires de biologie médicale « faisant appel à des praticiens en mesure de prouver leur compétence ».

Outre les dispositions sur le diagnostic préimplantatoire, il est précisé que le gouvernement, d’ici à un an de la publication de la loi, puis tous les trois ans, doit remettre au parlement un rapport « établissant le bilan détaillé des fonds publics affectés à la recherche sur les anomalies cytogénétiques, en particulier ceux affectés à la recherche réalisée au bénéfice de la santé des patients atteints de ces maladies ».

° Titre IV : Interruption de grossesse pratiquée pour motif médical (art. 25 et 26)

« Hors urgence médicale, la femme se voit proposer un délai de réflexion d’au moins une semaine avant de décider d’interrompre ou de poursuivre sa grossesse », rappelle le texte.

° Titre V : Anonymat du don de gamètes (art. 27 et 28)

L’anonymat reste un des principes fondateurs du don, comme l’indique l’article L.1244-6 du code de la santé publique. Le centre d’étude et de conservation des œufs et du sperme humains (CECOS), qui « recueille et conserve des données à caractère personnel relatives aux donneurs de gamètes ou d’embryons, aux couples receveurs ou aux personnes issues des techniques d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur », est soumis au contrôle de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).

° Titre VI : Assistance médicale à la procréation (art. 29 à 39)

Le donneur de gamètes, majeur, « peut ne pas avoir procréé. Il se voit alors proposer le recueil et la conservation d’une partie de ses gamètes ou de ses tissus germinaux en vue d’une éventuelle réalisation ultérieure, à son bénéfice », d’une AMP. L’Agence de la biomédecine doit remettre au ministère de la Santé, dans les trois mois après la promulgation de la loi, un rapport précisant la liste des procédés biologiques utilisés en AMP. « La technique de congélation ultrarapide des ovocytes est autorisée. » « La mise en œuvre de l’AMP « privilégie les pratiques et procédés qui permettent de limiter le nombre des embryons conservés ». L’AMP a pour objet de remédier à l’infertilité d’un couple (sans qu’une condition de stabilité soit requise) « ou d’éviter la transmission à l’enfant ou à un membre du couple d’une maladie d’une particulière gravité. Le caractère pathologique de l’infertilité doit être médicalement diagnostiqué. ». S’ils n’ont plus de projet parental ou en cas de décès de l’un d’entre eux, les membres d’un couple peuvent consentir de donner leurs embryons à un autre couple, à la recherche ou préférer leur destruction. La publication régulière des résultats de chaque centre d’AMP est prévue avec, pour certains d’entre eux, des « recommandations d’indicateurs chiffrés ».

° Titre VII : Recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires (art. 40 à 44)

Par dérogation (et sans moratoire), la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires humaines (CESh) est autorisée si « la pertinence scientifique du projet de recherche est établie » ; si la recherche est « susceptible de permettre des progrès médicaux majeurs » ; si les chercheurs ne peuvent « parvenir au résultat escompté par le biais d’une recherche ne recourant pas à des embryons humains » ; si le projet de recherche et les conditions de sa mise en œuvre « respectent les principes éthiques relatifs » à la recherche sur l’embryon et les CESh. Les recherches alternatives doivent être favorisées. « À titre exceptionnel, des études sur les embryons, visant notamment à développer les soins au bénéfice de l’embryon et à améliorer les techniques d’assistance médicale à la procréation, ne portant pas atteinte à l’embryon peuvent être conduites avant et après leur transfert à des fins de gestation si le couple y consent » et dans des conditions autorisées par l’Agence de la biomédecine. Dans un délai d’un an, « le gouvernement remet un rapport au Parlement sur les pistes de financement, notamment public, et de promotion de la recherche en France sur les cellules souches adultes et issues du cordon ombilical, ainsi que sur les cellules souches pluripotentes induites ».

° Titre VIII : Neurosciences et imagerie cérébrale (art. 45)

« Les techniques d’imagerie cérébrale ne peuvent être employées qu’à des fins médicales ou de recherche scientifique, ou dans le cadre d’expertises judiciaires. Le consentement exprès de la personne doit être recueilli par écrit préalablement à la réalisation de l’examen, après qu’elle a été dûment informée de sa nature et de sa finalité. »

° Titre IX : Application et évaluation de la loi (art. 46 à 55)

Tout projet de réforme doit être précédé d’un débat public sous la forme d’états généraux. Sinon, le comité est tenu d’en organiser au moins une fois tous les cinq ans. La loi fait l’objet d’un nouvel examen d’ensemble par le Parlement dans un délai maximal de sept ans après son entrée en vigueur. Elle fait en outre l’objet, dans un délai de six ans, d’une évaluation de son application par l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques. L’Agence de la biomédecine établit un rapport annuel d’activité rendu public. L’INSERM doit par ailleurs rendre, avant le 30 juin 2012, un « rapport sur la recherche sur les causes de la stérilité ».

>STÉPHANIE HASENDAHL
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Source : Le Quotidien du Médecin: 8990