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Onco-hématologie, essai transformé pour les CAR-T cells

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Publié le 18/12/2020

Encore considérés comme des traitements futuristes quasi inaccessibles il y a peu, les CAR-T cells sont déjà rentrées dans la pratique « courante » pour le traitement de certaines hémopathies malignes et suscitent un intérêt croissant pour d’autres cancers voire pour certaines pathologies non cancéreuses.

Crédit photo : STEVE GSCHMEISSNER/SPL/PHANIE

Ces derniers mois, l’actualité en matière de cancérologie – et d’onco-hématologie – a été polarisée par les retards de diagnostic et de prise en charge causés par la crise sanitaire. Au point d’occulter des bouleversements thérapeutiques tels que l’utilisation en « routine » des cellules CAR-T dans certaines hémo­pathies.

Une augmentation de la survie

Ces lymphocytes T armés, utilisés aux États-Unis et en Chine depuis 3 ou 4 ans, sont en effet arrivés sur le marché français en 2020 pour entrer immédiatement dans le champ de la pratique. Ainsi ce traitement complexe, fondé sur le recueil des lymphocytes du patient, l’adjonction à leur surface d’un récepteur artificiel puis leur réinjection au malade après administration d’une chimiothérapie dite « de bridge » et d’un traitement lympho­déplétant, a-t-il, d’après Véronique Leblond, professeur d’hématologie à la Pitié-Salpêtrière (Paris), « déjà révolutionné la prise en charge de plusieurs hémopathies malignes ».

Malgré leurs effets indésirables inflammatoires et neurologiques importants – de mieux en mieux surveillés et traités, mais qui justifient cependant un suivi pendant 15 ans –, ces cellules CAR-T ont en effet montré leur intérêt dans le traitement des hémopathies lymphoïdes B (lymphome, leucémie aiguë lymphoblastique B). En particulier dans la leucémie aiguë lymphoblastique B de l’enfant, ce nouveau genre de thérapies aurait déjà permis d’augmenter drastiquement la survie à 1 an, qui atteint aujourd’hui 80 %, indique le Dr Françoise Norol, hématologue à l’AP-HP.

Et selon la spécialiste, les applications de ces CAR-T cells pourraient dans les années à venir s’étendre à d’autres hémopathies telles que la LLC, la LAM, le lymphome de Hodgkin et surtout le myélome multiple.
Le recours à ces cellules pourrait aussi, dans un futur plus ou moins proche, transformer la prise en charge de certains cancers solides – d’après le Pr Jacques-Olivier Bay, hématologue au CHU Estaing (Clermont-Ferrand), et des essais sont en cours dans le glioblastome ou le neuroblastome –, voire d’autres pathologies non cancéreuses. « Les CAR-T cells pourraient également être utilisées dans le traitement de maladies auto-immunes ou d’origine virale », prévoit le Dr Norol.

La principale entrave au développement de cette thérapie, reposant sur un principe universel, concerne encore, à l’heure actuelle, la difficulté à identifier des cibles ou des combinaisons de marqueurs spécifiques aux cellules malades, sans lesquelles les cellules CAR-T s’attaqueraient également aux cellules saines des patients. Autre limite à l’extension des indications de ce genre de thérapies : le coût des CAR-T cells, dont chaque injection présente une valeur de 350 000 euros. « Lorsqu’une AMM sera obtenue pour une utilisation contre le myélome, maladie hématologique la plus fréquente, le prix des cellules CAR-T risque de poser question », prévoit ainsi Françoise Norol.

Fini les plans cancer, vive la stratégie décennale

Au-delà des innovations thérapeutiques, la lutte contre le cancer a continué en 2020 à s’organiser et à se restructurer. Alors que le 3e plan cancer a pris fin en 2019, cette année a en effet été marquée par la présentation des grands axes d’une nouvelle stratégie décennale de lutte contre le cancer.

Coordonnée par l’Institut national du cancer (Inca), cette nouvelle feuille de route entend mettre l’accent sur trois grands objectifs : « lutter contre les cancers de mauvais pronostic » en développant la recherche comme en améliorant le diagnostic, l’accès à des thérapies innovantes, le suivi et le parcours de soins ; « améliorer la prévention » grâce à une approche à la fois plus personnalisée, plus précoce (dès l’école) et intégrant des problématiques environnementales ; et « limiter les séquelles et améliorer la qualité de vie » des patients en accordant une attention particulière au repérage et à la prise en charge de ces séquelles. À ces trois axes principaux sont par ailleurs adjoints des « mesures transversales » relatives notamment au continuum recherche-soins, à la lutte contre les inégalités en santé ou encore au recours aux données de santé et à l’intelligence artificielle.

Cet automne, une première version de la stratégie a été soumise à une consultation citoyenne avant d’être amendée puis validée par l’Inca fin novembre. Après les arbitrages du gouvernement, la version définitive devrait être arrêtée officiellement début 2021.


Source : Le Généraliste