TUMEURS : DU PLUS FRÉQUENT AU PLUS RARE

BÉNIN OU MALIN ? URGENT OU NON ?

Publié le 09/12/2016
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Le médecin de premier recours doit savoir repérer précocement les carcinomes basocellulaires dont il existe des présentations atypiques. Quant aux kératoses actiniques, elles peuvent évoluer vers un carcinome épidermoïde
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Crédit photo : Dermatologie CH LE MANS

LE CARCINOME BASOCELLULAIRE

Cet homme de 35 ans présente depuis quelques mois une lésion près du pli nasogénien, indolore, dont la taille augmente.

Il s’agit d’un carcinome basocellulaire (CBC). Une consultation dermatologique rapide est nécessaire pour réaliser une biopsie le confirmant suivie d’une exérèse avec marges adaptées. Si la lésion est petite une exerèse complète d’emblée peut être faite.
Il s’agit du premier cancer cutané, et de la 2e cause de cancer chez l’homme après le cancer de la prostate.
Les facteurs de risque sont l’âge, le phénotype solaire (peau claire), l’exposition chronique aux UV (professionnelle ou liée aux loisirs) ; les radiations ionisantes, l’immunosuppression (transplantation d’organe…), l’arsenic ; également des facteurs génétiques (xeroderma pigmentosum, syndrome de Gorlin…).
Typiquement, il s’agit d’une papule, ou d’un nodule translucide, dite en « perle » ou avec une « bordure perlée ». En faveur d’un CBC plutôt que d’une lésion bénigne : une lésion d’évolution chronique qui augmente de taille. L’ulcération et la douleur sont inconstantes.
Attention : le CBC survient aussi chez les adultes jeunes. Le pronostic est le même que chez les patients plus âgés.
L’évolution des CBC est lente et il n’y a pas de risque métastatique. Néanmoins, le diagnostic doit être précoce car même si la lésion est petite, la nécessité de respecter des marges de sécurité fait que la chirurgie d’exérèse est parfois lourde, et la reconstruction – fonctionnelle et esthétique – difficile dans certaines localisations. Le CBC sclérodermiforme a une évolutivité insidieuse, avec envahissement dermique profond et  doit être connu pour un dg précoce.
 

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LA KÉRATOSE ACTINIQUE

Ce patient de 65 ans, retraité, ayant vécu 10 ans aux Antilles, présente depuis 2 ans de petites plaques kératosiques planes associées à un prurit. Certaines ont disparu mais d’autres persistent ; le toucher est rêche, rugueux.

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Il s’agit de kératoses actiniques (= kératoses photo-induites, kératoses solaires, ou kératoses préépithéliomateuse)   .   
Le traitement de première intention d’une KA isolée ou en petit nombre est la cryothérapie. En 2e intention , surtout en cas de lésions multiples et confluentes ou «  champs de prolifération » : le 5-FU ou fluorouracile (Efudix®), l’imiquinod (Aldara®), le mébutate d’ingénol (Picato®) ou la photothérapie dynamique. . Le diclofénac disodique (Solaraze®)est non remboursé.)
En cas de KA hypertrophiques ou d’échec du traitement bien conduit, une biopsie est recommandée.
L’évolution des kératoses actiniques (KA) peut se faire vers un carcinome épidermoïde, à suspecter devant une lésion infiltrée qui persiste. La distinction est souvent difficile.


SIGNES D'ALARMES DEVANT FAIRE SUSPECTER LA TRANSFORMATION D'UNE KÉRATOSE ACTINIQUE EN CARCINOME ÉPIDERMOÏDE

-Apparition d’une douleur.
-Apparition d’une érosion ou d’une ulcération en taille ou d'un saignement.
-L’extension et le bourgeonnement en surface.
-L’infiltration au toucher.
-Ces modifications s’installent habituellement sur plusieurs mois. Les lésions apparaissant de novo ont aussi l’aspect d’une plaque kératosique, mais sur une zone de peau antérieurement normale.

LE CARCINOME ÉPIDERMOÏDE CUTANÉ

Ce patient de 60 ans, jardinier, présente une lésion qui s’étend sur le dos de la main, sur un fond de kératose photo-induite pour laquelle il n’avait jamais consulté.

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Le carcinome épidermoïde cutané (CEC) est responsable de la majorité des décès par cancer cutanés après le mélanome.
9 cas sur 10 sont localisés sur le visage, le dos des mains et les avant-bras.
La majorité des CEC n’engagent pas le pronostic vital, mais ils possèdent un risque métastatique, avec un tropisme ganglionnaire.
Les zones les plus à risque de récidives et de métastases sont les zones périorificielles (lèvres, nez, oreille externe, paupières), le cuir chevelu, les CEC naissant en zone non insolée (périnée, sacrum, plantes des pieds) ou sur radiodermite/cicatrice de brûlure/ulcère chronique.
La prise en charge est discutée en Réunion de concertation multidisciplinaire. Le traitement est toujours chirurgical. 95 % des tumeurs < 2 cm sont éradiquées avec des marges > 4 mm. Ces marges de sécurité doivent parfois être élargies à plus d’1 cm, avec un risque fonctionnel et esthétique notamment pour la zone centrale du visage, les lèvres et les oreilles, qui justifient une prise en charge spécialisée.

LES FACTEURS DE RISQUE CUTANÉS DE CARCINOME ÉPIDERMOÏDE
-Kératoses photo-induites.
-Radiations ionisantes, exposition UV chronique .
-Plaies chroniques (ulcères de jambes+++).
-Cicatrices (brûlures…).
-Arsenic, pesticides, hydrocarbures, tabac (lèvre inférieure).
-Lichen scléreux génital, lichen plan érosif buccal.
-Certaines lésions muqueuses virales à HPV.
-Phototype

RÉFÉRENCES UTILES
Société française de dermatologie, Inca, HAS.
Carcinome épidermoïde cutané (carcinome spinocellulaire) : recommandations de pratique clinique pour la prise en charge diagnostique et thérapeutique. Rapport intégral. Mai 2009. Disponible sur http://www.e-cancer.fr/content/download/58347/531952/file/carcinome-epi…

 

D'après les présentations des Drs Nathalie Bénéton, PH dermatologue au CH du Mans, SFD et Cédric Rat médecin généraliste, Université de Nantes, CNGE

Source : lequotidiendumedecin.fr