Les dates du Ramadan sont annoncées, il se déroulera du 9 juillet au 8 août. Le jeûne quotidien va donc durer 18 heures durant lesquelles il est interdit aux Musulmans pratiquants de boire et de manger. En 2005, puis dans une réactualisation en 2010, un groupe de travail de l’ADA (American Diabetes Association) a émis des recommandations sur la surveillance et l’adaptation thérapeutique du diabète des patients Musulmans pratiquants le jeûne(1).
CONSEQUENCES PHYSIOLOGIQUES DU JEUNE
Durant les premiers jours du Ramadan, la sécrétion d’insuline favorise l’hypoglycémie responsable de la sensation de faim. Cette phase d’adaptation dure une dizaine de jours. Au cours du mois de jeûne, la sécrétion d’insuline diminue au profit des hormones de contre-régulation (glucagon) avec comme conséquences la production hépatique de glucose par glycogénolyse et néoglucogenèse avec atténuation des manifestations d’hypoglycémie. De même, l’utilisation périphérique de glucose diminue au cours du mois de jeûne.
Concernant l’hydratation, le corps va s’adapter en réduisant les pertes.
On note pendant cette période, une baisse du temps de sommeil (horaires des repas décalés) avec une baisse parallèle des performances cognitives et physiques.
LES RISQUES DU JEUNE CHEZ LE DIABÉTIQUE
› Hypoglycémie. Elle serait responsable de 2 % à 4 % de la mortalité des patients DT1. L’étude observationnelle Epidiar menée dans 13 pays sur un peu plus de 12 000 patients montre que le risque d’hypoglycémie est 4,7 fois plus important chez les diabétiques de type 1 (DT1) et 7,5 plus chez les DT2.
›Hyperglycémie. Le risque d’hyperglycémie est multiplié par 3 en cas de DT1 et par 5 en cas de DT2 (2). Ce risque est souvent lié à la réduction posologique excessive d’antidiabétiques. Aussi, les patients ayant accru leurs apports alimentaires et/ou en sucres ont significativement plus de risque d’hyperglycémie.
› Acidocétose diabétique. Les diabétiques de type 1 sont particulièrement exposés à cette complication. Ce risque est majoré lorsque l’insulinothérapie est trop réduite en prévision de la réduction de la ration alimentaire.
› Déshydratation et thrombose. En cause, la restriction hydrique imposée par le jeûne aggravée par les conditions climatiques ; l’été la transpiration aggrave la déshydratation, de même le travail physique. Et la diurèse osmotique liée à l’hyperglycémie ne fait qu’aggraver la situation. L’hypotension orthostatique est aggravée chez les sujets souffrant de dysautonomie préexistante.
L’augmentation de la viscosité sanguine secondaire à la déshydratation majore le risque de thrombose veineuse.
LA CONSULTATION PRE-RAMADAN
Dans l’idéal, les patients diabétiques qui souhaitent observer le Ramadan doivent consulter leur médecin 2 à 4 mois auparavant. Cette consultation permet d’évaluer l’équilibre glycémique, d’évaluer le niveau du risque, d’adapter si nécessaire le traitement et d’informer le patient sur les risques potentiels.
En effet, le jeûne altère de façon significative l’équilibre glycémique et le bilan lipidique des diabétiques de type 2, mal équilibrés préalablement. D’où l’importance d’un bon équilibre métabolique avant le jeûne.
› Pour les patients à risque élevé à très élevé, évaluer au cas par cas le risque du jeûne; le plus souvent les comorbidités et la polymédication ne le permettent pas. Pour ceux à risque modéré, une éducation préalable et un ajustement thérapeutique permettent la pratique du jeûne de manière sereine (voir encadré E1).
PENDANT LE RAMADAN
1. Conseiller la rupture du jeûne en cas de glycémie inférieure à 0.70 g/l dès les 1ères heures du jeûne ou d’une glycémie supérieure à 3 g/l pendant le jeûne.
2. Adapter les règles alimentaires
- Répartir les apports alimentaires sur deux ou trois repas
- Consommer les glucides à index glycémique élevé (dattes, barres de céréales...) au moment de la rupture du jeûne (Iftar)
- Consommer plutôt les glucides à index glycémique bas pour le repas avant l’aube (Souhour)
- Consommer fruits et légumes à chaque repas, en limitant pâtisseries, confiseries et boissons sucrées
- Préférer les viandes maigres, poissons
- Bien s’hydrater est capital.
3. Adaptations thérapeutiques
› Chez le diabétique de type 2, les insulino-sensibilisateurs (metformine, incrétines) ou l’acarbose peuvent être poursuivis.
- Pour la metformine, modifier la répartition des doses : - 2/3 de la posologie avant la rupture du jeûne - 1/3 avant le repas du matin
- Pour les incrétines, la posologie n’est pas modifiée et le risque hypoglycémique est faible.
- Pour les sulfamides, le risque hypoglycémique est majeur. Dans ce cas, préférer les sulfamides hypoglycémiants à demi-vie courte et adapter les posologies en fonction de l’importance et du nombre de repas.
› Les glinides restent la classe thérapeutique à privilégier.
› Chez le diabétique de type 1, le jeûne doit être déconseillé ou du moins, très encadré.
SURVEILLANCE BIOLOGIQUE
› Les contrôles glycémiques doivent être rapprochés 3 à 4 fois pendant le jeûne et au moindre malaise et après les repas avec comme objectifs glycémiques à jeun et en post-prandial ceux convenus avec le médecin traitant et le diabétologue référent
› La fonction rénale doit être évaluée avant le début du jeûne et 10 jours après par dosage de la créatininémie, de l’urémie et de la clearance de la créatinine par la formule MDRD. Chez les patients à la fonction rénale altérée, sa dégradation doit conduire à demander l’avis du néphrologue.
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