L'énurésie nocturne primaire isolée (EnPi) est définie par la présence d'une incontinence intermittente pendant le sommeil chez un enfant âgé d'au moins cinq ans, sans période continue de continence supérieure à six mois et sans aucun autre symptôme associé, en particulier diurne, relevant du bas appareil urinaire. Les mictions sont normales. La prévalence de cette affection serait d'environ 9 % des enfants de 5 à 10 ans (11 % chez les 5-7 ans), et le taux de guérison spontanée est d'environ 15 % par an (1). Pour autant, toutes les énurésies nocturnes n'auront pas disparu à la puberté et l'on estime à environ 3 % le risque de rester énurétique à l'âge adulte en cas d'énurésie nocturne primaire non traitée.
L'énurésie secondaire correspond à la reprise d'une incontinence pendant le sommeil après six mois de contrôle mictionnel.
UN DIAGNOSTIC CLINIQUE
-› Le diagnostic d'énurésie nocturne primaire isolée repose sur l'interrogatoire et l'examen clinique, et aucun examen complémentaire n'est nécessaire en première intention (1).
-› On distingue deux formes d'EnPi. La forme polyurique pure avec capacité vésicale normale, souvent reliée à une inversion du cycle nycthéméral de la sécrétion de la vasopressine, se manifeste par une diurèse nocturne importante (couches très mouillées), que l'on évalue en déterminant le poids de la couche mouillée et en ajoutant le volume mictionnel au réveil (normalement, diurèse nocturne < diurèse diurne). Des ronflements et/ou apnées du sommeil et des signes d'encombrement du carrefour ORL peuvent être associés (l'hypocapnie favorise la polyurie). Les apports hydriques sont souvent excessifs.
La forme avec faible capacité vésicale se caractérise par des mictions peu abondantes répétées.
-› La consultation permet aussi de vérifier l'absence de signes diurnes d'immaturité vésicale (fuites, impériosités mictionnelles), d'uropathie, de trouble neurologique, de polyuropolydipsie, d'infection urinaire, de constipation, d'encoprésie et de troubles psychologiques (2). On recherche aussi des antécédents familiaux, présents dans 30 à 60 % des cas. L'existence d'un trouble déficitaire de l'attention avec hyperactivité n'est pas rare : 10 % des enfants ayant une EnPi ont un TDAH (1). Une baisse de l'estime de soi est fréquemment associée à l'énurésie.
L'EnPi est dite modérée si elle survient moins d'une fois par semaine, moyenne pour 1 à 2 épisodes par semaine, sévère lorsqu'il existe au moins 3 épisodes par semaine.
-› Un calendrier mictionnel tenu pendant 48 heures permet de confirmer le diagnostic.
QUELLE PRISE EN CHARGE ?
Les mesures hygiéno-diététiques (1)
Elles sont à proposer dès le début de la prise en charge.
-› Les apports liquidiens doivent rester normaux (45 à 60 ml/kg), mais doivent être absorbés entre 7 et 18 heures. Le petit-déjeuner doit représenter un tiers des besoins journaliers. Il est conseillé de privilégier les eaux de boisson peu minéralisées, de supprimer en fin de journée les boissons sucrées et/ou gazeuses ainsi que les aliments très salés, et de limiter le soir l'apport calcique (laitages)
-› Les mictions régulières dans la journée doivent être encouragées : on recommande à l'enfant d'aller aux toilettes cinq à six fois par jour, en programmant une miction avant le coucher ; d'aller aux toilettes dès qu'il en ressent le besoin, et lorsqu'il urine, d'être détendu et de laisser couler le jet librement sans pousser.
-› Ces mesures doivent être suivies pendant au moins deux semaines, durant lesquelles un calendrier mictionnel doit être rempli en mentionnant aussi bien les accidents nocturnes que les nuits sèches.
-› En cas d'échec des mesures hygiéno-diététiques et chez les patients motivés, des traitements spécifiques peuvent être proposés à partir de l'âge de 6 ans (1). Il s'agit soit de traitements comportementaux (système d'alarme), soit de traitements médicamenteux.
Les traitements spécifiques
-› La desmopressine est le traitement de choix en cas d'EnPi associée à une polyurie nocturne et réfractaire aux seules mesures hygiéno-diététiques (1). En raison du risque d'intoxication par l'eau, la forme endonasale a été supprimée dans cette indication (3), seule la forme orale étant disponible actuellement. Cet analogue structural de synthèse de l'hormone antidiurétique naturelle permet de réduire le volume urinaire nocturne.
Une seule prise par jour, le soir, est nécessaire. En raison du risque potentiel d'hyponatrémie et de rétention hydrique, la prise de liquides doit être réduite au moins 1 heure avant et pendant les 8 heures suivant la prise de desmopressine (3). La prise ponctuelle "à la demande" est contre-indiquée.
Après 3 mois de traitement à dose minimale efficace, le traitement est interrompu et l'énurésie est réévaluée au moins une semaine après l'arrêt du traitement (Vidal 2012). La durée du traitement est limitée à 3 mois, renouvelable une fois. On distingue les répondeurs complets (diminution du nombre de nuits mouillées de plus de 90 % par rapport à la période avant traitement), les répondeurs partiels (entre 50 et 90 %) et les non répondeurs (diminution du nombre de nuits mouillées de moins de 50%). Le taux de répondeurs (complets et partiels) sous traitement est de 60 à 70 %.
-› Selon l'AFU, l'oxybutynine peut être utilisée, hors AMM, en seconde intention en monothérapie après échec des traitements spécifiques, chez les enfants suspects d'avoir une faible capacité vésicale nocturne (1).
La clomipramine, l'amitriptyline et l'imipramine (imipraminiques) sont utilisées exceptionnellement dans l'énurésie nocturne de l'enfant.
-› Les systèmes d'alarme sont à privilégier en cas de petite capacité vésicale (2). Ils permettent de conditionner l'enfant à la perception de sa miction (succès attendu 60 à 80 %). Placés dans les sous-vêtements de l'enfant ou dans une alèse, ces dispositifs sont reliés à une source sonore.
-› L'association de desmopressine et des systèmes d'alarme peut être proposée lorsque l'énurésie est réfractaire à une monothérapie.
Mise au point
Troubles psychiatriques : quand évoquer une maladie neurodégénérative ?
Étude et pratique
Complications de FA, l’insuffisance cardiaque plus fréquente que l’AVC
Cas clinique
L’ictus amnésique idiopathique
Recommandations
Antibiothérapies dans les infections pédiatriques courantes (2/2)