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IVG médicamenteuse : un acte militant ?

Publié le 14/03/2014
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L’IVG médicamenteuse (IVGM) par mifépristone et misoprolol a été autorisée en ville jusqu’à 7 SA en 2004. L’efficacité de la technique est comparable à celle de la méthode chirurgicale (95-98% vs 99%). Environ 70% des femmes qui pratiquent une IVG choisissent la méthode médicamenteuse pour son côté moins invasif, l’absence d’hospitalisation et d’anesthésie ou pour en garder la maîtrise. Leur satisfaction approche 80 à 95%. En France, en 2008, sur les 1 068 médecins libéraux pratiquant l’IVGM, 41% sont des médecins généralistes.

› Une étude menée par le département de médecine générale de l’université Jean-Monnet de Saint Etienne, parue dans la revue Exercer (1), a cherché à savoir les motivations, les difficultés et les propositions des MG qui pratiquent cette technique.

L’étude a été réalisée auprès des généralistes rhônalpins qui ont réalisé au moins une IVG médicamenteuse avant février 2013. Les volontaires ont été recrutés par téléphone pour réaliser une enquête qualitative par entretiens semi-directifs auprès de quatorze MG de février à juin 2013. Cette région fait partie du peloton de tête des régions de France à forte demande de pratique d’IVGM, aux côtés de l’Ile-de-France, PACA, l’Aquitaine et la Réunion.

› Au terme de l’analyse des entretiens, il apparaît que les généralistes réalisent des IVGM pour en faciliter l’accès aux femmes en toute sécurité. Ils évoquent des difficultés d’accueil dans les centres d’orthogénie hospitaliers. Cette pratique est majoritairement de type militant, les participants dénonçant le peu de valorisation, la mauvaise rémunération (inférieure à celle des IVG chirurgicales), et le cadre médico-légal trop strict. Ils reconnaissent que cette pratique implique une grande disponibilité y compris le week-end.

› Pour la majorité des MG, l’IVGM s’organise en trois consultations : la demande, la prise de mifépristone et le contrôle post-IVG. Ils évaluent les conditions de sécurité à domicile et le niveau de compréhension de la stratégie. Dans le doute, ils orientent vers l’hôpital. Pour certains, les mineures sont d’emblée adressées en milieu hospitalier, préférant réserver l’IVGM aux femmes ayant une expérience gynéco-obstétricale.

› Les complications restent rares et jugées acceptables (hémorragies, douleurs). Les rétentions étaient souvent gérées au cabinet par une seconde prise de misoprostol. Les quelques généralistes ayant une pratique plus limitée (10 à 24 IVGM par an) étaient les moins sereins à cet égard.

› La majorité des médecins souhaiteraient réduire le nombre de consultations obligatoires et le délai de réflexion, fréquemment inadaptés aux situations des femmes. Ils souhaitent aussi que le délai soit étendu à 8 ou 9 SA. Et que l’éligibilité de la patiente à cette technique et son efficacité puisse être jugée cliniquement.
De l’avis des médecins, « la création d’un système sécurisé informatique assurant l’anonymat avec les centres d’orthogénie améliorerait les démarches administratives. Une organisation en réseau régional uniformiserait les pratiques et garantirait l’offre de soins ».
Cette pratique par les médecins généralistes impose une convention entre le médecin et un centre référent hospitalier.


1- Hidoussi H., Vallée J. Exercer. 2014. vol 25. N°111. p20-27.
Dr Linda Sitruk, fmc@legeneraliste.fr
IVG

Source : lequotidiendumedecin.fr