Neurologie

LA NOTALGIE PARESTHÉSIQUE

Publié le 25/04/2022
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Cette neurodermatose, qui est fréquente, se manifeste par un prurit, des dysesthésies ou des douleurs en haut du dos. On peut aussi voir apparaître localement des troubles pigmentaires. Sa prise en charge donne souvent des résultats décevants.

Jean-Philippe, 58 ans, consulte car, depuis plus de deux ans, il présente un prurit très localisé au niveau de la partie moyenne du dos. Ce patient consulte très régulièrement des confrères en raison de dorsalgies et de lombalgies imputables à son travail (il est maçon).

Bien que les douleurs rachidiennes aient été calmées suite à la prise régulière d’AINS associée à une rééducation, différents traitements antihistaminiques, corticoïdes oraux et locaux n’ont pu résoudre le prurit.

Cliniquement, nous sommes surpris par la présence d’une plage hyperpigmentée à droite des 4e et 5e vertèbres dorsales.

Nous ne retrouvons aucun autre élément particulier lors de notre examen, excepté une douleur diffuse de la région dorsale (elle a fait l’objet d’explorations d’imagerie qui ont objectivé de l’arthrose sur différentes vertèbres thoraciques).

Compte tenu de cette description et des antécédents du patient, nous avons posé le diagnostic de notalgie paresthésique.

INTRODUCTION

La notalgie paresthésique est une neurodermatose bénigne qui a été décrite pour la première fois en 1934 par Michail Astwazaturow. Cette affection est fréquente et concernerait près de 10 % des patients ayant un prurit chronique. La notalgie touche le plus souvent des sujets de sexe féminin, qui ont un âge moyen de 50 ans.

S’agissant d’une neuropathie sensitive isolée, plusieurs origines sont classiquement évoquées :
• une hernie discale ou une myélopathie centrée sur les vertèbres thoraciques,
• une atteinte des fibres nerveuses spinales,
• un conflit rachidien faisant suite à un traumatisme,
• les conséquences d’une arthrose sur les vertèbres thoraciques,
• les suites d’un zona thoracique.

Ces différentes affections peuvent avoir des conséquences neurologiques en touchant les branches postérieures du nerf spinal.

Enfin, certains auteurs mettent en avant une possible association de cette neurodermatose avec une néoplasie endocrinienne multiple de type 2A ou syndrome de Sipple (qui associe cancer de la médullaire de la thyroïde, phéochromocytome, et hyperparathyroïdie), néoplasie qui a un caractère familial.

SYMPTOMATOLOGIE

Les premières manifestations cliniques d’une notalgie paresthésique sont un prurit, voire une douleur de la partie médiane de l’omoplate et qui a un caractère intermittent ou, parfois, permanent. Ces douleurs se présentent chez le patient de différentes manières : sensation de froid, de chaleur, d’hyperesthésie, de tension intense.

Ces manifestations ont un caractère unilatéral et elles concernent un dermatome compris entre T2 et T6.

En parallèle, on met en évidence des manifestations dermatologiques qui font suite, le plus souvent, au prurit. Dans la majorité des cas, il s’agit d’une hyperpigmentation dont les limites ne sont pas nécessairement très nettes. Par ailleurs, chez certains patients, la surface de cette zone pigmentée est atrophique ou hyperkératosique. Néanmoins, il est possible, mais cela est moins fréquent, d’objectiver des placards hypopigmentés.

EXAMENS COMPLÉMENTAIRES

Leur utilité est limitée car l’examen clinique suffit à poser le diagnostic.

Cependant, l’imagerie (radiographie ou scanner) centrée au niveau du rachis dorsal permet d’objectiver la présence d’une arthrose évoluée ou une hernie discale.

PRISE EN CHARGE

Elle est difficile et, souvent, la mise en place de certaines mesures pour limiter les manifestations cliniques du patient s’avère décevante.

Néanmoins, certains traitements peuvent être recommandés :
• les tricycliques, ou les autres traitements à visée neuropathique (gabapentine), qui réduisent la douleur neuropathique,
• certains topiques à base d’anti-inflammatoires ou anesthésiques qui ont un impact sur le prurit,
• le recours à certaines médecines alternatives (cas de l’acupuncture), qui peut soulager les patients.

Dr Pierre Frances (médecin généraliste à Banyuls-sur-Mer), Widad Gallaf (interne en médecine générale à Montpellier), Léa Satge et Thomas Duboux (externes à Montpellier)

BIBLIOGRAPHIE
1. Messous F, Maarfia N, Menasria N. La notalgie paresthésique isolée à propos d’un cas. Revue Neurologique 2019;175 (supp1): S146-S147.
2. Alai NN, Skinner HB. Concurrent notalgia paresthetica and brachioradial pruritus associated with cervical degenerative disc disease. Cutis 2018;102 (3): 185-190.
3. Rivollier C, Emy P, Armingaud P. Notalgie paresthésique et néoplasie endocrinienne multiple de type IIA (syndrome de Sipple) : 3 cas. Annales de dermatologie et de vénéréologie 1999;126 (6-7): 522.


Source : Le Généraliste