Psychiatrie

LA TRICHOTILLOMANIE

Publié le 05/06/2023
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La trichotillomanie est un trouble obsessionnel compulsif consistant en un arrachement récurrent des cheveux ou des poils, et conduisant à l’apparition d’une aire avec raréfaction des poils ou cheveux. Certains traitements peuvent réduire ce trouble mais leur efficacité est majorée si elle est associée à une thérapie comportementale.

Crédit photo : Dr Frances

Romaric, 17 ans, consulte pour obtenir un certificat médical permettant un aménagement horaire car il va passer un concours administratif. Il est accompagné de son père, ce qui l’aide à être rassuré. Il consulte un praticien non connu et a la hantise d’essuyer un refus suite à sa requête.

Il explique de manière très affirmée ses problématiques scolaires (dysorthographie et dyslexie) et, pour que l’on puisse croire ses dires, il nous fournit un certificat émanant d’une orthophoniste attestant de sa situation. Au cours de la consultation, il explique ses difficultés à trouver un travail et exprime ses complexes liés aux vexations scolaires du fait de son handicap.

Cliniquement, nous mettons en évidence une onychophagie importante, mais aussi, au niveau du dos, une zone dépourvue de poils.

Ce qui nous intrigue quelque peu, c’est le fait que la zone dépourvue de poils ne l’est pas en totalité, et que certains d’entre eux semblent coupés à leur base. Cette anomalie cutanée, compte tenu de la présentation de ce patient, est en relation avec une trichotillomanie.

INTRODUCTION

La trichotillomanie se caractérise par des arrachements répétés des poils ou cheveux. Dans la population, la prévalence de ce trouble se situe entre 1 et 2 %. Le plus souvent, il s’agit d’adolescents qui ont entre 10 et 13 ans.

Cependant, cette pathologie peut également être observée chez des enfants, des adolescents plus âgés ou des adultes.

Concernant les adultes, dans 80 à 90 % des cas, il s’agit de femmes.

Le plus fréquemment, la trichotillomanie concerne le cuir chevelu (73 % des cas). Mais les sourcils, les poils pubiens peuvent être concernés par ces arrachements. Les autres zones (dos et thorax) sont plus rarement concernées par cette pathologie.

On peut retrouver une symptomatologie psychiatrique chez ces personnes : anxiété (cas de notre patient), dépression, TDA/H (trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité), TOC (trouble obsessionnel compulsif).

La tricho­tillomanie est un comportement qui est, dans certains cas, chronique.

SYMPTOMATOLOGIE CUTANÉE

On met en évidence, le plus souvent, une aire dépourvue de poils ou de cheveux dont les bords sont mal définis.

Au sein de cette zone, on objective une réduction quantitative des poils ou cheveux (il n’y a cependant jamais de perte totale).

On observe certains cheveux ou poils avec une longueur peu importante, et ils sont parfois cassés au niveau de la base ou sur une partie.

Cette différence de taille reste très aléatoire sur la zone concernée par la trichotillomanie.

Le plus souvent, les zones d’arrachement sont celles qui sont faciles d’accès.

Comme nous le voyons dans notre cas clinique, on peut également mettre en évidence chez ces patients d’autres anomalies de comportement corporel : onychophagie, prurit incontrôlé, mordillement des lèvres.

La trichotillomanie est associée, dans 5 à 20 % des cas, à une trichophagie (ingestion des cheveux ou des poils arrachés) qui peut conduire chez le patient à des nausées, vomissements, douleurs abdominales ou certaines urgences médico-chirurgicales (perforation ou occlusion colique).

TRAITEMENT

Le traitement peut être effectué de deux manières (le plus souvent, on recommande une association des deux types de prise en charge) :

• en administrant certaines thérapeutiques (clomipramine, olanzapine, N-acétylcystéine, pimozide, fluoxétine),

• en proposant au patient une thérapie comportementale (TCC) qui permettra de sensibiliser le patient à son comportement, identifier les éventuels comportements alternatifs et, enfin, assurer la gestion de l’anxiété associée à ce trouble.

Enfin, soulignons qu’il est important que l’entourage (professionnels de santé mais aussi membres de la famille) aient une attitude empathique avec le patient.

Dr Pierre Francès (médecin généraliste à Banyuls-sur-Mer), Dr Robert Gaubert (psychiatre à Perpignan), Oumnia Karim et Emmanuelle Peus (externes à Montpellier)

BIBLIOGRAPHIE
1. Chamberlain SR, Odlaug BL, Boulougouris V, et al. Trichotillomania : Neurobiology and treatment. Neuroscience and Biobehavioral Reviews 2009 ; 33 (6) : 831-842.
2. Fernandes D, Dos Santos Lima MC, Piraccini M, Tosti A. Trichotillomanie : What do we know so far ? Skin Appendage Disorders 2022 ; 8 : 1-7.
3. Jafferany M, Patel A. Therapeutic aspects of trichotillomania : A review of current treatment options.


Source : lequotidiendumedecin.fr