Pédiatrie

LE SYNDROME DE GIANOTTI-CROSTI

Publié le 10/01/2020
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Le syndrome, ou maladie, de Gianotti-Crosti est une pathologie secondaire à une infection virale ou une vaccination, et s’observe le plus souvent chez les enfants de moins de 5 ans. Cliniquement apparaît un exanthème maculo-papuleux isolé qui disparaît généralement au bout d’une à six semaines.
Cliché 1

Cliché 1
Crédit photo : Dr Frances

Léo, 5 ans, est en vacances dans notre station balnéaire. Dix jours avant son arrivée, il a été vacciné contre l’hépatite A en prévision de sa nouvelle vie (il va résider en Asie avec ses parents). Sa mère l’amène en consultation car depuis 24 heures, Léo présente une éruption érythémato-papuleuse aux deux membres inférieurs (cliché 1). Sa mère, qui évoque une réaction au vaccin, souhaite savoir si cette dermatose, asymptomatique par ailleurs, ne risque pas d’avoir des conséquences sur la santé de son enfant. Les caractéristiques cliniques et l’antériorité d’une vaccination contre l’hépatite A nous font penser au syndrome de Gianotti-Crosti.

Cette dermatose, aussi appelée acrodermatite papuleuse infantile ou syndrome papulo-vésiculeux acral, a été décrite pour la première fois en 1955 par Gianotti, un dermatologue italien du service du Pr Crosti. Initialement, cette acrodermatite a été décrite chez un patient ayant une hépatite B, d’où la dénomination de maladie de Gianotti-Crosti. On parle de syndrome pour tous les autres cas sans relation avec le virus de l’hépatite B.

On observe généralement ces lésions chez les enfants entre 1 et 5 ans. Elles ont parfois été décrites chez des adultes, le plus souvent des femmes (possible relation avec un facteur hormonal). Il semble qu’une origine immunologique dirigée contre des agents infectieux viraux, ou au décours d’une vaccination, soit responsable de cette acrodermite.

Parmi les virus pouvant en être responsables : ceux de l’hépatite B, de l’hépatite A, herpès de type 6, de la rubéole, syncytial respiratoire (VRS), coxsackies de type A16, d’Epstein-Barr (virus le plus fréquemment retrouvé aux USA), les entérovirus, les adénovirus, les cytomégalovirus, les parvovirus, les rotavirus, le VIH.

→ Dans certains cas, une vaccination peut induire cette acrodermatite : contre l’hépatite A ou B, l’encéphalite japonaise, ROR, DTP (poliomyélite surtout), BCG.

Compte tenu d’une origine virale prépondérante, il est plus fréquent d’observer une recrudescence de cette dermatose au printemps.

CLINIQUE ET DIAGNOSTIC

Le début est souvent brutal, caractérisé par la survenue de papules planes de couleur chair dont la taille varie entre 2 et 10 mm. Chez les très jeunes enfants, l’exanthème est généralement plus important que chez les enfants plus âgés. Ces papules sont fermes, parfois rugueuses, et disposées de manière symétrique. Elles apparaissent généralement au niveau de la face d’extension des membres. Par la suite, elles peuvent être observées sur les fesses, au niveau palmo-plantaire et sur le visage. Le tronc n’est généralement pas atteint.

Sur les membres, il est possible d’observer des œdèmes (ils font suite à la confluence des papules), tableau pouvant faire penser à une éruption vésiculeuse (qui peut par ailleurs être associée).

Ces papules sont peu, voire non prurigineuses. L’hyperthermie est fugace ou absente.

D’autres manifestations cliniques non dermatologiques peuvent être observées : hépatomégalie, splénomégalie, altération de l’état général, lymphadénopathies diffuses.

Le diagnostic repose sur la clinique et l’interrogatoire du patient.

Une biopsie n’est pas nécessaire car l’analyse est peu spécifique : infiltration de cellules mononuclées au niveau du derme (zone périvasculaire).

Bien entendu, en fonction des facteurs de risque du patient, il faut prescrire des sérologies virales (hépatite B ou VIH notamment).

TRAITEMENT ET ÉVOLUTION

Le traitement est avant tout symptomatique. Il est possible de prescrire des antihistaminiques (en cas de prurit) et des émollients. Les dermocorticoïdes n’ont pas d’impact sur l’évolution, même s’ils peuvent soulager le patient. Bien entendu, en cas d’acrodermatite secondaire à une hépatite B ou une infection VIH, une prise en charge dans une unité d’infectiologie est indispensable.

Une régression des symptômes est souvent observée dans un délai moyen d’une à six semaines. Cette variabilité est liée à l’origine de l’agent infectieux responsable (la régression clinique est plus courte en cas d’hépatite B, par exemple).

Dans certains cas (rares), on observe une persistance des lésions durant plus de trois mois. Enfin, peuvent persister des hypo ou des hyperpigmentations séquellaires à cette dermatose.

Bibliographie

1 - Gourier G, Delcroix F, Hacard F, Nosbaum A, Bérard F, Nicolas JF. Syndrome de Gianotti-Crosti post-vaccinal : une manifestation d’hypersensibilité retardée aux vaccins. Revue Française d’Allergologie 2018 ; 58 (3) : 241.

2 - Mancini AJ, Krowchuk DP. Dermatologie de l’enfant. Ed. Elsevier Masson 2019.

3 - Cohen BA. Dermatologie pédiatrique. Ed. MED’COM 2007.

4 - Snowden J, Badri T. Acrodermatitis papular (Gianotti Crosti Syndrome). Leung AKC, Sergi CM, Lam JM, Leong KF. Gianotti-Crosti syndrome (papular acrodermatitis of childhood) in the era of a viral recrudescence and vaccine opposition. World Journal of Pediatrics 2019 ; 15 (6) : 521-527.

Dr Pierre Frances (médecin généraliste à Banyuls-sur-Mer), Justine Chevier (interne en médecine générale à Montpellier), Harriet Phyllis Pinnegar (interne en médecine générale. Programme Hippokrates, Séville, Espagne).

Source : lequotidiendumedecin.fr