Dermatologie

LES ENVENIMATIONS PAR LES MÉDUSES

Publié le 29/05/2015
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La présence de lésions linéaires vésiculeuses cutanées douloureuses, chez une patiente de 42 ans après une baignade, doit faire penser à une envenimation par contact cutané de cnidaires (méduses).

Marie-Pierre, 42 ans, consulte car elle présente, depuis sa baignade effectuée la veille, des lésions multiples sur les jambes et ses avant-bras très douloureuses (sensation de brûlure permanente et insomniante). Il s’agit en fait de formations linéaires fines, vésiculeuses « en procession », certaines ayant un aspect légèrement mélicériques. Elles donnent l’impression de lanières de fouets (voir photo).

Sur une des jambes les lésions se caractérisent par des placards vésiculeux. Sur cette jambe, la patiente a appliqué de l’eau de source du fait d’une douleur très importante ; application qu’elle a vite suspendue du fait de l’aggravation des lésions, et le développement de vésicules de manière diffuse.

La patiente explique avoir été en contact lors de sa baignade avec plusieurs éléments qui semblaient être des poches plastiques usagées. Ce contact a provoqué, sur le champ, les manifestations cutanées décrites. Cette description clinique correspond à une envenimation par des méduses.

LES ENVENIMATIONS PAR LES CNIDAIRES

Elles sont dues à des contacts avec des invertébrés qui présentent des formations urticantes. Dans la famille des cnidaires nous retrouvons les méduses, les coraux et les siphonophores. En ce qui concerne les méduses, ces dernières se rencontrent dans le monde entier. Sur la côte méditerranéenne, la plus fréquente est la Pelagia noctiluca.

› La méduse présente un corps de près de 10 cm de diamètre. Elle est translucide (ce qui lui donne parfois cet aspect de poche en plastique), et sa couleur varie : rose, brun voire bleue. Huit tentacules mobiles, et munies de cellules urticantes partent du corps. Leur développement suit des cycles de prolifération sur une période de 12 ans.

› Cependant, depuis quelques années la population des méduses en Méditerranée ne suit plus ce cycle et est devenue plus importante. Cette pullulation peut s’expliquer par la raréfaction de leur prédateur naturel (le thon) mais aussi par le réchauffement climatique.

LES MANIFESTATIONS CLINIQUES

La piqûre de méduse en soi ne présente pas de danger vital. En fait tout provient du venin qui est injecté par le nématocyste. Cet organe est localisé sur les tentacules, et leur nombre est très important (plusieurs milliers). Ces formations se comportent comme un harpon. Elles s’agrippent au niveau du revêtement cutané du patient, et injectent leur venin.

› Dès que le venin est injecté, une impression de cuisson très douloureuse apparaît. En parallèle, on observe la présence de lésions à type d’érythème cutané, de vésicules de petite taille au niveau des zones de contact. De ce fait, elles se caractérisent par des traînées linéaires. Ce tableau s’installe rapidement (moins de 30 minutes le plus souvent).

› Cette réaction cutanée peut disparaître au bout de quelques heures. Cependant, lors des envenimations plus massives, des lésions purpuriques et des nécroses cutanées peuvent être objectivées ; elles disparaissent alors plus tardivement (entre 2 semaines et un mois).

› Chez certains patients des lésions cicatricielles peuvent être rencontrées (chéloïdes, atrophies cutanées le plus souvent).

› Nous pouvons également noter chez le patient des signes généraux. Dans des cas extrêmes le sujet peut présenter un choc anaphylactique.

QUEL TRAITEMENT

› Sur la plage, il est conseillé d’appliquer du sable mouillé sur les zones atteintes. On peut également rincer les lésions avec de l’eau de mer.

› En revanche, il ne faut pas les rincer sous le robinet d’eau douce. En effet, le caractère hypotonique de l’eau douce favorise un éclatement des nématocystes ; lesquels en étant détruit larguent du venin. Frotter les zones envenimées est tout à fait déconseillé ; cela favorise l’ouverture des nématocystes, et peut conduire à des nécroses cutanées. Il faut également retirer (avec des gants) les filaments qui ont pu être laissés par la méduse. En effet, les cellules présentes au sein de ces filaments libèrent encore du venin.

› Localement lorsqu’un nettoyage par des antiseptiques des lésions a été effectué, il est possible d’appliquer un dermocorticoïde. En parallèle, nous pouvons prescrire un antihistaminique. Ce dernier, en association avec le dermocorticoïde réduit la douleur provoquée par l’envenimation.

› Enfin, il faut savoir évacuer le patient vers une structure hospitalière dès lors que des manifestations générales importantes sont présentes en raison du risque de choc anaphylactique.

?Dr Pierre Frances (Médecin généraliste, 1 rue Saint Jean-Baptiste 66650 Banyuls-sur-Mer). Catherine Ah-Tech, interne en médecine générale 34000 Montpellier. Suzanne Burgers, interne en médecine générale. Programme Hippokrates. Amsterdam. Pays-Bas. Ana Lo

Source : Le Généraliste: 2723