INTRODUCTION
On dispose depuis plusieurs années d’un outil visant à améliorer la prescription d’imagerie, le GBU (Guide du bon usage des examens d'imagerie médicale), mais sa méthodologie de type HAS est lourde, ce qui le rend difficile à faire évoluer. Un nouvel outil d’aide à la décision médicale, Aderim (Aide à la demande d’examens de radiologie et imagerie médicale), a été présenté en 2021 lors des Journées francophones de radiologie. Ce référentiel de bonnes pratiques est issu d’une collaboration avec les médecins généralistes, qui ont choisi les items et les deux types d’entrée – par motif de consultation et par pathologie –, auxquels s’ajoute une entrée par mots-clés. Des groupes de travail ont été constitués : un par les médecins généralistes, dirigé par le Pr Paul Frappé, président du Collège de la médecine générale (CMG), un autre de la Société française de radiologie et d’imagerie médicale (SFR-IM), des groupes constitués par spécialités d’organes, des groupes de radio-pédiatres, de radio-gériatres et gériatres, et un groupe de radioprotection. Les items comportant des examens de médecine nucléaire ont été également validés par la Société française de médecine nucléaire.
L’objectif est d’aider le médecin généraliste au mieux dans sa demande d’examen, en remettant bien l’imagerie en perspective avec l’examen clinique, et en expliquant la pertinence des choix, ce qui pour certains items a amené à préciser clairement, et ceci est nouveau, « pas d’imagerie dans tel ou tel cas ou en l’absence de tels ou tels symptômes ». Ce référentiel ne remplace pas le contact direct entre généralistes et radiologues lorsque certains symptômes soulèvent des interrogations. Le radiologue est un médecin et il reste donc le mieux placé pour choisir le meilleur examen en fonction de la pathologie ou d’un symptôme donné, d’où l’importance du dialogue mais également d’une demande détaillée de la part du médecin généraliste.
Pour continuer de travailler au plus près avec les médecins généralistes et tenir compte de leurs problématiques, ces derniers sont invités à faire part de leurs remarques et commentaires directement sur le site, ce qui amènera à faire évoluer sans cesse cet outil. L’Aderim est en effet disponible en ligne (aderim.radiologie.fr) et devrait l’être bientôt sur la plateforme de recommandations de médecine générale (ebmfrance.net).
LES BONNES PRATIQUES EN IMAGERIE DIGESTIVE
Dans la liste des symptômes ou des pathologies concernant l’appareil digestif, les items peuvent être différenciés selon leur caractère aigu ou chronique, ou selon qu’il s’agit d’un enfant, d’un adulte ou d’une personne âgée. Le niveau de dose d’exposition est également précisé. Il est d’autant plus important de pouvoir faire évoluer ce guide que de plus en plus de scanners peuvent être réalisés en basse dose. Les indications de l’imagerie ont été également hiérarchisées selon le degré d’urgence : priorité 1 en urgence, priorité 2 dans les jours qui suivent, priorité 3 dans le cadre d’un bilan classique.
Globalement, on remarque que l’ASP (abdomen sans préparation) n’a pratiquement plus de place en pathologie digestive, que la tomodensitométrie (TDM) est l’examen clé pour les urgences et que si l’imagerie par résonance magnétique (IRM) a déjà des indications et que d’autres se développent comme l’entéro-IRM, il persiste dans bien des cas des problèmes d’accès à l’IRM.
L’ASP n'a aucune indication dans les douleurs abdominales, les hémorragies digestives, les suspicions d'appendicite, les occlusions ou suspicions d’occlusion ou tout autre syndrome abdominal aigu (recommandations HAS). Quelques rares indications persistent, comme la constipation chez le sujet âgé pour rechercher un fécalome ou l’ingestion de corps étrangers radio-opaques.
L’échographie a encore toute sa place dans l’exploration des voies biliaires, de la vésicule et de l’intestin (expertise particulière), ainsi que dans les douleurs abdomino-pelviennes chez un sujet mince, et tout particulièrement chez une femme jeune où l’échographie endovaginale peut aider au diagnostic différentiel avec une pathologie gynécologique.
Le scanner est l’examen clé des urgences abdominales chez l’adulte.
L’IRM n’a pas encore d’indications formelles en urgence en dehors de la douleur abdomino-pelvienne chez la femme enceinte mais, si elle est disponible, elle peut avoir sa place dans l’exploration des voies biliaires, du pancréas et de la douleur abdomino-pelvienne de la femme jeune.
LES ITEMS PAR LA SYMPTOMATOLOGIE
Constipation
• Chez l'enfant, ni l’ASP ni l’échographie n’ont d’intérêt. En cas de suspicion de maladie de Hirschsprung, le lavement opaque, la rectomanométrie et les biopsies rectales peuvent être utiles. Il n’y a que chez le sujet âgé que l’ASP peut être intéressant pour rechercher un fécalome.
Diarrhée
• Chez l’enfant, aucune imagerie n’est indiquée dans la diarrhée aiguë, qui relève essentiellement de causes infectieuses.
Toujours chez l’enfant, en cas de diarrhée chronique, on demande une échographie abdominale en première intention, une entéro-IRM lorsque l’échographie est peu contributive ou si on suspecte une maladie intestinale inflammatoire chronique devant des diarrhées chroniques glairo-sanglantes.
• Chez l’adulte, une diarrhée chronique peut faire suspecter une MICI ou un cancer colo-rectal qui demandent un avis spécialisé (se référer au mot-clé par entrée « diarrhée » dans le moteur de recherche du site).
Douleur abdominale
• Devant une douleur abdominale aiguë, le scanner abdomino-pelvien en urgence est l’examen de première intention, quel que soit l’âge.
L’échographie en urgence peut être demandée en premier si on suspecte une pathologie gynécologique. En 2e intention, l’échographie est très intéressante chez les sujets jeunes et minces ou si l’on suspecte une pathologie biliaire ou appendiculaire.
En cas de contre-indication affirmée aux produits de contraste, un scanner sans injection peut être proposé plutôt qu’une échographie, sauf s’il existe une orientation diagnostique précise (pathologie biliaire).
Si l’examen clinique est normal chez l’enfant, l’ASP et le scanner abdomino-pelvien n’ont pas d’indication.
• Devant une douleur chronique chez l'adulte, l’échographie doppler abdomino-pelvienne reste l’examen de 1re intention mais il est souvent peu rentable. Le scanner abdomino-pelvien sera demandé rapidement en 2e intention en cas de signes associés cliniques (diarrhée, alternance diarrhée/constipation, ictère, vomissement, perte de poids…) ou biologiques (syndrome inflammatoire, anémie, cholestase…).
LES ITEMS PAR PATHOLOGIE
Appendicite
• Chez l'enfant
L’ASP n’a pas d’indication car peu contributif pour le diagnostic.
De manière générale, si la symptomatologie est typique, l’imagerie n’a aucune place.
Si le tableau est atypique, on demande en 1re intention une échographie abdominale qui permet de confirmer le diagnostic et rechercher une complication type plastron ou collection.
Le scanner n’est pas indiqué en 1re intention chez l’enfant car il est moins performant que l’échographie pour le diagnostic d’appendicite. Il peut être demandé en cas de difficultés diagnostiques ou chez un patient obèse. L’IRM abdominale pourrait constituer une alternative intéressante chez l’enfant, mais on en dispose rarement en urgence.
• Chez l'adulte
L’imagerie n’a pas de place non plus si le tableau est typique, ce qui est plus rare que chez l’enfant.
L'échographie doit être préférée chez un sujet jeune, mince et lorsqu'un seul diagnostic est évoqué, et en 2e intention une TDM si l’échographie ne montre pas clairement l’appendice.
Le scanner abdomino-pelvien peut être réalisé en 1re intention chez le patient âgé.
Hernie hiatale
L’imagerie n’a pas sa place en 1re intention car le diagnostic repose sur l’endoscopie. Le scanner thoraco-abdominal est indiqué en 2e intention, en pré-opératoire à la demande du chirurgien ou si l’endoscopie a montré certaines particularités (très grosse hernie, masse associée…).
Hernie inguinale
• Chez l'enfant, l’examen clinique est généralement suffisant. L’échographie inguinale peut être indiquée dans certains cas après avis spécialisé (doute avec une pathologie scrotale).
• Chez l’adulte, l’imagerie est inutile en 1re intention mais une échographie doppler pariétale peut être demandée en cas de doute diagnostique ou en pré-opératoire.
Dr Maia Bovard-Gouffrant (rédactrice), Pr Anne Cotten (relecture - secrétaire générale de la Société française de radiologie)
BIBLIOGRAPHIE
1. Aide à la demande d’examens de radiologie et imagerie médicale (Aderim), Société française de radiologie et d’imagerie médicale, Référentiels de bonnes pratiques à l'usage des médecins. https://aderim.radiologie.fr/home
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