Cardiologie

Maladie coronarienne : aucun marqueur en ville

Publié le 08/10/2010
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Du dosage des CPK-MB à celui de la troponine en passant par la LDH, quel(s) marqueur(s) ont fait leurs preuves en ambulatoire dans la maladie coronarienne ? Réponse de la HAS (1).

À la demande de la CNAMTS, la HAS s'est penchée sur le thème de la stratégie de prescription des marqueurs cardiaques dans les différentes pathologies cardiaques, et notamment dans les domaines de la maladie coronarienne et de l'insuffisance cardiaque en ambulatoire. Les données de l’Assurance-maladie permettent en effet de suspecter un usage trop important des marqueurs usuels, à savoir la LDH, la CPK totale, l’ASAT, la troponine, la myoglobine, la CK-MB, le BNP et le NT-proBNP. La CRP ultrasensible a été incluse en plus des marqueurs cardiaques usuels (1).

LES MARQUEURS DISPONIBLES (2)

Les anciens marqueurs cardiaques

Ce sont l'ASAT, la LDH et la CPK. L'ASAT (aspartate amino transférase) est présente surtout dans le foie, le myocarde et le muscle squelettique. Une lyse de ces organes entraîne une augmentation de ce marqueur dans le sang. La LDH (lactate déshydrogénase) se trouve dans les reins, le cœur, les muscles, le pancréas, la rate, le foie. La CPK (créatine phosphokinase) totale est retrouvée dans les muscles squelettiques et cardiaques.

Les marqueurs utilisés actuellement

Ce sont la myoglobine, la troponine et la CK-MB massique.

-› La myoglobine, présente dans les muscles striés (muscles squelettiques et myocarde), est le marqueur le plus précoce en cas d'infarctus du myocarde. Elle augmente environ 2 heures après la constitution de l'infarctus pour atteindre sa valeur maximale entre 4 et 12 heures et rejoint son niveau normal après 24 heures. Le dosage de la myoglobine dans le sérum est donc utilisé pour le diagnostic précoce de l’infarctus aigu du myocarde, mais aussi pour détecter une récidive précoce d’infarctus et pour attester du succès de la reperfusion après thrombolyse. Mais une augmentation du taux de myoglobine peut aussi se rencontrer lors de lésions des muscles squelettiques ou dans les insuffisances rénales graves. D'où une faible spécificité diagnostique de la myoglobine.

-› La CK-MB (créatine kinase MB) est une des 3 isoenzymes de la CPK. L ’isomère MB prédomine au niveau du myocarde mais sans en être spécifique (également retrouvé dans le muscle squelettique, la rate et la prostate). Les techniques massiques (plus sensibles que la mesure de l'activité de la CK-MB) permettent de le retrouver dans les 3 à 12 heures après un infarctus du myocarde avec un pic vers 24 heures et un retour à la normale dans les 72 heures. Le dosage de la CK-MB serait utile dans le diagnostic précoce de l’infarctus du myocarde, sans être aussi sensible que la myoglobine dans cet usage, dans l’estimation du moment de survenue de l’infarctus, de sa taille et de son extension, et dans le diagnostic de récidive d’infarctus.

-› Les troponines (T, C, I) sont des protéines constitutives des myocytes. Le troponine T a elle-même deux isoformes : une pour les muscles striés et une pour le myocarde (cTnT). La cTnI, isoforme de la troponine I, a été identifiée dans le myocarde. Après un infarctus du myocarde, les taux de cTnT et cTnI s’élèvent après 2 à 4 heures, avec un pic plasmatique vers 14 heures, et restent élevés pendant 75 à 140 h pour la troponine I et plus de 10 jours pour la troponine T. Les troponines ont de nombreuses utilisations, tant au cours de la maladie coronarienne (diagnostic, détection des complications, évaluation du succès du traitement) que dans les domaines de la chirurgie cardiaque ou non cardiaque, de la radiologie interventionnelle (effets délétères myocardiques), de l'insuffisance cardiaque, l'embolie pulmonaire, la myocardite, la péricardite…, ainsi que dans les situations d'intoxication, d'électrisation ou de traumatisme thoracique.

-› Parmi les peptides natriurétiques, le BNP (brain natriuretic peptide) et le NT-proBNP (N-Terminal pro-brain natriuretic peptide), utilisés au cours de l'insuffisance cardiaque, sont répertoriés dans la littérature comme permettant d'évaluer le pronostic de morbimortalité dans le syndrome coronarien aigu.

La CRP ultrasensible (CRP us)

La protéine C-réactive (CRP), synthétisée dans le foie, est une protéine de l'inflammation aiguë. Les dosages ultrasensibles (concentrations comprises entre 0,01 mg/l et quelques dizaines de mg/l) peuvent être utilisés comme marqueur pronostique dans les pathologies coronariennes et pour la stratification du risque en prévention primaire.

SCA : AUCUN MARQUEUR EN VILLE

-› La HAS conclut de la façon suivante (1) : le dosage des marqueurs de nécrose myocardique "n’est pas indiqué dans la prise en charge de la suspicion de syndrome coronarien aigu (SCA) en médecine ambulatoire, celle-ci reposant principalement sur un appel au SAMU – centre 15. La seule exception est le cas où un patient asymptomatique consulte pour une douleur thoracique survenue plus de 72 heures auparavant, qu’on suspecte avoir été un SCA sans complication et lorsque l’ECG réalisé n’est pas contributif. Dans ce cas, le bilan réalisé peut inclure le dosage sanguin d’une troponine (cTnI ou cTnT) ; le dosage des autres marqueurs de nécrose myocardique (ASAT, LDH, CPK totale, CK-MB activité et massique, myoglobine) n’est pas indiqué en raison de leurs moins bonnes spécificités".

"Cependant, les filières d’urgence de la médecine ambulatoire (SOS médecin, médecins affiliés Samu) ne sont pas concernées par la non-indication du dosage des marqueurs de nécrose myocardique en cas de suspicion de SCA s’ils possèdent un automate mobile de dosage, car ils interviennent en concertation avec le SAMU - centre 15, selon des procédures bien établies".

-› Concernant les peptides natriurétiques, leur dosage "n’est pas indiqué dans le pronostic de la maladie coronarienne chronique stable, faute de données permettant de statuer sur leur éventuelle place en pratique clinique".

-› Enfin, "en l’état actuel des connaissances, le dosage de la CRP us n’est pas indiqué dans la prévention primaire de la maladie coronarienne. Faute de données suffisantes, il n’a pas été démontré que l’utilisation de la CRP us dans le cadre de la prédiction du risque améliore les résultats cliniques comparativement à une stratégie ne l’utilisant pas".

Synthèse du Dr Pascale Naudin-Rousselle (rédactrice, fmc@legeneraliste.fr)

Source : lequotidiendumedecin.fr