Repère patients

Pourquoi ne pas dépister le cancer de la prostate

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Publié le 07/10/2016
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Rien de systématique. Aucun homme ne devrait s’engager dans une démarche de dépistage sans avoir été tenu informé de l’ensemble des bénéfices et des limites du dosage du PSA, rappelle une recommandation de mars dernier cosignée par l’INCA, la HAS, l’Assurance Maladie et le Collège de la Médecine générale.

J’INFORME

Le cancer de la prostate est le cancer le plus fréquent chez les hommes (28 % des cancers) mais pas le plus meurtrier. Il se situe au 3e rang en terme de mortalité par cancer chez l’homme.
 
Ce cancer possède la particularité d’avoir majoritairement une évolution lente (10 à 15 ans avant les premiers symptômes), d’être asymptomatique le plus souvent et de ne pas engager le pronostic vital. De ce fait, plus de 3 décès sur 4 par cancer de la prostate surviennent après 75 ans. L’âge moyen du décès par cancer prostatique est estimé à 83 ans.
 
Toutefois, certaines formes sont agressives et létales. On ne sait pas à ce jour identifier parmi les tumeurs asymptomatiques celles qui seront latentes de celles qui évolueront rapidement.
 
Il touche plus fréquemment les hommes ayant des antécédents familiaux (père, fils, frère, etc.) et les hommes d’origine africaine ou antillaise.

JE MONTRE

J’EXPLIQUE

Le prostate specific antigen (PSA) ou antigène spécifique de la prostate est une molécule sécrétée exclusivement par la prostate, découverte en 1960 et utilisé dans la prise en charge du cancer de prostate. Des les années 2000, la question de l’utilité de ce dosage sanguin pour dépister le cancer de la prostate a été posée, en association au toucher rectal. Le seuil de PSA sérique total supérieur à 4ng/mL et/ou une anomalie du toucher rectal se sont rapidement imposés comme devant amener à aller plus loin.
 
Il est vrai qu’un taux de PSA inférieur à 4ng/mL est le plus souvent rassurant : dans 90 % des cas, ce taux signifie qu’il n’y a pas de cancer. A contrario, cet examen peut rassurer à tort : 10 % des hommes ayant un taux de PSA faible ont en réalité un cancer de la prostate. Sans compter que le TR n’aide pas forcément à rectifier cette marge d’erreur : normal, il n’exclut pas un cancer car cet examen ne permet de détecter que des tumeurs suffisamment volumineuses pour être palpables.
 
Un taux de PSA supérieur à 4 ng/mL peut être lié à la présence d’un cancer et donc permettre de le détecter à un stade précoce, avant l’apparition d’éventuels symptômes. Mais un taux élevé ne signifie pas pour autant cancer : 3 hommes sur 10 en auront un et 7 sur 10 n’en n’auront pas.
 
Par ailleurs, d’autres maladies bénignes (adénome, prostatite ou infection urinaire) peuvent aussi augmenter le taux de PSA.
 
Toute anomalie détectée entraîne la réalisation d’une biopsie. À ce jour, c’est le seul examen validé pour confirmer ou non la présence de cellules cancéreuses. Désagréable, il peut générer des complications transitoires : hématurie, hémospermie, infection urinaire ou prostatite (moins de 1 % des cas). Mais, surtout, dans 20 % des cas, cette biopsie est faussement rassurante.


 J’ALERTE

La principale difficulté de ce dépistage réside donc dans l’évaluation de son bénéfice en regard des risques de surdiagnostic et de surtraitement.
 
En moyenne, un cancer dépisté par dosage du PSA avance le diagnostic de 7 ans par rapport à un diagnostic sur symptôme. Autant d’années où le patient devient « malade du cancer », subit les inconvénients et les séquelles de la prise en charge sans pour autant augmenter sa survie.
 
Parmi les hommes de 50 à 69 ans traités pour cancer de la prostate en 2012 en France, 50 % ont présenté une ou plusieurs complications nécessitant un traitement avec notamment des troubles de l’érection pour 34 % des hommes, une incontinence urinaire pour 21 %.
 
Et une méta-analyse d’études visant à évaluer l’impact d’un programme de dépistage systématique du cancer de la prostate par le PSA sur la mortalité n’a pas mis en évidence d’effet significatif sur la réduction du taux de décès. Pour ces raisons, le dépistage systématique n’est pas recommandé par les autorités sanitaires françaises (INCA, HAS, CNAMTS) et par le Collège de la Médecine Générale. Et aucune autre agence ou autorité sanitaire dans le monde ne le préconise non plus.
 
Le bénéfice d’un dépistage individuel par le PSA doit être discuté au regard des examens et des traitements auxquels seraient soumis les patients si un cancer était détecté.
 

JE RENVOIE SUR LE NET

1- Institut National du Cancer : Le dépistage du cancer de la prostate - S'informer avant de décider

 


Source : lequotidiendumedecin.fr