Avec 3 068 cas estimés pour l’année 2005 (3 295 cas en 2000), le cancer du col de l’utérus est le 10ème cancer chez la femme par sa fréquence, et le 9ème en terme d’incidence (7,1 pour 100 000 femmes en 2005, 7,8 pour 100 000 femmes en 2000). Pour l’année 2005, le cancer du col de l’utérus est le 15ème cancer le plus meurtrier chez la femme avec 1 067 décès estimés (1).
Entre 1980 et 2005, le taux d’incidence de ce cancer a diminué de façon importante avec un taux annuel moyen de décroissance de 2,9 %, tandis que le taux de mortalité a diminué de 4,0 % par an. Mais cette décroissance a tendance à se ralentir depuis 2000. Concernant les lésions histologiques précancéreuses, leur incidence n’est pas connue en France (1) (voir aussi encadré 1).
APRES UN FROTTIS ANORMAL
Les résultats des frottis cervico-utérins sont formulés selon la classification de Bethesda 2001 (encadré 2).
Qui adresser en colposcopie ?
"Stricto sensu, ce n'est jamais une erreur de demander une colposcopie en présence d'un frottis anormal, explique le Pr Baldauf. Mais compte tenu du fait que les lésions de bas grade (LSIL) et les lésions de signification indéterminée (ASC-US) représentent 90 % des anomalies observées, le risque est grand en pratique d'emboliser les consultations gynécologiques. C'est pourquoi il est justifié dans certaines situations de passer par une procédure de triage préalable".
- Parmi les anomalies cytologiques susceptibles d'être observées, quatre catégories justifient d'orienter d'emblée la patiente vers la réalisation d'une colposcopie.
Ce sont les lésions malpighiennes de haut grade (ASC-H et HSIL), les lésions évocatrices de cancer dès le stade de frottis, et les atypies glandulaires quelle qu'en soit la sévérité.
Inversement, deux catégories permettent de surseoir à la colposcopie et de suivre une démarche basée sur le contrôle du frottis cervico-utérin (bien que la colposcopie d'emblée reste une option possible) : ce sont les ASC-US (voir figure 1) et les LSIL. Le 1er frottis de contrôle est dans ces cas effectué à 6 mois.
"Pour autant, la normalité de ce 1er contrôle n'est pas suffisante pour innocenter le col et rassurer la patiente ; un 2ème contrôle est nécessaire 6 mois après, puis un 3ème 6 à 12 mois plus tard. Ce n'est que lorsque tousces frottis de contrôle sont normaux que le rythme habituel de surveillance (triennal) peut être repris. Retenons aussi que si dans l'histoire d'une femme, on a observé à 2 reprises un frottis anormal, quelle qu'en soit la sévérité et même si des frottis normaux ont été réalisés dans l'intervalle, la colposcopie s'impose".
- Les ASC-US peuvent être pris en charge selon une 3ème voie, la recherche d'HPV oncogènes (test remboursé dans cette indication), qui s'ajoute à la surveillance cytologique et à la colposcopie d'emblée. Si cette recherche est positive, la probabilité de trouver des lésions significatives (CIN 2 et 3) à la colposcopie est de 40 %. Si elle est négative, ce pourcentage chute à environ 1 %, et l'on peut rassurer la patiente, sous réserve de réaliser un frottis de contrôle 6 mois plus tard.
- Pour les LSIL (arbre décisionnel disponible dans les recommandations de l'Anaes, réf 2), deux options sont initialement possibles : surveillance par frottis (avec 3 frottis de contrôle comme indiqué plus haut) et colposcopie dès qu'une anomalie est décelée, ou colposcopie d'emblée. La recherche d'HPV oncogènes n'est pas pertinente dans ce cas. "Elle serait en effet positive dans 70 à 80 % des cas.. Elle reste possible en 3ème intention à la demande du spécialiste, notamment en cas de colposcopie non satisfaisante, dans le but d'apporter des éléments diagnostiques complémentaires".
Le trépied diagnostique : frottis – colposcopie – biopsie
- La conduite à tenir tient toujours compte des résultats obtenus à ces trois examens. En effet, le frottis à lui seul n'est pas assez fiable pour apprécier la sévérité d'une lésion. La colposcopie permet de repérer les zones anormales et de diriger les biopsies. Mais elle peut être non satisfaisante, notamment si la jonction pavimento-cylindrique est mal ou non visualisée. Une partie de la lésion reste alors cachée à l'œil de l'examinateur. Quant à la biopsie, elle peut être prise en défaut si la profondeur du prélèvement n'est pas suffisante (par exemple il faut aller à au moins 5 mm de profondeur pour différencier une lésion micro-invasive d’une authentique lésion invasive [voir infra la classification FIGO]), ou s'il existe des zones pathologiques non concernées par la biopsie. Les trois éléments - frottis – colposcopie – biopsie - doivent donc être concordants. En cas de discordance, une exérèse de la lésion - en pratique une conisation - est nécessaire afin d'obtenir un diagnostic histologique de certitude (2).
- En pratique, la biopsie ne suffit pas au diagnostic dans deux situations : les cancers épidermoïdes micro-invasifs et les adénocarcinomes in situ. Ces derniers sont des lésions glandulaires pré-invasives, de diagnostic difficile, qui requièrent une conisation haute pour être sûr d'enlever la totalité de la lésion".
LA PRISE EN CHARGE DES LESIONS CIN
CIN 1 : attention au sur-traitement
La classification CIN (néoplasie cervicale intra-épithéliale) est une classification histologique. Le stade CIN 1 correspond à la dysplasie légère, CIN 2 à la dysplasie modérée, CIN 3 à la dysplasie sévère et au carcinome intra-épithélial (in situ). "Une fois le diagnostic posé, la destruction de la lésion (versus exérèse) est réservée aux situations où l'on a la certitude qu'il n'existe aucun risque de lésion cancéreuse, à savoir les CIN 1. Ces lésions toutefois ont un fort potentiel de guérison spontanée (60 à 70 %), pour peu que l'on attende suffisamment longtemps".
Le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF), dans ses dernières recommandations (3), insiste en effet sur le risque de sur-traitement des lésions CIN 1, et propose de réserver le traitement par destruction aux cas où le frottis reste anormal au bout de 18 mois. "Sous réserve bien sûr que la patiente présente toutes les caractéristiques permettant d'exclure une pathologie plus sévère. La lésion doit donc être vue en totalité, la jonction pavimento-cylindrique doit être visible, et les 3 examens (frottis, colposcopie, histologie) doivent concorder pour indiquer que la lésion est bien de bas grade. On peut alors opter pour une surveillance tous les 6 mois par frottis et colposcopie".
Au bout de 18 mois, le traitement de prédilection est la vaporisation laser, qui mieux que la cryothérapie ou l'électrocoagulation, permet de contrôler la profondeur de la destruction : le geste doit concerner la muqueuse sur 7 mm de profondeur. Ce type de traitement ne permet pas l’analyse histologique complémentaire. Si la jonction n'est pas visible en colposcopie, la conisation est de mise. Lorsque la lésion s'aggrave avant le terme des 18 mois, l'exérèse s'impose sans attendre davantage (2).
CIN 2 et 3 : la conisation s'impose
"Pour les lésions de haut grade, on privilégie la conisation à l'anse diathermique, avec le souci d'économiser le tissu normal. Mais les limites de la conisation doivent être saines, l'analyse anatomopathologique déterminant le caractère complet ou non de l'exérèse. Si la coupe n'est pas in sano, les tissus pathologiques restés en place sont toujours susceptibles d'être atteints plus sévèrement que ceux ôtés par la résection. On recommande des marges de résection de 5 mm pour les cancers micro-invasifs, et de 1 cm pour les lésions glandulaires".
Le suivi après conisation doit être rigoureux, afin de ne pas méconnaître une lésion récidivante ou une lésion persistante ayant échappé à l'analyse anatomopathologique. "Quatre à six mois après la conisation, on effectue un frottis de contrôle et une colposcopie, puis de nouveau l'année suivante. Si les deux résultats sont normaux, la probabilité de lésion résiduelle ou de récidive est très faible, mais nous recommandons de réaliser un frottis par an pendant les 20 années qui suivent. Les performances de l'association frottis cervico-utérin + test HPV pour le suivi après traitement pour CIN de haut grade sont encore en cours d'évaluation".
LES CANCERS MICRO-INVASIFS ET INVASIFS
La classification des cancers épidermoïdes du col utérin est celle de la Fédération internationale d’Obstétrique et de Gynécologie (FIGO) (encadré 3).
L'examen le plus utile pour le bilan d'extension des cancers du col est l'IRM pelvienne. Elle mesure la taille exacte de la tumeur, évalue le degré d'infiltration des paramètres et des organes voisins, et recherche d'éventuelles adénopathies pelviennes.
En cas de carcinome micro-invasif (stade IA)
Ce diagnostic ne peut être porté qu'après examen d'une pièce de conisation dont les marges se sont révélées saines. La biopsie ne suffit pas. Pour guider la conduite à tenir, l'anatomopathologiste doit également préciser s'il existe un envahissement des espaces lymphovasculaires. "Dans la négative, pour le stade IA1, le risque d'atteinte ganglionnaire est quasi nul (< 0,5 %). Si par contre les espaces lymphovasculaires sont envahis, ce risque s'élève entre 3 et 8 %. Il est donc nécessaire d'aller prélever, généralement sous coelioscopie les relais ganglionnaires pelviens. Si les ganglions sont sains, le traitement peut s'arrêter là. Dans le cas contraire, il faut réaliser une hystérectomie élargie aux paramètres. Si la coupe n'est pas in sano, il est recommandé de faire une seconde conisation afin de compléter le diagnostic. Pour les stades IA2, nous préconisons de vérifier l'état des ganglions, qu'il y ait ou non un envahissement des espaces lymphovasculaires sur la pièce de conisation".
En cas de cancer invasif
Le traitement dépend du stade de la tumeur et du statut ganglionnaire. Pour un même stade, plusieurs variantes thérapeutiques sont possibles, et un référentiel a été élaboré par la Société française d'oncologie gynécologique (5).
Pour les stades IA2 et les cancers localement peu avancés (IB1), la chirurgie constitue habituellement le traitement de 1ère intention. Il s'agit d'une hystérectomie élargie aux paramètres à laquelle on associe une lymphadénectomie pelvienne. Le statut ganglionnaire détermine ensuite la nécessité d'une radiothérapie adjuvante. La radiothérapie et/ou la curiethérapie endocavitaire utéro-vaginale de 1ère intention sont des options possibles.
Une technique chirurgicale particulière est la trachélectomie élargie, qui consiste à enlever la totalité du col utérin (et pas seulement une partie comme dans la conisation) et les paramètres. Associée à une lymphadénectomie pelvienne per-cœlioscopique, cette méthode conservatrice s'adresse à certaines tumeurs de stade IB1 de moins de 2 cm, sans atteinte ganglionnaire. Elle permet de préserver la fertilité. Un cerclage est posé dès la fin de l'intervention.
Pour les cancers localement évolués, c'est-à-dire dès le stade IB2, ou en cas d'atteinte ganglionnaire ou de métastases à distance, on commence généralement par une radiochimiothérapie néoadjuvante, après quoi on réalise une exérèse chirurgicale sur le reliquat. Les médicaments de chimiothérapie sont utilisés en monothérapie ou en association : sels de platine, alkylants, bléomycine, paclitaxel, gemcitabine, vinorelbine, topotécan, irinotécan.
La surveillance après traitement a lieu tous les 4 mois pendant 2 ans, puis tous les 6 mois pendant 3 ans, puis annuellement (5).
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