Le cabinet médical en pleine mutation

Les libéraux de santé gagnés par la culture entrepreneuriale

Publié le 30/05/2011
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Crédit photo : S Toubon

L’ENTREPRISE et le soin médical peuvent-ils faire bon ménage ? À en croire les intervenants – médecins, dentistes, kinés, experts... – qui se sont exprimés lors d’un colloque à l’initiave du CNPS, la réponse ne fait aucun doute et c’est même une évolution inéluctable du secteur libéral de santé. « Le modèle du professionnel libéral en solo, rémunéré uniquement à l’acte, est déjà en train de devenir minoritaire, avance l’économiste de la santé Claude Le Pen. L’exercice en cabinet de groupe, plus hiérarchisé, contractualisé qui se développe depuis longtemps chez les avocats, les architectes ou les experts comptables présente de nombreux avantages. Une plus grande variété de services, la mutualisation des moyens, davantage de lisibilité pour les clients, une solidarité de recettes, une possibilité de carrière… » Il est donc « inévitable » que la mutation s’opère aussi dans le secteur santé.

Michel Bergougnoux, trésorier général de la Confédération nationale des syndicats dentaires (CNSD), abonde en ce sens. « Un chirurgien-dentiste, ça gère évidemment une entreprise de santé, ce n’est pas un choix mais une nécessité. La mise en commun des moyens techniques et humains nous permet de faire face aux charges sociales, fiscales et de sécurité et de répondre aux normes. Un cabinet dentaire, c’est

250 000 euros de chiffre d’affaires en moyenne mais c’est aussi 65 % de frais ! Dans ces conditions, le petit cabinet d’il y a 20 ans, monté ici ou là, c’est terminé !  »

Nouvel outil.

Adoptée en première lecture, la proposition de loi du sénateur UMP Jean-Pierre Fourcade prévoit justement un nouvel outil juridique, la SISA (société interprofessionnelle de soins ambulatoires), afin de favoriser l’exercice regroupé pluriprofessionnel. Et donc l’esprit d’entreprise. « Cela n’a pas été simple, explique le sénateur Fourcade. On a réglé les problèmes fiscaux, le partage d’honoraires, l’association des jeunes, la RCP… Si on veut que les jeunes reviennent vers l’exercice libéral, il faut leur donner de bons outils. »

Le Dr Michel Chassang, président du CNPS et de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF), se dit partisan d’un « nouveau contrat avec l’assurance-maladie qui valorise l’exercice médical libéral et la culture entrepreneuriale ». Les négociations conventionnelles sont en cours. La diversification de la rémunération des médecins libéraux peut être un « levier puissant » d’évolution des comportements, admet le Dr Chassang. A cet égard, la réforme commune que viennent de proposer la CSMF et le SML (« le Quotidien » du 27 mai) comporte, pour la première fois, une part significative de paiement à la performance, sous forme d’option individuelle, qui pourrait représenter « 20 % de la rémunération du médecin », explique Michel Chassang. Le projet des deux syndicats va encore plus loin puisqu’il envisage un contrat « médecin entrepreneur », basé sur la réorganisation du cabinet, la délégation de tâches et de nouveaux métiers. Ce projet inclurait la « gestion [par le cabinet] d’une enveloppe annuelle de soins secondaires ». Une piste de réflexion, copiée sur le système anglais, qui montre à quel point les mentalités evoluent.

> CYRILLE DUPUIS

Source : Le Quotidien du Médecin: 8973