« Zéro sexisme », « zéro harcèlement » : la contre-attaque des internes pour briser le tabou et porter plainte

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Publié le 20/11/2017
SEXISME

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Crédit photo : S. Toubon

Après la publication de l'enquête édifiante dénonçant la banalisation du sexisme et du harcèlement sexuel au cours du cursus, l'Intersyndicale nationale des internes (ISNI) a avancé une dizaine de mesures concrètes pour lutter contre ces agissements coupables, lors de son Université de rentrée qui s'est tenue samedi 18 novembre à Montpellier. Le syndicat des internes réclame au gouvernement « un plan d'action complet pour en finir avec le sexisme et le harcèlement dans les études médicales »

Les internes proposent en premier lieu d'organiser une campagne nationale de sensibilisation au harcèlement sexuel au travail avec un volet spécifique aux hôpitaux. « Le rôle de la médecine du travail dans l'établissement doit être de plus en plus important », insiste Alizée Porto, qui a piloté l'enquête sur le sexisme dans les études.

Une aide pour porter plainte

L'ISNI recommande ensuite de créer un « outil informatique anonyme » de signalement – application ou numéro de téléphone unique d'appel – permettant aux victimes et témoins de déclarer des faits de harcèlement. « Très peu de victimes portent plainte pour harcèlement sexuel », rappelle Alizée Porto. L'enquête révèle qu'une procédure judiciaire a été initiée dans 0,15 % des cas seulement.

La structure jeune désire également que les victimes soient accompagnées « gratuitement pour augmenter les procédures judiciaires ». « Nous allons effectuer un travail avec la Fédération hospitalière de France (FHF) afin de mettre à disposition les services juridiques d'établissements hospitaliers en continu », dévoile Alizée Porto.

Autre proposition : un espace physique d'échange « de lutte contre le sexisme » (dans chaque établissement ou université)  pour décider et promouvoir les actions à mener contre les discriminations.

Veille nationale

C'est surtout la libération systématique de la parole que l'ISNi encourage. Il faut « briser le tabou », « ne faut plus accepter la moindre remarque ou blague sexiste », commente Alizée Porto. Le syndicat souhaite que de nouvelles enquêtes nationales ou locales soient conduites pour objectiver ces faits. « Il faudra créer un registre et une veille nationale à ce sujet », poursuit-elle.

Les futurs médecins souhaitent aussi lancer une campagne de sensibilisation auprès du personnel soignant et des usagers « en plaçant de grandes affiches dans les établissements disant "stop au sexisme" », explique la jeune femme, ajoutant que le CH de Thuir dans les Pyrénées-Orientales le fait déjà.

Selon l'ISNI, il est également impératif d'accompagner la maternité et la paternité des médecins en formation sans « qu'il y ait d'influence sur la carrière professionnelle », ce qui suppose aussi de remplacer « systématiquement tout départ en congé maternité à compétence égale ».

L'hôpital à part ?

Les jeunes appellent de leurs vœux une réflexion sur la normalisation de l'accès aux postes hospitalo-universitaires et à responsabilité. L'enquête montre que 60 % des hommes – contre 45 % des femmes – se sont vu proposer un poste de chef de clinique. « Pourquoi ne pas faire des candidatures anonymes pour certains postes ? », lance le syndicat.

L'ISNI ajoute que des enseignements sur le sexisme et les autres formes de discrimination doivent être instaurés tout au long de la scolarité. « On ne nous en parle pas », déplore Alizée Porto. « C'est davantage qu'une omerta, c'est une banalisation, a précisé une interne dans la salle. On dit tout le temps "l'hôpital est à part", maintenant on se rend compte que ces comportements ne sont pas normaux. Il faut nous former »

Ces propositions ont été adressées à l'Élysée, Matignon et aux ministres compétents. C'est désormais le nouveau bureau de l'ISNI qui devra poursuivre le combat. Jean-Baptiste Bonnet, interne en endocrinologie à Montpellier, a été élu président de l'ISNI le 19 novembre, lors de l'assemblée générale de la structure jeune. Il succède à Olivier le Pennetier. Marie-Coline Rubio, interne en psychiatrie à Paris, a hérité du poste de vice-présidente en charge de l’égalité femmes/hommes et succède à Alizée Porto. 

 


Source : lequotidiendumedecin.fr