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Dr Philippe Vermesch (SML) : « Plutôt que le Panthéon et des médailles, il faut tout faire pour rendre plus attractive la médecine libérale »

Publié le 10/06/2020

Crédit photo : S. Toubon

Sept semaines pour réformer le système de soins à l’hôpital et en ville. Lancé fin mai, le Ségur de la santé doit déboucher sur des premières mesures en juillet. Quelles seront les conséquences pour la médecine libérale ? Le Dr Philippe Vermesch, président du SML (syndicat des médecins libéraux), a évoqué le sujet au cours d’un Live chat sur lequotidiendumedecin.fr. Il a répondu à vos questions pendant près d’une heure, en rappelant ses priorités pour la profession.

Paiement à l’acte, équipes de soins de proximité, simplification administrative… le Dr Vermesch a plaidé pour des mesures visant à rendre plus efficace et plus attractive la médecine libérale. Selon lui, ce mode d’exercice est « plus agile et moins cher que tous les systèmes administrés que l’État veut nous imposer ».

Chat Philippe Vermesch

Journaliste QDM (SL)
Bonjour à toutes et à tous.
Le Live chat va bientôt commencer. Nous accueillons aujourd’hui le Dr Philippe Vermesch (SML). Le président du SML répondra à vos questions sur l’état des négociations en cours dans le cadre du Ségur de la Santé et sur les priorités à fixer pour la médecine libérale. Encore quelques minutes avant le début de ce Live Chat. Merci de votre patience.
 
Journaliste QDM (SL)
Le Dr Vermesch est arrivé dans nos locaux.
Live chat avec le Dr Philippe Vermesch (SML)
Le Dr Vermesch est accueilli par Jean Paillard, directeur de la rédaction, et Cyrille Dupuis, rédacteur en chef des informations professionnelles. Le chat va bientôt commencer.
 
Journaliste QDM (PT)
Bonjour Dr Philippe Vermesch (SML). Nous sommes ravis de vous accueillir dans les locaux du « Quotidien ». Merci d’avoir accepté notre invitation.
Dr Philippe Vermesch (SML)
Bonjour à tous, j'espère que cette période Covid ne vous a pas trop atteints, il est temps que les patients nous consultent.
Doc Tals
La crise sanitaire actuelle avec son impact violent sur l’activité libérale pousse les jeunes médecins à reporter, voire annuler leur envie d’installation en libéral. Y a-t-il un plan d’aide pour une primo-installation en libéral en post-Covid ?
Dr Philippe Vermesch (SML)
Elle n'est pas prévue actuellement, et nous restons sur les aides déjà en cours dans la convention qui ne suffiront pas à motiver ces jeunes médecins. Nous en parlons en commission paritaire nationale (CPN) avec l'Assurance-maladie.

Il vaut mieux réfléchir à de véritables incitations quotidiennes, afin de rendre la médecine libérale attractive.
Pediakit
Bonjour. Quand est-ce que les syndicats vont enfin nous défendre pour obtenir des honoraires décents (au moins les équivalents européens) afin de pouvoir arriver à nous mettre la tête hors de l'eau !! 1) honoraires décents ; 2) nous considérer enfin comme acteurs de la santé ; 3) supprimer les charges de ces 3 mois urssaf carmf ! Merci ++++++
Dr Philippe Vermesch (SML)
Je vous invite à lire le programme du SML, où nous défendons un paiement à l'acte pour 80 % de l'activité, une consultation au niveau européen de minimum 45 euros et une coordination avec une équipe de soins de proximité honorée à son juste niveau pour dégager du temps médical et offrir aux médecins un exercice beaucoup plus en relation avec leurs patients.

Le médecin libéral traite 80 % de la population a contrario de l'hôpital, pour un budget global de 30 % des dépenses. Nous sommes de véritables acteurs de santé, mais le gouvernement doit mettre en face les moyens pour rendre notre exercice attractif alors qu'il se dégrade régulièrement depuis des années.

En ce qui concerne les charges, la CARMF a joué le jeu, quant à l'URSSAF, cela dépend du gouvernement. Nous l'avons demandé.
St74
Où allez-vous proposer de couper dans les dépenses ? Ces systèmes onéreux type infirmières Asalée et autres peu efficaces, ces agences type ANAP qui font doublons, les 140 centres d'examens de santé CPAM, etc, etc... Mieux payer les soignants, d'accord, mais faire des économies ailleurs, enfin, ce sera primordial.
Dr Philippe Vermesch (SML)
Beaucoup de choses sont à revoir, à commencer par toutes les strates administratives. Nous sommes à 10 % d'emplois administratifs supérieurs par rapport à l'Allemagne, ce qui équivaut à 120 000 emplois soignants en plus. Ne réfléchissons pas tout hôpital, qui doit revenir dans son 3e recours et arrêtons la doctrine de toujours plus pour l'hôpital.

Le SML prône une coordination entre les professionnels de santé autour du patient sous forme d'équipes de soins de proximité, au minimum médecin, infirmière et pharmacien, et autres en fonction de la pathologie.

Quand je parle de doctrine, elle s'applique aussi aux multiples centres de santé subventionnés à qui mieux mieux, en concurrence déloyale avec les libéraux de leur ville et au détriment des impôts des concitoyens. Une volonté politique doit se faire jour.
Doc du 22
Est-ce que les syndicats vont encore se tirer dans les pattes ? Allez-vous enfin vous entendre pour défendre la profession ?
Dr Philippe Vermesch (SML)
Globalement, nous allons dans le même sens, à la différence que certains comme le SML veulent un exercice libéral et non administré sous perfusion des paiements forfaitaires. Après, il existe des ego personnels comme cela vient de se passer dans le plus vieux syndicat médical...
Dr Spud
La paperasse continue de nous envahir. Que proposez-vous concrètement dans le groupe sur la simplification ?
Dr Philippe Vermesch (SML)
Tout le monde parle de simplification, mais personne ne propose grand-chose. Pour le SML, il faut que le médecin ait zéro papier à traiter, que la feuille de soins dégradée ne soit pas systématiquement refusée avec demande de feuille de soins papier.

Il faut de même avoir une e-CPS rendant l'activité beaucoup plus facile.

La coordination doit pouvoir s'appuyer sur le numérique, avec juste rémunération pour inciter les médecins. Elle doit être simple et ne pas passer par des systèmes chronophages en « réunionite » aiguë, type CPTS, qui ne concernent pas la majorité des exercices actuellement. Le SML propose de mettre en place une coordination autour du patient, par déclaration sur Amelipro.

Les ARS doivent être facilitatrices et ne pas exiger un protocole trop lourd comme c'est le cas actuellement pour toute initiative libérale.
Youssouf
Si on voulait vraiment tirer les leçons de la crise, ne serait-il pas temps de mettre l'accélérateur sur les forfaits, sur la télémédecine et sur le tiers payant ?
Dr Philippe Vermesch (SML)
Tout ce que le SML aime ! Les forfaits conduisent à une médecine administrée qui n'est pas l'apanage de la médecine libérale, le tiers payant aux mains des caisses et des complémentaires est à mettre dans le même sac. Par contre, nous sommes pour un développement de la télémédecine dans le respect du parcours de soins.

Cette télémédecine permet de gagner du temps médical et en même temps d'offrir une consultation à des patients sans médecin traitant. A propos du tiers payant, nous préférons une solution d'avance de frais garantis avec contrôle des droits et rapprochement bancaire, comme le propose Paymed dont plusieurs syndicats (dont le SML) ont été à l'initiative.
Journaliste QDM (SL)
Live chat avec Dr Philippe Vermesch (SML)
 
Journaliste QDM (PT)
Suggestion à soumettre pour rendre attractif la poursuite d’activité après la retraite :
Suppression, voire allègement des cotisations, pour faciliter et encourager le cumul emploi-retraite, au vu de la baisse de démographie médicale.
Dr Philippe Vermesch (SML)
Tout à fait d'accord, c'est déjà proposé par le SML, surtout pour l'URSSAF. Je rappelle que la cotisation CARMF rapportera des points à partir de janvier 2022. Merci aux retraités actifs, ce serait bien pire sans eux.
Journaliste QDM (PT)
1) Où en est-on de notre défense de notre liberté d'exercice, on voit bien toute les atteintes et pressions exercées. Je cite :
– les ROSP ne seront versées qu'à condition d'appartenir à une CPTS. Avons-nous besoin d'être tous placés au même endroit ?
– Je ne reviens pas sur les restrictions de prescription, sur la tentative d'orientation des prescriptions, sur la vison monofocale hospitalière des conduites thérapeutiques ;
2) Où en est-on de notre politique tarifaire quand les mutuelles on vu leurs tarifs augmentés de plus de 40 %, les prix de l'électricité, du gaz… de plus de 5% et, nous, notre consultation bloquée à 25 euros avec 9 années d'études et un tarif aligné sur celui des sages, l'introduction d'exceptions tarifaire entraînant une discrimination de nos patients pour ne pas parler d'une exclusion organisée des visites à nos patient les plus fragiles.
Dr Philippe Vermesch (SML)
D'accord avec tout cela, c'est la conséquence d'une politique permanente de réduction des dépenses. Nous la combattons dès que nous en avons l'occasion.

Minimum dix ans d'études, des responsabilités, un temps de travail au delà des 35 heures... Le tout pour une consultation dont le tarif se situe à la queue des pays européens. La technocratie veut nous enfermer dans des exercices type CPTS, qui ne répondent pas nécessairement aux vôtres. Il y a fort à faire pour redonner de l'attractivité à notre métier mais cela passe aussi par redonner du pouvoir de décision aux médecins.

L'alignement du prix des actes sur l'augmentation du coût de la vie est une de nos propositions de longue date.
Nanocervo
Tout le monde essaie de tirer la couverture à soi dans ce « Ségur de la santé »... Est-ce que ce ne serait pas plus intelligent de profiter de l'occasion pour faire travailler ensemble la ville et l'hôpital ?
Dr Philippe Vermesch (SML)
Oui très certainement, mais un mois de discussions pour régler des problèmes datant de plus de 25 ans semble un peu court. On a vu que la ville avait très fortement réagi dans la crise Covid et si d'aventure les demandes de cette dernière n'étaient pas entendues, il n'y aurait plus grand-chose à attendre de ce gouvernement.

Lien ville-hôpital : en effet, mais commençons par montrer aux hospitaliers que la ville est là pour soigner et non pas pour s'enrichir (comme ils le pensent souvent).

On pourrait imaginer une intrication entre l'hôpital et la ville au niveau du soin (type statut mixte), ce qui permettrait à tout le monde de se connaître et réagir face à des crises comme le Covid, les acteurs du soin ayant leur place prédéfinie dans le système.
LYZA
Bonjour. Il faudrait valoriser les consultations à l'échelle européenne pour inciter à rester en libéral. Qu'en pensez-vous ?
Dr Philippe Vermesch (SML)
Je suis d'accord avec vous (le SML le propose), mais je rappelle que l'aspect financier arrive en quatrième position comme facteur de l'attractivité du métier. Plus de temps médical, de temps personnel et moins de tâches administratives arrivent en tête. Pour le SML, tous les cabinets devraient avoir du personnel administratif.
Journaliste QDM (SL)
Live chat avec Dr Philippe Vermesch (SML)
 
ZoumiMG
Les négociations vont-elles concerner les tarifs des visites ? Avez-vous des propositions ?
Dr Philippe Vermesch (SML)
A priori non dans le Ségur de la santé qui sera trop axé sur les rémunérations hospitalières, cela dépend surtout de la négociation conventionnelle dont nous réclamons l'ouverture. Le SML demande une visite longue chez toute personne en ALD de plus de 70 ans, toutes pathologies confondues.

Le SML réclame depuis longtemps une visite longue de prévention à des âges clés de la vie. Celle-ci permettra enfin d'enclencher une véritable politique de prévention qui peine à se mettre en place. La consultation post-Covid a été demandée en son temps par le SML.
Therapix
Y a-t-il des discussions autour de l'extension du tiers payant à de nouvelles catégories de population ?
Dr Philippe Vermesch (SML)
Pas pour le moment, mais rappelons que la complémentaire santé solidaire issue de la fusion de la CMU-C et de l'ACS touche 7 millions de personnes. Si cela continue, on nous parlera même plus de secteur II...
Freddy80
Le Ségur de la santé va-t-il enfin permettre la mise en place d'un numéro unique pour les libéraux ? Est-ce que vous portez toujours le 116-117 ?
Dr Philippe Vermesch (SML)
Pour le SML, un numéro unique type SAS ou 15 n'est pas viable. La crise Covid l'a montré. La régulation obligatoire des urgences par un 116-117 est la seule façon de désengorger l'hôpital et de recentrer les soins non programmés sur la médecine de ville. Le SML continuera à porter cette solution avec incitation financière aux médecins qui y participeront. Nous demandons une évaluation des trois régions (dont le Grand Est) qui ont expérimenté le 116-117 pendant la crise.
St74
Et le devenir des ARS créées en 2011 C'est une strate administrative de plus. Allez-vous proposer de les supprimer tout bonnement et renforcer les directions départementales simplement ? Avant 2011, est-ce que le système de santé fonctionnait moins bien ?
Dr Philippe Vermesch (SML)
En France, il est difficile de supprimer quelque chose mais on peut réorienter les ARS sur un rôle de facilitation et d'accompagnement de l'exercice. Une plus grande transparence de leurs décisions, notamment en déploiement de matériel lourd est nécessaire. Elles sont là pour faire parler entre eux les différents acteurs de santé de la région et mettre en musique ce que ceux-ci veulent.

Les supprimer participerait à la réduction du millefeuille administratif.
Dr Tantmieux
Pendant la crise, le SML a été en pointe pour demander davantage de compensations financières pour les médecins de ville. N'est-ce pas un peu contradictoire pour des libéraux que de venir pleurer auprès de la Sécu ?
Dr Philippe Vermesch (SML)
En effet, cela peut être vu comme une contradiction mais le plan blanc a ordonné l'arrêt d'activité des cliniques, et certains discours politiques ont demandé aux Français de rester chez eux. Les médecins ont été EMPÊCHÉS de travailler.
marion0
Qu'est-ce que le Ségur va changer pour la rémunération des médecins qui exercent dans les CPTS ?
Dr Philippe Vermesch (SML)
Pour le moment, il n'est pas prévu de rémunération. Seule la rémunération de l'organisation de la CPTS est prévue par la convention.
Journaliste QDM (PT)
Arrêtons avec cette idée du TPE, c'est la dévalorisation pure et simple de notre exercice.
Quant à PAYMED, un vrai scandale. Payer 60 euros par mois aux banques pour s'assurer que nous allons être bien payés, ahurissant et scandaleux.
Dr Philippe Vermesch (SML)
Le SML n'a jamais été un partisan du tiers payant obligatoire, qui nous laisse à la merci des caisses. 60 euros par mois pour avoir la certitude d'être payé et le contrôle de vos honoraires par un rapprochement bancaire vous coûte moins cher que le temps administratif que vous y passez sur votre temps libre.
Journaliste QDM (SL)
Live chat avec Dr Philippe Vermesch (SML)
 
JB C
J'ai lu dans « le Quotidien » que le premier médecin décédé du Covid serait panthéonisé. C'est ridicule. Donnez-nous plutôt les moyens de bosser correctement !!!
Dr Philippe Vermesch (SML)
Je suis d'accord avec vous, plutôt que le Panthéon et des médailles, il vaut mieux tout faire pour redonner de l'attractivité à la médecine libérale qui, je le rappelle, est plus agile et moins chère que tous les systèmes administrés que l'État veut nous imposer. Le SML s'associe à la peine des familles qui ont perdu un des leurs dans cette crise.
Journaliste QDM (SL)
C’était la dernière question. Merci, Dr Vermesch, d’avoir participé à ce Live chat avec les lecteurs du « Quotidien ». À vous le mot de la fin !
Dr Philippe Vermesch (SML)
Merci de m'avoir suivi dans ce chat. Je vous incite à consulter le site du SML et à lire notre programme. Celui-ci tient dans son nom « Syndicat des médecins LIBÉRAUX ». Et merci au « Quotidien du Médecin » !
Journaliste QDM (SL)
Merci à toutes et à tous pour votre participation. Rendez-vous dans quelque temps pour un nouveau Live chat.

 


Source : lequotidiendumedecin.fr