Agacé par le départ inopiné de confrères, un généraliste réclame un encadrement plus strict de la fin d'activité

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Publié le 24/04/2018
Arrêt d'activité

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Crédit photo : GARO/PHANIE

Deux poids, deux mesures pour la médecine libérale ? Le Dr Nicolas Thual, généraliste à Brehan (Morbihan), s’interroge. Dans son secteur, deux confrères ont raccroché il y a peu et deux autres s’apprêtent à faire de même. Sur les quatre, deux sont malades. « Je ne lance pas la pierre à mes confrères qui cessent », prévient Nicolas Thual. Mais l’absence d’informations sur ces départs l’irrite. « Nous avons appris par hasard qu’un médecin partait au mois de juin. (…) Le quatrième départ, pour raison de maladie, va être annoncé. Mais rien n’est prévu, rien n’a été anticipé, rien n’a été dit à personne », s’indigne le généraliste. En janvier, il reprochait déjà à certains praticiens de ne pas anticiper leur départ, notamment sur le plan technologique.

Pas la même définition de l’exercice libéral

Pour le généraliste breton, les médecins cessant leur activité devraient être soumis à certaines obligations. Comme les primo-installants. « Un jeune qui s’installe est obligé de passer devant le conseil de l’Ordre », souligne-t-il. « On lui dit "tu nous diras où tu vas, un membre de l’Ordre viendra contrôler ton cabinet. Si tu es en zone prioritaire, tu vas pouvoir bénéficier de 50 000 euros. En contrepartie, tu signes un contrat, t’engages à rester cinq ans, à exercer en groupe, à participer à la PDS, être maître de stage… Et si tu pars avant les cinq ans, tu rembourses tout." », détaille-t-il. « Et tout cela est logique », concède le Dr Thual.

« Celui qui cède son activité est-il convié par l’Ordre pour annoncer son départ avec un certain délai ? », interroge-t-il. « Non, ce sont des gens qui partent avec des rendez-vous prévus jusqu’au dernier jour », déplore le praticien. Ce qui lui fait dire que la notion de libéral n’est pas la même pour ceux qui démarrent et ceux qui cessent leur activité. « Bien sûr, ce n’est pas le cas de tout le monde. Certains s’organisent et trouvent des successeurs ou ont tout fait pour », tempère néanmoins le généraliste.

Le code de déontologie flou

Patients et confrères se retrouvent pénalisés par les départs soudains et non annoncés de praticiens, explique Nicolas Thual. « Certains patients ne retrouvent pas de médecin traitant et se font flinguer à la permanence des soins ou aux urgences car ils n’ont rien à y faire. L’activité du praticien est désorganisée et il doit composer avec le mécontentement du patient », résume le Breton.

Interrogé par Le Généraliste en février au sujet d’une généraliste ayant bénéficié à trois reprises d'aides à l'installation en deux ans, le Dr Jacques Morali, président de l'Ordre de Bretagne, rappelait qu’il s’agissait d’une profession libérale et qu’à ce titre un praticien était libre de s’installer et d’interrompre son activité comme il le voulait. Il reconnaissait cependant qu’il n’est pas « très éthique d’abandonner une patientèle sur le plan moral » et que le faire « sans prévenir, ni se préoccuper de la transmission des dossiers est une faute condamnable par l’Ordre et le code de déontologie ». Un code assez flou, qui stipule seulement que le praticien doit assurer à tout moment la continuité des soins et qui impose aux praticiens cessant d’exercer d’avertir le Conseil de l’Ordre.

« Sur le terrain, ce n’est pas appliqué, constate Nicolas Thual. Qui doit faire appliquer ces règles ? L’Ordre ? L’ARS ? » Et le généraliste de formuler ses propositions : « Avec certains de mes confrères, nous demandons à mieux anticiper les départs. Il faut qu'il y ait une rencontre pour prévoir l’avenir quand plusieurs médecins sont en fin d'activité. » Le Dr Thual suggère également de former – notamment via les syndicats – les praticiens à l'arrêt de leur activité, comme on le fait pour l’installation dans les facultés de médecine.


Source : lequotidiendumedecin.fr