Madame, Après les 5 années Touraine caractérisées par le mépris des libéraux et l'hospitalocentrisme exclusif sur le public, nous avions beaucoup d'espoir dans la nouvelle équipe. Les premières actions de notre ministre nous ont fait déchanter.
Manifestement, dans la lignée de vos prédécesseurs, de droite ou de gauche, vous allez poursuivre la politique, que nous pensons voulue et organisée, de destruction du secteur libéral de la santé par étouffement progressif, à l'aide de contraintes administratives, réglementaires, fiscales, parafiscales et juridiques de plus en plus chronophages et punitives.
Matraquage
Actuellement nous assistons à un matraquage de critiques des libéraux par tous les canaux dont vous disposez, dont la cour des comptes… Les contrôles, nécessaires, exercés par la sécurité sociale sont de plus en plus fréquents, tatillons et bureaucratiques, réalisés par des médecins contrôleurs de plus en plus méprisants. Je dis bien médecins contrôleurs, car en 33 ans d'exercice libéral, je n'ai jamais reçu un conseil mais n'ai subi que des contrôles.
Les honoraires conventionnels sont dans notre pays absolument ridicules si on tient compte de notre niveau d'études, d'investissement, de perfectionnement des connaissances, de la qualité de nos actes et de leur suivi, de notre responsabilité immédiate et sur 30 ans.
Un chirurgien ne pratiquant pas de dépassement d'honoraires -et cela est mon cas- peut être en difficulté financière, car, non seulement les actes ont été insuffisamment revalorisés, mais aussi les charges ont vu leur progression exploser et sont devenues confiscatoires, en particulier les charges assurantielles, de personnel, et fiscales. Les aides apportées ne sont qu'une insignifiante compensation à la faible valeur des actes…
Tout est fait pour décourager les libéraux et cela se ressent dans la pratique et la démographie. Il y a 10 ans, sur 10 chirurgiens sortant des hôpitaux, 9 allaient en privé, d'autant que l'hôpital ne peut pas accueillir tout le monde. Aujourd'hui, la proportion s'est inversée, malgré les difficultés du public dues en partie aux pouvoirs exagérés des administratifs et des syndicats.
Crise des vocations
Les jeunes médecins en formation que je vois ne veulent plus faire chirurgie, du fait de la longueur de la formation, des responsabilités majeures, inégalées et immédiates, des 60 heures de travail hebdomadaires, des revenus ridicules, du peu de considération affiché par les tutelles, de la juridicisation galopante. Les patients ont fort bien compris, ainsi que les avocats, que les plaintes ne coûtaient rien et étaient souvent lucratives Grace aux magistrats…
Les rares étudiants chirurgiens qui s'installent en libéral le font, en général, parce qu'ils n'ont pas trouvé leur place à l'hôpital ; la majorité souhaite rester sous la « protection » du secteur public, même à un poste largement sous évalué par rapport à leurs compétences et à leur formation.
Plusieurs raisons à cela : salariat, 42 heures maxi de travail, sauf pour les internes, toujours corvéables à merci, repos compensateur après astreinte ou garde, et surtout assurance en responsabilité professionnelle prise en charge par l'hôpital…
Mais dans le système de santé français, l'hôpital avec son administration pléthorique et ses syndicats tout puissants ne peut pas et ne pourra pas tout absorber. Pourtant, vous persistez dans votre volonté de voir le secteur libéral disparaître…
Dans ces conditions, merci d'arrêter cet étranglement progressif et nationalisez-nous au plus vite !!! Ainsi les hôpitaux verront arriver de nouvelles « mains », eux qui réclament toujours plus de moyens humains et matériels…
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