Pour tenir la promesse d'Emmanuel Macron de désengorger tous les services d'urgence d'ici à fin 2024, le ministre de la Santé, François Braun, a annoncé cette semaine la généralisation du service d'accès aux soins (SAS) « dès l'année 2023 ». Imaginé dans le Pacte de refondation des urgences de 2019 et lancé dans une première phase pilote dans 13 régions et 22 sites en novembre 2020, le dispositif est en effet considéré comme un antidote à l'engorgement des urgences. Le ministre en a d'ailleurs été l'un des premiers expérimentateurs en Moselle.
Pour accompagner cette extension, l'ancien président de Samu-Urgences de France (SUDF) a lancé lundi, à l'occasion d'un déplacement dans la Vienne au CHU de Poitiers, puis dans une maison de santé pluridisciplinaire, une mission composée de cinq personnalités : trois médecins (un généraliste, le Dr Yannick Frezet, deux urgentistes, les Drs Yann Penverne et Henri Delelis-Fanien), un représentant des patients prochainement désigné par France Assos Santé et Céline Etchetto, directrice déléguée à l’organisation de l’offre de soins de l’ARS Nouvelle-Aquitaine. « Cette mission se déplacera dans toute la France jusqu’à l’été 2023 pour s’inspirer des expériences réussies et ainsi permettre le déploiement des SAS dans tous les territoires en articulation avec les organisations locales déjà existantes », a détaillé le ministère.
D'ores et déjà, ladite mission pourrait s'inspirer du retour d'expériences de la phase pilote qui sera publié prochainement par la direction générale de l'offre des soins (DGOS). En effet, plusieurs enseignements ont été dévoilés cette semaine. Pour l'heure, la France compte 31 sites opérationnels, couvrant la moitié de la population. « Il reste encore la moitié du chemin à faire », reconnaît Ségur. Pour la branche médecine générale, « près de 50 % des actions prises par les SAS sont des conseils médicaux téléphoniques ». Cette tendance tend d'ailleurs « à croître », indique le ministère. Et pour préserver « les ressources des services d’urgences et l’articulation avec les effecteurs en ville », il se veut être « attentif » à « un développement raisonné, et sans abus » des centres de soins non programmés.
Un décret en concertation
L'annonce ministérielle n'enchante pas vraiment le Dr Antoine Leveneur, président de la conférence nationale des URPS médecins libéraux (CN-URPS). En janvier dernier, le généraliste normand avait jugé prématurée la généralisation du service d'accès aux soins. Trois mois plus tard, le président de l'union de Normandie n'a pas changé d'avis. « Nous attendons encore la version finale du décret SAS qui posera vraiment les choses », dit-il. Ce texte « en cours de concertation » doit en effet compléter le cadre réglementaire du dispositif et sécuriser les organisations.
Puis, le Dr Leveneur se dit toujours opposé à ce que « tout passe par le SAS ». « On généralise sans faire d'évaluation. Que fait-on des CPTS ou des organisations locales de soins non programmés rémunérées par les ARS ? », dit-il. Une autre réserve avancée par le praticien : le fonctionnement de la plateforme numérique destinée à l’usage exclusif des professionnels participant au SAS. « Il y a encore des bugs, le fonctionnement de cet outil n'est pas partout optimal. Chez moi, les trois quarts des Samu/SAS ne se servent pas de cette plateforme », affirme-t-il.
Par ailleurs, les médecins libéraux seraient encore « réticents à afficher leur créneau sur une plateforme nationale ». « Nous sommes en faveur des mesures locales qui fonctionnent et qui permettent d'amener les généralistes dans l'effection des soins non programmés », résume-t-il.
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